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"Alto Braco" de Vanessa Bamberger : à ciel ouvert sur l'immensité
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Paul Beuzebosc pour Culture-Tops

Paul Beuzebosc pour Culture-Tops

Paul Beuzebosc est chroniqueur pour Culture-Tops. Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).

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LIVRE

Alto Braco

de Vanessa Bamberger

Editions Liana Lévi


RECOMMANDATION
         EXCELLENT


THÈME

Sous une couverture d’un rouge fané, entre sang et ocre, je sens qu’une histoire m’attend. Celle de deux femmes, sœurs de toute une vie, dont la photo a été retrouvée dans un médaillon par la narratrice. L’histoire d’un lieu, l’Aubrac, Alto Braco en langue occitane, plateau mythique situé dans un quelque part à la croisée du Cantal, de la Lozère et de l’Aveyron, contrées où géographie et histoire font « causse commun » depuis la nuit des temps. L’histoire d’existences déracinées de leur terroir, de leur lourd passé, réfugiées dans l’exil et le travail de ces générations d’auvergnats montés à la capitale abreuver, nourrir et chauffer ce Paris des faubourgs et des gares. Au prix de l’oubli, de retours épisodiques dans leur mystérieux pays battu par le soleil, le vent et la brume. Sur ce vaste plateau, l’élevage façonne le somptueux paysage et permet la survie économique.

POINTS FORTS

Blonde et parisienne à la ville, Brune ne prend pas son histoire personnelle à la légère. Au moment de la mort de Douce, sa grand-mère qui l’a élevée avec Granita, sa grand-tante, deux femmes unies comme une main droite à sa main gauche, la narratrice revient à la rencontre de son pays. Elle parcourt ses souvenirs d’enfance, pélerine entre des lieux en conflit et enquête sur ses origines. Elle veut parler aux êtres et aux choses qui, sans qu’elle le sache, l’ont ramenée là vers des retrouvailles avec des inconnus, son père, sa famille, ces éleveurs héritiers des moines défricheurs qui maintiennent ce pays minéral à ciel ouvert sur l’immensité. 

Dans cette quête, l’auteur, écartelée entre les lumières et les tentations de la ville, la soif de comprendre et le trouble de n’avoir personne à qui transmettre, finit par l’admettre :  les mondes anciens n’obéissent pas aux à priori, aux convictions alimentaires, aux projets de développement séducteurs mais mal nés. A la campagne, l’espace, le temps, la mémoire et la fatigue des longues jours de labeur ont leur mot à dire. 

La narratrice a « respiré parfum du renouveau » mais ne fera pas souche, vendra l’essentiel de ses terres et la brasserie familiale et fera revenir, après leur mort, ses aïeules près d’elle, à portée de domicile.

Malgré la difficulté de peindre ce pays avec de seuls mots, ce pèlerinage aux sources de la tradition puise dans une belle langue pour éclairer les ombres et dessiner le secret des paysages de l’Aubrac et des vies cachées qui l’habitent.  

POINTS FAIBLES

Le roman se termine mal ; un récit aurait heureusement conclu cette histoire de famille : rester. C’est un choix respectable mais le lecteur finit par envier ceux qui sont issus de ce monde à part.

EN DEUX MOTS 

Sur l’Aubrac, le silence respire. Ce monde pourrait vivre tout seul mais ce serait dommage. Ses lieux à la force animale fascinent et retiennent les hommes, fiers, âpres, mystérieux. Et ceux qui s’en vont exportent les fortes saveurs d’un terroir unique qui maintient ailleurs, en ville, le goût des produits authentiques et des choses vraies, même enfouies dans les secrets. Beaucoup de chemins doivent mener à l’Aubrac, cela donne des idées. Un jour sans doute…

UN EXTRAIT

Ou plutôt cinq:


"Et dans ces traits un peu de leur Aubrac natal car Douce Rigal avait emporté son pays sur son visage".

"Il me semblait que le sentiment d’appartenance n’était qu’une construction de l’esprit, une histoire que l’on se raconte à soi-même."

"Les choses les plus étranges restent naturelles tant qu’on en a pas connu d’autres." 

"L’herbe s’y changeait en mer, la pluie en lumière."

"Je n’appartenais pas à une terre, mais à une histoire, dont je devrais connaître le début pour en écrire la fin."

L’AUTEUR

Vanessa Bamberger, née en 1972, habite à Paris. Après des études à Sciences Po, elle a vécu plusieurs années à Londres et à New-York. Elle est aujourd'hui journaliste. Son premier roman, "Principe et suspension", racontait l’histoire d'un patron de PME dont l'usine, malgré tous ses efforts pour défendre ses salariés, menace de faire faillite entraînant son couple avec. Alto Braco est son deuxième livre.

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