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Les radars ne sont-ils que des "pompes à fric" ?
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Plein les fouilles

Prévenir les accidents, baisser le taux de mortalité sur les routes, tels sont les arguments avancés par les pouvoirs publics pour multiplier les radars sur la route. Denis Boulard décrypte ce que cette lutte pour la sécurité routière rapporte réellement à l’Etat. Extraits de « Radar Business, à qui profitent les radars » (1/2).

Denis Boulard

Denis Boulard

Denis Boulard est journaliste et auteur. Il a publié l'enquête intitulée Radar Business aux Editions First.

Il a travaillé dans les rédactions du Journal du Dimanche, du Nouvel Observateur et du Parisien entre autres. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages parmi lesquels Prière de Pardonner et Opération Elysée (en collaboration avec Hélène Fontanaud).

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Pour le commun des mortels, les radars ne sont là que pour remplir les caisses. La preuve ? Ils ne sont pas placés dans les zones accidentogènes. Ce qui n’est pas faux. Pas plus, d’ailleurs, qu’ils ne sauvent réellement de vies, comme le prouvent les statistiques de la mortalité routière. Ce qui n’est pas faux non plus. Face à ces attaques, l’État martèle ses messages depuis le lancement du « Projet 1 000 radars ». Premier d’entre eux ? La mortalité routière baisse grâce aux radars et à la peur du gendarme. Deuxième message ? L’insécurité routière coûte cher – plus de 23 milliards d’euros par an 29 – et il faut que cela cesse. Enfin, troisième et dernier message de cette com’ bien rodée, comme le disait mieux que d’autres Cécile Petit, alors déléguée à la sécurité routière : « D’après les études que j’ai, quelles que soient les erreurs commises [par les radars], elles ne sont jamais supérieures à la marge d’erreur prévue. Il y a plutôt des possibilités d’erreurs en faveur des automobilistes et le système est fiable 30. » Qu’en est-il d’un point de vue strictement économique ? Qu’est-ce que le CSA* rapporte au budget de l’État ?

Premier constat et premier regret : il n’existe pas de document officiel permettant de savoir ce que pèse le contrôle sanction automatisé dans les comptes de l’État. De même que le ministère de l’Intérieur refuse aimablement mais avec constance – tout entretien sur les questions économiques et préfère renvoyer vers la DSCR (délégation à la sécurité et à la circulation routières). Pour approcher cette vérité, il faut se référer aux travaux du député UMP Hervé Mariton, qui a publié deux rapports sur la question. Le premier en mai 2009 et le second en novembre 2010. Pour approcher cette vérité, on peut aussi se pencher sur les chiffres avancés le 5 janvier 2012 par le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, lors d’une conférence de presse.

Une manne de plus de 600 millions d’euros

Si les rapports Mariton ne donnent pas les derniers chiffres – et pour cause, ils datent de trois et deux ans –, ils avancent des ratios qui retiennent l’attention. Consciencieux et précis, le député distingue trois catégories d’amendes (plus connues sous leur appellation de PV) : les amendes forfaitaires de première classe pour contravention aux règles de stationnement ou de circulation (510 millions d’euros en 2010) ; les amendes forfaitaires établies par le CSA (522 millions d’euros en 2010) et les amendes forfaitaires majorées, c’est-à-dire celles qui n’ont pas été payées dans les délais réglementaires, tant pour les PV de première classe que pour ceux dressés par le CSA : 452 millions d’euros « évalués » par le gouvernement en 2010. En résumé ? Les PV tous confondus rapportent approximativement 1 500 millions d’euros chaque année, dont 500 millions issus de chaque « catégorie » : les PV de stationnement, les PV établis par les radars et les PV majorés. Mais il y a des zones d’ombre. Par exemple, quelle est la proportion des PV établis par le CSA et majorés ? Claude Guéant, en janvier dernier, évoque un 100 millions d’euros sur cette ligne budgétaire. Ce qui revient à dire que le CSA a rapporté – c’est tout du moins ce que dit le ministre ce jour-là – 530 millions d’euros de PV « forfaitaires » auxquels il faut ajouter 100 millions de PV « majorés ». C’est-à-dire, soyons précis, 630 millions d’euros. Ce chiffre est celui officiellement avancé. Et revendiqué par l’État.

Mais ce montant est faux ! En effet, il ne prend pas en considération les « amendes pécuniaires redevables » prononcées par les tribunaux. Ces amendes que paient effectivement les titulaires de carte grise verbalisés, mais qui n’étaient pas au volant au moment de l’infraction. Ils ont le droit – contrairement à ce que l’on voudrait trop souvent nous faire croire – de ne pas « désigner » qui était au volant de leur voiture au moment des faits. Mais doivent néanmoins s’acquitter de l’amende, même s’ils ne perdent pas de points quand ils n’apportent pas la preuve de leur innocence. Le montant de ces amendes relevait, jusqu’à présent, de la seule appréciation des juridictions de proximité.

*Contrôle sanction automatisé

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Extrait de "Radar Business, à qui profitent les radars" First Editions (7 juin 2012)

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