Pourquoi Mario Draghi a tort de penser que le plein emploi ne concerne pas la BCE <!-- --> | Atlantico.fr
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Interrogé sur la situation de l'emploi en Europe, Mario Draghi a répondu que cette question n'était pas du ressort de son mandat.
Interrogé sur la situation de l'emploi en Europe, Mario Draghi a répondu que cette question n'était pas du ressort de son mandat.
©Reuters

Question de mandat

Interrogé sur la situation de l'emploi en Europe, Mario Draghi, le président de la Banque centrale européenne, a répondu que cette question n'était pas du ressort de son mandat. Faut-il s'en inquiéter ?

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Au cours de son intervention du 10 janvier dernier, Mario Draghi répondait aux interrogations des journalistes. Suite à une question posée sur le niveau de chômage en zone Euro, soit 11.8% de la population active, Mario Draghi répondait : "Je vous demande de garder à l’esprit qu’à la différence de la réserve fédérale des Etats Unis, notre mandat n’est pas le plein emploi".

Juridiquement, factuellement, le président de la Banque Centrale Européenne a raison. Le mandat de la BCE est bien de stabiliser les prix, de maintenir l’inflation sous le seuil mais proche de 2.00%. Ce qui apparait comme plus alarmant est que la croissance et l’emploi sont l’objectif d’une politique monétaire. Le plein emploi n’est en effet pas le mandat de la BCE, mais il est son objectif. Pour l’exemple, le site de la Bundesbank nous indique "Une monnaie stable est la fondation d’une économie saine. Elle protège les épargnants et les personnes percevant un revenu, tout en promouvant croissance et emploi".

La stabilité des prix n’est alors qu’une méthode au service de la croissance et de l’emploi. Force est de constater aujourd’hui l’incapacité de l’autorité monétaire à répondre à cet objectif, dans le cadre du mandat qui lui est délivré. Si la BCE n’avait pas les moyens d’ajuster l’économie européenne pour lui permettre d’atteindre le plein emploi, Mario Draghi n’aurait pas répondu de la sorte. Par cette formulation, le président de l’autorité monétaire indique qu’une banque centrale a les moyens de parvenir au plein emploi, mais que ce mandat n’est pas celui qui lui a été octroyé.

L’ironie est qu’il est aisé de faire une comparaison grotesque avec un pompier qui préciserait que son mandat n’est pas d’éteindre le feu mais bien de diriger sa lance selon un certain angle. Les mots de Mario Draghi précisent le fossé qui existe aujourd’hui entre une méthode obsolète et la nécessité de recourir à tous les moyens pour redresser l’économie Européenne.

La mention faite au mandat de la Réserve Fédérale américaine n’est pas innocente. Cette dernière a en effet choisi de renoncer à la méthode de l’ Inflation targeting, pour se consacrer à un objectif de niveau de chômage. De la même façon, les autorités monétaires anglaises s’apprêtent à modifier leur méthode, en s’appuyant sur celle du NGDP targeting (objectif de PIB nominal) dès l’entrée en fonction de son nouveau gouverneur, Mark Carney, en juillet prochain. (L’objectif de taux de chômage mis en place aux Etats Unis n’étant lui-même que la première étape de la méthode du NGDP targeting).

En ce sens, les mots choisis par Mario Draghi ne sont rien d’autre qu’un avertissement aux Etats Européens. Le mandat de stabilité des prix doit être remis en question par l’absurdité d’une réalité : la dichotomie entre le strict respect du mandat de stabilité des prix et l’envolée du chômage vers le seuil de 11.8%. Et ce, alors même que l’objectif de ce mandat n’est rien d’autre que la croissance et l’emploi. De plus, les résultats enregistrés sur le front de l’emploi aux Etats Unis ces derniers mois (7.8% de la population active) laissent peu de place à la comparaison entre les méthodes employées.

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