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Sur les 40 dernières années les pays de l'OCDE ayant un faible endettement sont aussi les moins sensibles aux crises
©TIZIANA FABI / AFP

Résilience

Une étude publiée par la Brookings Institution met en lumière l'importance pour un pays de maintenir des finances publiques saines.

Nadia Gharbi

Nadia Gharbi

Nadia Gharbi, économiste Europe chez Pictet Wealth Management depuis 2012. Avant de rejoindre Pictet, elle a été assistante en économie politique à l’université de Genève. Elle a obtenu une maitrise universitaire en sciences économiques, mention économie financière et monétaire, de l’université de Genève en 2011.

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Atlantico : Un graphique tiré d'une étude de la Brookings Institution, un think tank américain met en évidence le rapport entre la capacité fiscale des Etats à répondre en cas de crise en fonction de l'endettement. Quel est l'intérêt de cette mise en lumière ?

Nadia Gharbi : Selon cette étude, les pays de l’OCDE, sur la période 1980-2017,ayant un faible ratio de dette sur PIB ont réagi aux difficultés financières avec une politique fiscale beaucoup plus expansionniste et ont ainsi moins souffert des effets de la crise. En d’autres termes, plus un pays commence une période de crise avec une marge de manœuvre fiscale élevée, plus le pays aura la capacité de prendre des mesuresagressives afin de compenser les effets négatifs de la crise. La relation entre le ratio d’endettement et la réponse politique n’est pas seulement dictée par des problèmes d’accès au marché souverain, mais aussi par les choix des décideurs nationaux et internationaux.En épluchant les comptes rendus du processus d’élaboration des politiques fiscales en période de crise, les deux auteurs ont découvert que dans un certain nombre de cas les changements vers une politique d’austérité ont été motivéspar les choix des décideurs politiques tout autant que par des problèmes d’accès aux marchés. Bien que certaines conclusions de cette étude ne soient pas nouvelles, elle a le mérite de quantifier l’impact des politiques budgétaires sur le PIB en fonction de la marge de manœuvre fiscale d’un pays. De plus, elle remet l’accent sur l’importance pour un pays de maintenir des finances publiques saines.En Europe, c’est la situation en Italie qui cristallise toute l’attention. 

Ce graphique permet-il de comprendre la situation italienne ? Par opposition, la France est-t-elle dans une situation similaire ?

La dette publique italienne a atteint 132.2% du PIB en 2018 et pourrait augmenter à 133.7% cette année selon les dernières prévisions de la Commission européenne. Le déficits’est établi à 2.1% du PIB en 2018 et pourrait atteindre 2.5% en 2019. Mais plus que le niveau de dette ou de déficit, c’est la direction prise par ces variables qui inquiète. 
L’Italie est censé réduire son déficit structurel (déficit hors éléments exceptionnels et impact du cycle économique)de 0,6 point de pourcentage par an jusqu’au retour à l’équilibre. En décembre dernier, après des mois de discussions, Bruxelles et Rome avaient abouti à un compromis autorisant le pays à ne pas réduire son déficit structurel. Ce compromis était fondé surl’hypothèse que la politique économique de la coalition alliantle Mouvement 5 étoiles (M5S), dirigé par Luigi Di Maio, et la Ligue, dirigée par Matteo Salvini, allait stimuler la croissance de l’économie. Cette hypothèse est aujourd’hui caduque. Nous tablons sur une croissance du PIB italien de 0.3% en 2019, nettement inférieur au chiffre de 1.0% présenté par le gouvernement. De plus, ce dernier s’est engagé à activerla «clause de sauvegarde» qui prend la forme d’un relèvement des taux de TVA en 2020 (de 22% à 25.2%) et en 2021(à 26.5%), sauf si23 milliards de recette en 2020 et 28 milliards en 2021 sont trouvés.Le gouvernement italien a d’ores et déjà mentionné à plusieurs reprises qu’il ne procéderait pas à la hausse de la TVA requise pour satisfaire les objectifs de déficit. D’après les estimations de la Commission européenne sans cette mesurele déficit pourrait atteindre 3.5% en 2020.
SiRome ne ramène pas ses finances publiques sur le chemin du redressement, le pays risque l’ouverture d’une procédure pour déficit excessif. Cette procédure peut en théorie se solder par une amende représentant 0,2 % du PIB du pays visé (environ 3,5 milliards d’euros dans le cas italien). Toutefois, malgré les nombreuses déviations, une telle amende n’a jamais été infligée.Dans une lettre envoyée le 29 mai, la Commission européenne a officiellement demandé, au gouvernement italien de s’expliquer sur les causes de la détérioration des finances publiques du pays.Dans ce contexte, le bras de fer entre Rome et Bruxelles s’annonce tendu et devrait à nouveau agiter les marchés souverains. Jusqu’à présent la contagion à d’autres pays est restée relativement limitée. 
La situation en France n’est pas comparable. Les mesures prises par le gouvernement Macron n’ont pasles mêmes effets sur les finances publiques et la croissance. De plus, la croissance potentielle en France est plus élevée qu’en Italie. Ce dernier point est clé pour la gestion de la dette sur le long terme.

Face aux problèmes et risques que vous évoquez, existe-t-il des mesures concrètes et rapides que l'Italie pourrait mettre en place pour se sauver de cette situation ? 

La situation politique italienne complique la prise de mesures concrètes et rapides. Les élections européennes ont renforcé la position de Salvini, augmentant l’instabilité politique.Jusqu’à présent les mesures prises par la coalition ontvisé à stimuler la croissance de court terme au détriment de la croissance de long terme. Or c’est cette dernière qui est clé pour la gestion de la dette. Sans cela, les finances publiques italiennes resteront le maillon faible de l’Europe. 

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