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La BCE révèle des menaces de déflation plus inquiétantes que prévu
©François WALSCHAERTS / AFP

Impact du coronavirus

La Banque centrale européenne a annoncé jeudi avoir revu ses prévisions de croissance et d'inflation afin d'intégrer l'impact de la crise du coronavirus. La BCE s'attend désormais à une contraction de 8,7% du produit intérieur brut (PIB) de la zone euro cette année avant un rebond de 5,2% l'an prochain et une croissance de 3,3% en 2022.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Encore plus de milliards en faisant encore plus de politique : la Banque Centrale Européenne continue d'avancer, derrière le risque de déflation

• Plus que prévu : 600 milliards d’euros en plus dans le plan de rachat de bons du trésor spécial pour lutter contre la pandémie (PEEP), un plan calibré au début à 500 milliards. Nous allons jusqu’en septembre 2021 et non plus juin,  avec en plus l’idée de réinvestir les bons des trésors arrivant à maturité, jusqu’à la fin de 2012. 

• Un outil de plus : en fait, le PEEP entre dans la panoplie des outils de la politique monétaire de la BCE à côté des achats d’actifs d’obligations d’entreprises et des soutiens aux banques, un outil qui devrait encore augmenter de taille et qui est plus souple d’utilisation.

• Une préoccupation politique de plus : bien sûr, la BCE est sus le seule contrôle juridique de la Cour Européenne de Justice, la Banque Centrale Allemande l’étant sous celui de la Cour Fédérale Allemande. Aussi, pour répondre à son jugement du 5 juin, c’est à elle et aux autorités politiques de répondre, mais Christine Lagarde est confiante sur le résultat.

Crainte de déflation : Christine Lagarde est d’autant plus confiante que les nouvelles qu’elle annonce sont mauvaises : baisse de 3,8% du PIB de la zone au un premier trimestre, évidemment pire au deuxième, avant une modeste reprise. Au total, -8,7% en 2020, +5,2 et 3,3% en 2021 et 2022. La perte ne sera pas compensée. Surtout, les chiffres d’inflation sont très pires : 0,3% en 2020, 0,8% en 2021 et 1,3% en 2022. Au plus loin que la BCE publie ses chiffres, nous ne sommes donc pas du tout à 2% d’inflation, faute de croissance. Pire encore, ce 0,3% d’inflation est son minimum historique, inquiétant quand on connaît les dynamiques des prix (les hausses appellent des hausses et les baisses des baisses) avec une marge d’incertitude autrefois estimée à 0,5% par la BCE. Dit autrement, 0,3% peut tangenter 0% ou moins !

Réponses à la Cour Allemande : augmenter les achats de bons du trésor liés à la lutte contre la pandémie est d’autant plus fondé que la crise est grave et l’inflation faible et que la PEEP n’a pas été étudié par la Cour et devrait l’être, ce qui ne sera pas facile pour elle pour maintenir sa vue. C’est d’autant mieux venu que la publication de la structure des achantis de bons du trésor par la BCE en fonction des parts des pays dans son capital a révélé trois surprises :

- Surprise 1 : l’Italie a certes plus été « achetée » que sa part dans les fonds propres de la BCE, mais l’écart est bien plus faible qu’attendu, soit 21,6% des achats contre 17% du capital. L’excès d’achat est de 8 milliards d’euros : ce n’est pas un scandale !

- Surprise 2 : l’Allemagne a été sur-achetée, 27,1% des achats contre 26% du capital. 1,2 milliard de « trop ».

- Surprise 3 : la France a été très sous-achetée, 13,7% des achats contre 20,4% du capital.11,7 milliards d’euros de bons du trésor «non achetés » !

Bref, les marchés devraient comprendre que le soutien de la BCE n’est pas fini, sans encourir le risque de « non proportionnalité » dans ses actions. On comprend qu’elle bouge de nombreux curseurs, bougeant les dates de fin de ses achats par exemple. Le plus important est qu’elle a deux leviers disponibles : aider les banques en leur fournissant plus de liquidités (TLTRO), liquidités moins chères. Ce sera pour la prochaine fois, où l’on aura une meilleure violions sur l’économie et sur l’inflation et sur le contenu des réponses de la BUBA et des autorités politiques à la Cour Allemande sachant que, par ailleurs, il est de plus en plus question d’emprunt de l’Union pour aider des secteurs ou pays, ce qui est plus une mutualisation que l’application du « principe de proportionnalité ». 

En fait, la BCE se soucie d’une zone durablement affaiblie après le pic de la crise, face à une Chine repartie et des États-Unis qui ne comptent pas les soutiens budgétaires et le quantitative easing. C’est alors qu’il y aura besoin de plus de crédits, avec moins de banques plus solides. On entend de plus en plus d’appels à concentration bancaire, notamment ici. Difficile d’imaginer que ce soit innocent.

Pour retrouver l'analyse de Michel Ruimy sur le plan de relance allemand face à la crise économiquée liée au coronavirus, cliquez ICI

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