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Traité budgétaire : la fracture européenne peut-elle faire exploser la majorité et la gauche ?
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Point de rupture

François Hollande a déclaré lundi que le traité budgétaire européen serait soumis au vote parlementaire dès octobre. Les débats devraient toutefois être agités, du fait de divisions au sein même du PS.

Sylvain Boulouque

Sylvain Boulouque

Sylvain Boulouque est historien, spécialiste du communisme, de l'anarchisme, du syndicalisme et de l'extrême gauche. Il est l'auteur de Mensonges en gilet jaune : Quand les réseaux sociaux et les bobards d'État font l'histoire (Serge Safran éditeur) ou bien encore de La gauche radicale : liens, lieux et luttes (2012-2017), à la Fondapol (Fondation pour l'innovation politique). 

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Atlantico : Contrairement à la promesse de campagne de François Hollande, le traité budgétaire européen n'a pas été renégocié avec l'Allemagne. Après le débat sur le traité constitutionnel en 2005, qui avait opposé les partisans du "oui" et du "non", la gauche se divise une nouvelle fois sur la question de l’Europe. La fracture européenne risque-t-elle de faire exploser la majorité ?

Sylvain Boulouque : Depuis la création de l’Europe, les gauches comme les droites ont toujours été extrêmement divisées sur la question européenne. Ainsi en 1954, lors du vote sur la Communauté européenne de défense, le PCF, aligné sur les décisions soviétiques a naturellement appelé a voté non comme la droite gaulliste et une partie de la SFIO. Depuis cette date, les communistes, par tradition et par conviction se sont toujours prononcés contre les traités européens (Traité de Rome, Acte unique, Maastricht, TCE de 2005, etc…).

La ligne de partage n’est pas la même chez les socialistes
. Majoritairement, les socialistes sont pro européens. La SFIO puis le PS demeurent, avec la démocratie chrétienne, un des moteurs de la construction européenne. Cependant, depuis 1954, il y a toujours eu dans le parti une minorité plus ou moins forte contre la construction de l’Europe, ou plus exactement contre certaines formes de cette construction. Mais, jusqu’à aujourd’hui la question européenne n’a jamais fait imploser l’unité du PS.

Le Front de gauche entend mobiliser contre le traité budgétaire européen. Dimanche 26 août à Saint-Martin-d'Hères (Isère), en clôture du rassemblement de l'université d'été, Jean-Luc Mélenchon a appelé à une "grande manifestation populaire" pour réclamer l'organisation d'un référendum sur le sujet.  Peut-il réussir son pari ?

Mélenchon et le Front de gauche s’inscrivent dans la tradition de la contestation de la construction européenne. Pour dénoncer ces traités, ils reprennent pratiquement les mots d’ordre du PCF durant la période stalinienne et marchaisienne du PCF défendant "un socialisme aux couleurs de la France" comparant la CED à la troisième invasion allemande et à la collaboration.

Par cette manifestation, il reprend classiquement les modalités de protestation du PCF en y ajoutant une pointe spécifique de trotskisme dans sa dimension lambertiste, ce groupe connu sous des appellations diverses OCI, PCI, MPPT, PT et aujourd’hui POI a toujours organisé des rassemblements contre l’Europe. Cette dénonciation de l’Europe sur des bases sociales permet d’unifier les différentes composantes de l’extrême gauche léniniste ou post léniniste.

Aujourd’hui, il est encore impossible de dire si le pari engagé peut être tenu. Il convient de rappeler que le non de 2005 était davantage un non de droite et d’extrême droite qu’un non de gauche. Tout dépend des évolutions politiques et sociales des mois à venir.

La social-démocratie conduite par le gouvernement Ayrault est-elle compatible avec une gauche plus radicale ? Une nouvelle force totalement indépendante pourrait-elle émerger comme en Allemagne avec Die Linke ?

Si la gauche gouvernementale accepte le soutien de la gauche radicale, l’inverse semble difficile à concevoir. En effet, nous ne sommes plus au début du premier septennat de François Mitterrand voire même des années Jospin où le PCF acceptait la participation gouvernementale. Dès lors l’objectif affiché de Jean-Luc Mélenchon et de la majorité des composantes du Front de gauche est de former une organisation analogue à celle qui existe en Allemagne ou en Grèce avec Syriza. Il s’agit de devenir la force de gauche contestant sur tous les fronts la social-démocratie au pouvoir pour s’imposer comme la force majoritaire – voire hégémonique à gauche, ce qui au vu des résultats des dernières consultations électorales est loin d’être acquis.

Propos recueillis par Alexandre Devecchio

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