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Des continents poubelles, peuplés de plastiques et autres détritus, émergent au coeur des océans
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Une bouteille à la mer

Des déchets qui s'accumulent en quantités telles qu'elles commencent à composer un nouveau continent ... ce n'est pas de la science-fiction. Ces amas plastiques perdus au coeur de l'Atlantique ne sont pourtant toujours pas pris en compte et la situation s'aggrave. Et s'il ne s'agissait là que de la partie émergée de l'iceberg ?

Atlantico : Concrètement, qu’est-ce que le septième continent et comment s’est-il formé?

Francois Galgani : Tout d’abord, pour comprendre le septième continent, il faut analyser la circulation océanique. Les régimes atmosphériques, notamment les alizés à l'équateur, poussent les eaux vers l'ouest. Si on considère cinq bassins océaniques à l’échelle du globe, au niveau équatorial les courants provoquent une accumulation des masses d 'eau dans l'ouest, dans le golfe du Mexique par exemple ou encore dans l’ouest du Pacifique. il s 'agit des courants équatoriaux.

Cet afflux d’eau va générer un courant qui va longer les côtes continentales à la fois vers l'hémisphère nord ou vers l’hémisphère sud. Ces courants océaniques repartent alors vers l'est. C'est le cas du gulf stream dans l'Atlantique nord ou du Kuroshio dans le pacifique, responsable du transport des déchets issus du récent tsunami. Une partie des eaux arrivant à l'est va rejoindre l'équateur pour combler le déficit en eau provoqué par les courants équatoriaux.  

Ainsi, l’eau circule à l 'echelle des bassins océaniques de façon tourbillonnaire provoquant une accumulation des objets flottants au centre de ces gyres. C’est ce que les physiciens appellent les zones de convergences. Dans l'Atlantique Nord, cette zone est celle où s 'accumulent également les algues flottantes ayant laissé leurs noms à cette mer, la mer des Sargasses. En raison de l'accumulation prefrentielle des déchets dans ces zones de convergence, les écologistes et organisations non gouvernementales ont décidé d’appeler ce phénomène le septième continent.

La formation de ce septième continent résulte-donc de notre mode de consommation ?

Tout à fait. L’utilisation excessive et la présence de plastique dans le milieu marin est le résultat de produit consommé. En revanche, en ce qui concerne le déversement à la mer de matériaux issus de la pétrochimie (transformation de matières pétrolières). Il ne faut pas blâmer les industries. Plusieurs études réalisées en mer du nord sur le plastique ingéré par les oiseaux montrent que seulement 10 % résulte de produits non transformés contre 90 % pour les produits de plastiques consommés (les sacs plastiques). Ainsi, tout repose sur le comportement des gens.

Vous faites référence au comportement des gens, ne pensez-vous pas qu’il y a un manque de sensibilisation de nos sociétés ? Par exemple, on parle beaucoup de la pollution de nos littoraux, mais on parle peu de la pollution marine.

Cette question est discutable. C’est vrai qu’on a tendance à regarder ce qu’il y a près de soi. Par exemple, les gens arrivent sur la plage, voient des déchets et se sentent directement concernés par le problème. Au large, le soucis est moindre, car on ne voit pas ces déchets. En quelque sorte on est moins confronté au problème. En même temps, vous savez, ce sont des questions globales. Il y a quand même pas mal d’information qui circule sur le thème. Au Etats Unis par exemple, le septième continent et la propreté des mers restent un sujet très suivi. Du coup, je ne pense pas que les gens manquent d’information, le problème vient probablement d’un manque de diffusion. Quand on regarde les actions des politiques en France on est passé de 15 milliards de services il y a 10 ans à un milliard aujourd’hui soit une diminution de 90%. Des décisions ont donc été prises. Néanmoins, des actions existent pour réduire cette pollution. Une directive européenne considère aujourd’hui les déchets comme un véritable problème de pollution avec une obligation de les surveiller. Des gens ont donc conscience du problème.

Quels sont les dangers du micro / macro plastique pour la faune et la flore marine ?

Au début des recherches sur le septième continent, on s’est rendu compte que la présence de micro plastique était exponentielle même si le nombre tant à diminuer aujourd’hui. A titre de comparaison certaine zones de la méditerranée en France sont plus touchés (250 milliards de micro-plastiques flottants) détiennent une plus grande densité de micro plastique que les zones de convergences (mille tonnes de micro-plastiques flottants). La production mondiale étant de 250 millions de tonnes de plastique. Il est par ailleurs important d'éviter la confusion entre le nombre de déchets et le poids. Pendant très longtemps ont s’est attaché à regarder les contaminants chimiques associés et l’ingestion de ces déchets. Des scientifiques ont montré qu'outre les ingestions connues de déchets par les tortues, certaines espèces de poissons vivant dans le plancton ingèrent les micro plastiques. Ce sont des poissons de petites tailles qu’on n’a peu de chance de manger. Ceci limite donc le risque de retrouver ces plastiques dans nos assiettes.

L’océanographe Charles Moore a découvert le septième continent en 1999. Pourquoi avoir mis autant de temps à prendre conscience de ce problème ?

C’est le problème de l'information. Je vous suggère d’ouvrir le livre de Jules Verne dans le chapitre « la mer des Sargasses », il explique l’arrivée des déchets qui viennent du Mississipi et qui s’accumulent en mer. Cela correspond déjà à une description du septième continent, en 1869, il y a presque 150 ans. Cela ne concernait pas le plastique à l'époque mais le phénomène était déjà là. De même qu’il y a des déchets depuis des millénaires dans les fonds marins qu’on appelle des amphores et qui ont maintenant une valeur patrimoniale ! Depuis les années soixante-dix, d’autres travaux scientifiques on décrit l'accumulation de plastiques dans les bassins océaniques. Charles Moore a su donner au final une dimension d’aventure et a suggéré un lien entre le septième continent et les courants marins.

Propos recueillis par Charles Rassaert

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