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Derrières les ors et les artifices, pourquoi le Qatar est toujours un dangereux émirat moyenâgeux
©KARIM JAAFAR / AFP

Tribune

"C’est mon devoir de partager ma difficile expérience pour éclairer les français sur ce qu’est vraiment ce pays : un régime autoritaire, expansionniste et irrespectueux de l’état de droit. "

Le Qatar est entré dans l’imaginaire collectif français en 2011, année à laquelle le PSG est racheté par un des plus riches fonds souverains du monde : la Qatar Investment Authority. Un coup de projecteur est alors jeté sur ce petit Emirat, devenu le pays le plus riche du monde grâce à la découverte d’un immense champ gazier partagé avec l’Iran.  

Mais que connaissent vraiment les français de ce pays ? Ils savent qu’il s’apprête à organiser la coupe du monde 2022. Ils savent qu’il attire les plus grands joueurs de la planète footballistique dans la capitale à coups de pétrodollars. Avec des résultats plutôt mitigés, n’en déplaisent à certains. Peut-être savent-ils aussi que le Qatar a récemment ouvert un musée national dans la capitale Doha, une véritable prouesse architecturale signée Jean Nouvel. Son inauguration a en effet été bien accueillie par les médias, et a même fait venir… Edouard Philippe en terre Qatarienne. Enfin, d’autres connaissent sans doute AJ+, ce média produisant de courtes vidéos d’informations qui, sous couvert d’embrasser les causes les plus progressistes, n’est autre qu’une antenne d’Al Jazeera, instrument de propagande Qatarien. 

Mais ne nous y trompons pas, ne laissons pas le Qatar gagner la bataille des relations publiques ! Ce riche Emirat n’est autre qu’un reliquat des systèmes féodales moyenâgeux, où l’opulence côtoie la misère sans la regarder, où l’esclavage moderne subsiste et où une richissime famille tient le pouvoir d’une main de fer.  

Le système de kafala, qui oblige un travailleur étranger à avoir un « sponsor » local qui a tout pouvoir sur lui, jusqu’à la possession de son passeport, est un absurde et archaïque système de servage. Celui-ci m’a fait passer du statut d’entrepreneur à succès à celui de hors-la-loi.  Du jour au lendemain, mon sponsor, qui n’était autre qu’un membre de la famille régnante al-Thani, m’a fait hors-la-loi pour avoir refusé de lui léguer les parts de la société que j’avais moi-même créée. Du jour au lendemain, mes comptes en banque étaient fermés et on me condamnait à un nombre indéfini d’années de prison pour m’être rendu coupable d’avoir signé des chèques sans provision, dans ce qui n’était rien d’autre qu’une parodie de procès.  

J’ai donc passé quatre ans et neuf mois dans une prison qatarienne, 1744 jours plongé dans l’enfer, et pire, dans l’incertitude. Incertitude quant à mon sort, quant à ma date de sortie. Et ce dans l’indifférence la plus totale de la part de la France, ma patrie, dont le corps diplomatique a pourtant comme devoir de protéger les ressortissants français.  

Mon expérience reste aujourd’hui inconnue à la plupart de mes concitoyens. Mais comment expliquer que cette situation, aussi terrible qu’ubuesque, n’ait pas entrainé un véritable tollé médiatique ? Comment expliquer qu’aucun politique ne se soit emparé de mon cas ? Il faut croire que des intérêts étatiques économiques, stratégiques et financiers ont primé sur mon sort.  

La France entretient en effet une relation de grande proximité avec le petit Emirat. Une loi exonère même les qatariens résidants chez nous d’impôts sur les plus-values immobilières et les gains de capital. Ce n’est qu’un exemple parmi la multitude de cadeaux accordés à ce pays richissime. Pour attirer des capitaux dans l’économie française, notre pays a, depuis quelques années, abandonné peu à peu sa souveraineté et son autonomie. Il se retrouve aujourd’hui prisonnier d’une alliance dangereuse.  

Il y a quelques semaines sortait Qatar Papers, livre d’investigation co-écrit par les journalistes George Malbrunot et Christian Chesnot sur les réseaux d’influence qatariens dans l’islam de France. Celui-ci montre comment l’ONG Qatar Foundation cherche à infuser, via le financement de nombreux projets de centres culturels ou de mosquées, une culture musulmane entriste contraire aux valeurs républicaines de notre pays. Et que dire de toutes les voix qui accusent le Qatar de financer le terrorisme, aussi bien chiite que sunnite ? Il nous faut lutter contre cet expansionnisme nocif. A ces égards, gageons que les annonces récentes du Président Macron sur les financements étrangers soient suivis d’actions concrètes.  

Nous devons mesurer le danger que représente un régime comme le Qatar, qui cache ses mauvaises intentions par une communication et un soft power extrêmement léchés. Et c’est mon devoir de partager ma difficile expérience pour éclairer les français sur ce qu’est vraiment ce pays : un régime autoritaire, expansionniste et irrespectueux de l’état de droit. Un régime capable de faire emprisonner arbitrairement d’honnêtes gens. Car je ne suis qu’un parmi tant d’autres.

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