Fenêtre de tir : quelle place pour les oppositions après l’atterrissage du Grand débat ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
 Fenêtre de tir : quelle place pour les oppositions après l’atterrissage du Grand débat ?
©CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Marche à suivre

Maintenant que le Grand débat national a pris fin, quel rôle peuvent encore jouer les oppositions face à la machine En Marche ?

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet est essayiste et auteur de nombreux ouvrages historiques, dont Histoire des présidents de la République Perrin 2013, et  André Tardieu, l'Incompris, Perrin 2019. 

Voir la bio »

Atlantico : Maintenant que le Grand débat national est terminé et que les annonces des mesures à venir ont été faites, une question demeure : comment l'opposition va-t-elle pouvoir peser dans les négociations selon vous ? 

Maxime Tandonnet : Il est difficile de parler de l’opposition, car il y en a plusieurs : le courant lepéniste, les Républicains, la gauche aujourd’hui morcelée. C’est vrai que les mesures annoncées à la suite du Grand Débat peuvent s’interpréter comme enlevant aux oppositions certains arguments : la baisse de l’impôt sur le revenu, l’amélioration des petites retraites… Voire même la suppression de l’Ena, un vieux fantasme d’une partie de la classe politique en mal de boucs émissaires. Pourtant, il n’est pas sûr que cela change grand-chose. L’image d’un responsable politique dans l’opinion est comme un paquebot dont il est très difficile de faire dévier la route. Le quinquennat Macron est perçu par une grande masse de Français comme inéquitable sinon injuste. Ces mesures n’y changeront pas grand-chose. D’ailleurs, malgré trois mois d’omniprésence médiatique sur le thème du Grand Débat, la cote de l’occupant de l’Elysée, semble de nouveau en recul (sondage Figaro magazine). La vérité, c’est que les gens n’y croient plus. La crise de confiance est profonde, irréversible avec les équipes actuelles.

Sur quels thèmes l'opposition peut-elle miser qui auraient été oubliés du Grand débat ?

Il n’y a pas de réponse unique dès lors que l’opposition est écartelée en trois courants au moins. On peut imaginer que le mouvement lepéniste continuera à faire de « l’Europe » son bouc émissaire favori, ce qui évite d’avoir à se poser les vraies causes du mal français. Les partis de gauche vont poursuivre leur lutte fratricide et course à l’utopie (créer un statut de « réfugié climatique »). Une opposition responsable devrait bien au contraire s’interroger sur les questions auxquelles le Grand Débat n’a pas répondu. Ce sont les sujets fondamentaux qui portent sur des décennies de malaise et l’invraisemblable impasse ou se trouve aujourd’hui le pays. Les mesures ponctuelles sont sans aucun rapport avec la gravité des enjeux : l’impuissance publique et l’incapacité de l’Etat à combattre efficacement le chômage, l’insécurité, la pauvreté, la violence, le communautarisme, la désindustrialisation, à maîtriser les frontières, la crise de l’éducation nationale et le déclin intellectuel du pays. Pire : la crise de l’autorité et l’incapacité nouvelle de l’Etat à assurer l’ordre public, enfin la fracture démocratique entre la classe dirigeante et le pays qui ne cesse de s’amplifier.

Au final la marge de manœuvre de l'opposition est-elle si grande que cela ? 

Oui, elle est considérable, mais à condition d’ouvrir les yeux... D’où vient le malaise français ? Accuser Bruxelles de tous les maux est mensonger car les autres pays confrontés aux mêmes contraintes européennes ne connaissent pas un effondrement comparable. La cause majeure de la crise française est politique, elle vient du sommet, de la tête. Avec son régime présidentialiste, la France a substitué une idole élyséenne à la notion d’intérêt général. Bref, la politique consiste désormais à adorer ou à lyncher une créature totémique, plutôt que de mobiliser les énergies, travailler au bien de la nation sur le long terme et préparer son avenir. L’image présidentielle (en vue de la réélection), devient le but en soi de toute politique, au détriment du bien commun. Il faut donc commencer par une modification radicale du régime politique français : revenir au septennat, rendu non renouvelable, renouer avec un véritable Gouvernement et un Parlement souverain, faciliter le referendum pour combattre la fracture démocratique. Pour l’instant, aucune opposition n’a compris cela et rien ne permet d’espérer cette prise de conscience. La France marche au chaos dans l’aveuglement général.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !