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"Samia" de Gilbert Ponté : dernière course pour Lampedusa, haletant et poignant
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Atlanti Culture

Rodolphe  de Saint Hilaire pour Culture-Tops

Rodolphe de Saint Hilaire pour Culture-Tops

Rodolphe de Saint Hilaire est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).

Voir la bio »

"Samia" 

De Gilbert Ponté 

Mise en scène : Steve Suissa
Avec Malyka R. Johany

INFOS & RÉSERVATION
La Scène Libre
4 Bd de Strasbourg
75010 Paris
Tél. : 01 42 38 97 14
http://www.le-theatrelibre.fr
Du mardi au samedi à 21h

RECOMMANDATION
Bon


THÈME
Samia,  c'était le prénom d'une jeune fille de Somalie, Samia Yuzuf Omar, espoir contrarié de l'athlétisme, morte à 21 ans de la plus odieuse des façons victime à la fois de sa passion, de la cruauté de ses bourreaux révolutionnaires, et de l'indifférence coupable internationale. Courir,  encore courir c'était la passion de Samia. A 16 ans, à la mort de son père, tué dans la rue devant chez elle à Mogadiscio, Samia est contrainte d'arrêter sa scolarité pour aider sa mère qui tient une petite épicerie et s'occuper de ses cinq frères et sœurs ; heureusement, elle a une passion, elle court, court, enchaîne les 100, 200 mètres sur les pistes de sable rouge et s'entraîne comme une forcenée à tel point qu'elle est sélectionnée pour représenter son pays aux Jeux Olympiques de Pékin.

Elle n'ira pas plus loin que les éliminatoires mais, peu importe,  elle a la course dans le sang ... et vise, en rêve éveillé, les JO de Londres. Hélas, le retour à Mogadiscio est rude. La révolution est passé par là. Indifférence au mieux, voire mépris, menaces enfin. Danger, il y a danger de mort. Les forces de l'obscurantisme religieux l'obligent à abandonner... et la Fédération d'athlétisme feint de l'ignorer maintenant. C'est une femme ! Elle n'a pas le droit ! Alors, pour pouvoir s'entraîner, il faut partir, le salut, pense- t- elle, est à Londres, elle doit  traverser l'Afrique jusqu'aux côtes libyennes, fuir jusqu'à trouver la mort... Retrouvée dans le coma par un garde côte italien, au large de Lampedusa, elle était enceinte de 4 mois.

POINTS FORTS
- L'émotion qui nous étreint à l'évocation de cette histoire vraie qui fait écho aux drames vécus par les populations de ce pays, vouées à l'anarchie et à la terreur, les barbaries perpétrées par ces diables, véritables fous de Dieu, que même les commandos américains n'ont pas réussi à éradiquer... et les solutions extrêmes  auxquelles elles sont réduites. Fuir, fuir à tout prix. mais jusqu'où... L'espoir fait vivre, dit-on !

- Le talent, la présence, la personnalité de l'interprète, Malyka Johany, qui, véritablement, "fait corps "avec l'héroïne qu'elle interprète. Elle court sur scène, joyeuse, enthousiaste...  elle chante aussi le blues de son peuple et de sa condition (chanteuse professionnelle, elle enregistre en major pour la Warner à 20 ans...) 

- La mise scène qui marie avec bonheur les effets vidéo avec ambiance des stades, beauté des courses sur les pistes et la gestuelle sur scène de l'interprète. Quelle belle harmonie !

- Le choix du ton de la narration qui ajoute à l'émotion naturelle du sujet et renforce le vécu de l'événement en symbiose avec les images.

POINTS FAIBLES
L'interprète est presque trop jolie, trop belle, trop dynamique, pour nous faire partager son drame à 100%, une faiblesse toute relative.

EN DEUX MOTS
Coup de cœur pour cette "seule en scène" à la fois poignante et rafraîchissante.  Samia, comme son prénom l'indique en Arabe, est admirable tout simplement, sur les planches comme dans sa vraie, et courte, vie. Une leçon de courage, de pudeur et d'élégance.

UN EXTRAIT
"C'était une expérience merveilleuse de défiler sous les couleurs de mon pays, la Somalie, et aux côtés des plus grands athlètes du monde. Un moment magique. Je me suis sentie importante."  (Samia , au retour des JO de Pékin).

L'AUTEUR
Gilbert Ponté a été formé à l'Ecole de la rue Blanche (ENSATT). Auteur atypique et "passeur d'histoire" depuis les années 80, il a plusieurs cordes à son arc : acteur, (excellent) conteur, metteur en scène, il se spécialise peu à peu dans les seuls en scène. Il se fait remarquer  avec une adaptation de "Georges Dandin" en 2007. Plus tard, création de "La Ferme des amoureux" de Georges Orwell, et de "La Dernière mort de Molière" ; il joue dans "Francesco" de Dario Fo, prix Nobel de littérature 97 (2011), "Souviens toi du futur " (2013), "Chrysalide" (2015). En 2019,  mise en scène de "l'Homme révolté" de Heinrich Von Kleist et création de "Samia , de Pékin à Lampedusa " 

A propos de Samia Yusuf Omar, il écrit : "Je suis toujours fasciné par les personnages qui portent en eux une passion, de Saint François d'Assises à Georges Méliès en passant par mes parents immigrés ; malgré la misère, la faim, les déboires, ils avancent debout, bien droits face à la vie qui leur est offerte. L'histoire de Samia, il me semblait que je la connaissais depuis toujours, que je l'avais déjà vécue. Impossible de comprendre l'histoire de l'immigration si on ne l'a pas vécue, impossible de comprendre ce besoin de fuir un pays pour survivre au  risque de mourir."

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