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Bilan 2019 : Notre-Dame, victime de la médiocrité contemporaine
©Patrick ANIDJAR / AFP

Tragédie

A l'occasion de la fin d'année, Atlantico a demandé à ses contributeurs les plus fidèles de dresser un bilan de l'année. Maxime Tandonnet revient sur l'incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet est essayiste et auteur de nombreux ouvrages historiques, dont Histoire des présidents de la République Perrin 2013, et  André Tardieu, l'Incompris, Perrin 2019. 

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Pour la première fois depuis 216 ans, le 24 décembre 2019, Notre-Dame-de-Paris n’a pas accueilli la messe de Minuit et ses cloches sont restées silencieuses. Si les historiens de l’avenir doivent se souvenir d’un événement exceptionnel, survenu en France au cours de l’année 2019, nul doute qu’ils penseront à l’incendie de Notre-Dame-de-Paris.

Notre-Dame a traversé intacte plus de huit siècles, comme placée sous la protection de la providence. Elle a survécu aux jacqueries, aux révolutions, à la Terreur, à tous les fanatismes anti-religieux, aux sièges et aux famines, aux invasions, à la Commune, aux deux guerres mondiales, aux bombardements de 1914-1918, à l’occupation allemande et l’ordre hitlérien de détruire Paris, aux saccages, et aux pires actes de sauvagerie…

Il a fallu attendre un certain 15 avril 2019: Notre-Dame-de-Paris, en flammes et sa charpente en poutres de chêne du XIIIe siècle, se consumaient sous les yeux effarées de la France entière, dans l’impuissance générale. Ce jour-là, une immense émotion nationale a secoué le pays. 

Ce n’était pas seulement un édifice religieux, une simple cathédrale qui s’embrasait. 

Une fumée sombre emportait l’âme chrétienne de la France, la France de Saint-Louis, du Moyen-âge, des rois capétiens, la France de Jeanne d’Arc, de Napoléon Ier, de Victor Hugo, de Charles Péguy, de Charles de Gaulle le 25 août 1944 et le 12 novembre 1970. Notre-Dame, incendiée, meurtrie, dévastée, avait le visage d’Esmeralda, le visage de la France éternelle. 

Huit mois plus tard, l’enquête piétine toujours. Elle privilégie « la piste accidentelle ». Celle de l’intention criminelle semble écartée. La toiture était en court de travaux. Court-circuit ? Mégot de cigarette oublié ? Manipulation malencontreuse d’un chalumeau ? En tout cas, l’alarme et la procédure d’alerte, pourtant régulièrement testées, n’ont pas fonctionné… Peut-être ne connaîtra-t-on jamais la cause de ce drame. Quant à en déterminer les responsabilités, mieux vaut ne pas y songer… 

Notre-Dame a survécu aux révolutions, aux guerres et aux pillages. Elle est sortie indemne des mains des pires psychopathes, des moments de chaos, de bouleversements et autres flambées de démence sanguinaire. 

Notre-Dame, diamant aux mille facettes dont chaque détail de pierre exhale un mystérieux rayonnement, joyeux architectural au charme surnaturel, bouleversant de finesse et de légèreté, est le produit le plus admirable d’un Moyen-Age méprisé qui fut aussi l’apogée de la splendeur française. 

Mais Notre-Dame qui a résisté aux pires épreuves de l’histoire, est tombée sur la médiocrité de notre époque : quel niveau d’indifférence, de désinvolture, d’incompétence, et quel sommet d’accumulation de négligences a-t-il fallu atteindre pour que la toiture de Notre-Dame parte ainsi en fumée? Le 15 avril 2019, à travers cette emblématique tragédie, la France a touché le fond de l’abîme. 

Pire. Notre époque aurait-elle tiré humblement la leçon d’une calamité dont la responsabilité est évidemment collective ? Bien au contraire, les suites de l’incendie donnent lieu à un indigne psychodrame : querelles politiques et idéologiques sur les modalités de sa restauration, honteuses tentatives de récupérations politiciennes, lamentables promesses électoralistes et inconsidérées quant aux délais de la reconstruction.

La reine démagogie a encore frappée. Tout un symbole : il a fallu que l’obsession narcissique des plus hauts responsables politiques prévale sur le respect de huit-cents ans d’histoire. Mais d’ailleurs que savent-t-il de l’histoire, ces fanatiques de l’ego et de la table rase qui ont vu dans l’incendie de Notre-Dame une opportunité à saisir pour fanfaronner bien davantage qu’une tragédie nationale ?

Sur le plan individuel comme sur celui des peuples, les moments les plus dramatiques ou toute espérance semble se dérober, à l’image de cet immense traumatisme, annoncent souvent un rebond et les réussites les plus inattendues. Quand donc résonnera le bourdon de Notre-Dame et quand donc la France verra-t-elle le bout du tunnel? 

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