Bénévolat : la solidarité existe-t-elle encore en France ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Il n'y a pas assez de bénévoles pour accompagner les handicapés cet été.
Il n'y a pas assez de bénévoles pour accompagner les handicapés cet été.
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Soyez généreux

L'Association des paralysés de France cherche des bénévoles pour juillet-août. Il s'agit de permettre aux handicapés de partir en vacances.

Jean-Marie Barbier

Jean-Marie Barbier

Jean-Marie Barbier est président de l'Association des Paralysés de France depuis 2007. Il est lui-même handicapé de naissance, et Chevalier dans l'Ordre de la Légion d'Honneur. 

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Atlantico: Votre association, via un communiqué de presse publié ce mercredi, lance un appel au bénévolat pour permettre aux handicapés de partir en vacances. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre association en elle-même, et les difficultés que vous rencontrez actuellement ?

Jean-Marie Barbier: APF Evasion [le service vacances de l’Association des Paralysés de France] permet chaque année à plus de 1700 personnes (adultes et enfants) en situation de handicap moteur de partir en vacances. Il propose plus d’une centaine de séjours en France et une trentaine de voyages à l’étranger. Des vacances pour permettre, le temps d’un séjour, aux personnes les plus lourdement handicapées de partager des expériences fortes, de découvrir de nouveaux paysages et de permettre également à leurs familles de bénéficier d’un temps de répit. Ces séjours ne peuvent se dérouler sans l’aide d’accompagnateurs bénévoles.

En effet, chaque été, nous recherchons 2 000 accompagnateurs bénévoles qui accompagneront les vacanciers dans tous leurs gestes quotidiens. Les difficultés rencontrées cette année sont les mêmes que les années précédentes. En effet, si nous avons plus de 50 % de nos accompagnateurs qui reviennent chaque été, il n’en reste pas moins nécessaire de trouver de nouveaux bénévoles notamment masculins. De plus, même si aucune compétence spécifique n’est demandée, il nous faut tout de même des personnes ayant le permis de conduire depuis plus de 2 ans afin de conduire les minibus adaptés. Par ailleurs, un équilibre hommes/femmes sur les séjours est nécessaire.

C’est pourquoi toute personne de plus de 18 ans, dynamique et disponible 2 à 3 semaines cet été peut devenir accompagnateur bénévole ! Renseignement et inscriptions : 01 40 78 00 00 ou www.apf-evasion.org

Comment motiver les jeunes, notamment les garçons, à faire ce type de bénévolat durant leurs périodes de vacances ?

Même si les séjours sont avant tout un temps de vacances pour les personnes en situation de handicap, il s’agit également d’un temps d’échange, de convivialité et de partage entre les accompagnateurs et les vacanciers. La rencontre entre des personnes venant de divers horizons (géographique, professionnel, familial…) apporte une richesse très importante. De plus, le bénévolat peut valoriser un CV d’un jeune ne jouissant pas encore d’une expérience professionnelle étoffée.

Je crois que les témoignages d’autres accompagnateurs valent mieux que de longs discours :

"La proximité avec les vacanciers se transforme très rapidement en complicité ! J’ai vécu mes plus belles rencontres pendant les séjours APF. Je me souviens de fous rires et d’instants magiques", Nicolas, accompagnateur depuis 4 ans.

"On gagne énormément à se confronter à la différence… C’est un des grands enseignements d’APF Evasion", Sébastien, accompagnateur depuis plus de 10 ans !

"Accompagner un séjour APF c’est partir à l’aventure ! A chaque fois on découvre des lieux différents, des activités originales et des gens de tous les horizons. Les rencontres avec les vacanciers sont particulièrement riches, ils ont une telle énergie !", Claire, accompagnatrice depuis 3 ans.

Ce manque de bénévoles est-il constaté dans d'autres associations similaires à la vôtre ? Est-il révélateur d'un manque de solidarité au sein de la société française, trop individualiste?

Depuis quelques années, l’APF et les associations œuvrant dans le champ de la solidarité sont préoccupées par les conséquences sociales et humaines de la crise économique et constatent sur le terrain la montée des périls humains et sociaux. Face à ces crises, notre société répond plus que jamais par le repli sur soi !

L’APF se bat pour que la solidarité ne devienne pas la variable d’ajustement des politiques publiques. Car la solidarité est à la fois une nécessité immédiate, économique et humaine, et un investissement de long terme.

Y a-t-il de réels problèmes d'accompagnement et d'aménagements de la vie quotidienne pour les handicapés ?

A deux ans de l’échéance de la loi handicap de 2005, qui prévoit l’accessibilité des transports en communs et des établissements recevant du public pour le 1er janvier 2015, le constat est sévère : seuls 15% des établissements recevant du public sont accessibles !

L’APF dénonce le manque de volonté politique permettant de respecter l’échéance de 2015. Pire, au lieu d’accompagner la mise en accessibilité de la France, des députés et sénateurs ont tenté de revenir sur l’esprit de la loi de 2005 en introduisant des dérogations à l’accessibilité. Aujourd’hui, l’APF demande d’urgence la création d’une Agence nationale de l’accessibilité et de la conception universelle chargée de valoriser et mutualiser les pratiques innovantes, suivre et contrôler les dispositifs publics, élaborer et coordonner les normes et standards et enfin gérer une caisse de financements publics. Au-delà d’un observatoire à l’accessibilité et à la conception universelle, qui par définition ne fait qu’observer, une agence permettrait d’agir concrètement pour la construction d’une France accessible à tous dès 2015 !

Les USA sont-ils le modèle à suivre en la matière ? Ne sont-ils pas arrivés à une plus grande adaptation aux difficultés des handicapés par les nombreuses procédures engagées par ces derniers pour que la société civile s'adapte à leurs difficultés ?

La France est effectivement en retard par rapport à de nombreux pays européens (pays nordiques) et outre-Atlantique (Etats-Unis, Canada). Faute d’accessibilité des lieux publics et des transports en commun, les personnes en situation de handicap sont sous-représentées dans la société. L’APF se bat pour la construction d’une société inclusive, ouverte à tous, où toutes les personnes trouvent leur place, quels que soient leur situation ou leurs particularités. Cette société se fonde sur le respect des libertés et des droits fondamentaux et sur des principes de non-discrimination et de solidarité.

 Propos recueillis par Romain de Lacoste

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