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Cet alignement de planètes qui déterminera la suite de 2019 pour Emmanuel Macron
©LUDOVIC MARIN / AFP

Prévisions

Crise sociale, cote de popularité en berne, affaire Benalla 2, croissance économique revue à la baisse : l’année 2019 commence avec un alignement des planètes particulièrement délicat pour l’exécutif. Comment tirer profit de cette année qui s’annonce clé pour l’exécutif (et pour la France !) et rebondir vers la série électorale lourde jusqu’en 2022 ?

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Un climat de défiance rarement connu sous la Vème République s’est installé depuis quelques mois : outre les effigies d’Emmanuel Macron décapité, la métaphore filée entre Brigitte et Marie-Antoinette et les témoignages se multipliant d’élus LREM insultés ou menacés, on assiste à un véritable raz-de-marée de haine qui témoigne d’une rupture forte entre les promesses d’un  « nouveau monde », annoncées il y a à peine 18 mois, et une partie de la population.
Au-delà de la partie la plus « radicalisée » des contestataires, représentant au final, d’un point de vue quantitatif, une portion congrue de la population, une défiance plus générale s’est installée au sein de l’opinion.


Premier élément marquant : une cote de popularité en forte baisse


La tendance est connue, rabâchée et largement commentée ces dernières semaines : le Président de la République et le Premier Ministre connaissent un effondrement majeur de leur côte de popularité respective. Depuis décembre 2017, où le premier pouvait encore se prévaloir d’une opinion majoritairement favorable (52% d’opinions favorables selon le baromètre Ifop/JDD), celle-ci n’a fait que chuter pour atteindre désormais un score, oscillant entre 20% et 25% selon les différents instituts . Il se situe désormais à un niveau comparable à celui de son prédécesseur et bien en-deçà de ce qui était mesuré pour Nicolas Sarkozy à même époque.

L’analyse détaillée de ces résultats révèle que seuls les cadres et professions intellectuelles supérieures apportent une poche de résistance avec 41% d’opinion favorable, quand les employés ou les ouvriers affichent une défiance jaugée entre 80% et 85%.
Cet écart marqué entre ces catégories de population se reflète d’ailleurs au travers du soutien au mouvement des gilets jaunes et avait déjà été souligné lors d’un article précédent.
Désormais, la frange de la population au revenu net mensuel supérieur ou égal à 3500€, est majoritairement favorable à un arrêt du mouvement (61% contre 38% qui souhaitent qu’il se poursuive). 

Derrière la côte de popularité, une capacité à affronter les « principaux problèmes qui se posent au pays » largement remise en cause.


La vague de décembre du baromètre Elabe met en avant une baisse continue du niveau de confiance inspiré par le Président de la République et son Premier Ministre. En un an, la part des Français déclarant ne pas faire « confiance du tout »  au chef de l’Etat, a progressé de 31 points (de 20% en janvier 2018 à 51% en décembre 2018).

Même parmi son électorat, ils ne sont plus que 59% à lui faire confiance. Chez les cadres et professions intellectuelles supérieures, 61% font état de leur défiance à l’égard du Président de la République.
Le Chef de l’état et le Chef du gouvernement sont désormais au même niveau que leur prédécesseur du quinquennat précédent à la même période.

2019 : une année qui s’annonce compliquée sur le plan économique


Une année 2018 décevante


Alors que le Gouvernement pouvait s’appuyer sur une année 2017 exceptionnelle en termes de croissance économique (2,2%, soit le plus haut niveau depuis 2007) et donc de revenus fiscaux, l’année 2019 nous promet une autre paire de manches…
Tout d’abord la croissance économique devrait finir l'année 2018 en hausse de seulement 1,5% et celle de 2019 se montrera, assurément, encore plus faible. La dernière prévision de la Banque de France pour 2019 à 1.5% paraît en effet trop optimiste.

Une crise financière en gestation et une croissance à venir en forte baisse


Depuis fin 2017, nous assistons à une synchronisation des croissances économiques des différents pays, malheureusement à la baisse, avec comme paysage de fond un resserrement de la politique monétaire aux Etats-Unis et des risques sur le commerce sino-américain. Les prévisions de croissance aux Etats-Unis, après un emballement majeur résultant de l’élection de Donald Trump, tant au niveau des marchés financiers que du marché de l’emploi, sont désormais orientées à la baisse avec « seulement » 2.3% annoncés pour 2019 selon la Fed.
Le premier effet direct de la montée de ces incertitudes s’est reflété sur les cours des bourses mondiales, qui pour la plupart, ont fortement chuté en 2018. La bourse de Shanghai a ainsi perdu plus de 25% (2400 milliards de dollars sont partis en fumée), en dépit d’une croissance de 6.2% en Chine en 2018. 
La baisse s’est alors propagée un peu partout : l'indice Dow Jones recule de 6,7% sur la même période, l'EuroStoxx 50 de 14,7% (le Dax en Allemagne a perdu 18%) et à Tokyo, le Nikkei cède 12%. Souvent, il s’est agi de la pire année depuis une décennie et cela devrait continuer en 2019. 

L’économie américaine semble en haut de cycle : le marché du travail affiche des statistiques inconnues depuis un demi-siècle, la confiance des consommateurs était au plus haut mais désormais l’euphorie engendrée par le programme de Donald Trumpne peut que retomber. Un des premiers signes avant-coureur a été la forte chute des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) dont certains ont perdu plus de 20% en un mois et demi, ce qui a représenté une perte de 713 milliards de dollars. En terme de volume, c’est comme si le CAC40 avait perdu 42% de la totalité de sa valeur en 50 jours. 
Avec les possibles conséquences de la guerre commerciale sino-américaine, les anticipations de relèvement des taux de la FED représentent l’angoisse majeure. Les déclarations de Jerome Powell, Président de la FED, sont désormais scrutées et voient les marchés surréagir. Face aux réactions de chacune de ses interventions, il a même dû à nouveau rassurer les milieux d’affaires en s’engageant à faire preuve de « patience » dans la conduite de sa politique monétaire. Sa position est ainsi devenue tellement centrale pour la suite des événements économiques que des rumeurs ont circulé sur une possible demande de démission de la part de Donald Trump, hypothèse exclue par les différentes parties prenantes.
Dans un scénario noir, la remontée des taux américains à long terme accentuera les pertes boursières et pénalisera fortement le marché immobilier américain (le taux des crédits immobiliers à 30 ans, la durée d'emprunt la plus répandue outre-Atlantique, est repassé au-dessus de la barre des 5%, son plus haut niveau depuis 2011). 
La contagion se fera par conséquent sentir en Europe à la fin de l’année.

Pas de croissance => pas de marge de manœuvre budgétaire => pas de marge de manœuvre politique


Dans ce contexte, la croissance annoncée il y a encore peu autour de 1.7% est désormais vue à 1.5% par l’Insee et sera certainement nettement en-dessous en cas de difficultés boursières et des risques subséquents cités précédemment. Philippe Waechter, directeur de la recherche économique chez OstrumAsset Management, prévoit par exemple une croissance à 1,2%. La dette publique de la France se rapproche, elle, à nouveau du seuil symbolique de 100% du PIB. Le taux de chômage ne devrait ainsi baisser, dans le meilleur des cas, que faiblement, ce qui renforcera à nouveau la crise de résultats dont souffrent les dirigeants politiques.
On ne liste pas à côté toutes les hécatombes économiques susceptibles de se produire entre la remontée du prix de l’énergie annoncée en 2019 et la possible hausse des taux en raison de crise italienne qui alourdirait encore un peu plus le poids de la dette.
Dans ce contexte, « l’équation budgétaire » paraît bien difficile à résoudre et les marges de manœuvre, après les 10 milliards  débloqués  pour les Gilets Jaunes, réduisent encore un peu les possibilités d’action. Au milieu d’un planning 2019 chargé en termes de réformes (assurance chômage, retraites, institutions, fiscalité locale…) et armé, pour mener ses batailles, d’une popularité aussi faible que sa crédibilité à pouvoir les remporter, l’année s’annonce ainsi pour le moins complexe pour le Président de la République.

Quelles solutions ? Resserrer les rangs, donner un cap et… « avoir du bol »


A date, peu de solutions semblent se présenter à l’exécutif. 
1. Le levier du remaniement pourra toujours être activé après l’élection européenne qui sera certainement perdue pour le parti au pouvoir, mais aucune autre figure politique forte n’émerge et les rares « poids lourds » ou personnalités politiques appréciées des Français ont déjà quitté le navire (dont Nicolas Hulot était le symbole…).

Le classement Elabe des personnalités politiques met en lumière l’absence de solutions de rechange pour l’exécutif : seuls Jean-Yves le Drian (annoncé partant l’année prochaine par les observateurs... ) et Bruno le Maire parviennent à se hisser, avec respectivement  32%  et 23% d’image positive, parmi les 20 personnalités préférées des Français.
A la lecture du classement, les poids lourds potentiellement entrants ne sont pas légions : on imagine mal Alain Juppé ou Ségolène Royal faire leur retour, Xavier Bertrand lâcher sa région pour rallier un nouveau bord politique et on n’évoquera pas le cas de Marion Maréchal.


2. L’exécutif devra donc instaurer une meilleure discipline au sein de ses troupes, éviter les provocations sur ceux « qui fument des clopes et roulent au diesel » et idéalement sortir un ou deux coups, en débauchant une personnalité de la société civile capable d’incarner un  autre « nouveau monde ».


3. Parallèlement, le climat au sein de l’opinionsemble de plus en plus contestataire et la moindre brise suffit désormais pour rallumer les braises de la contestation sociale. Cet élément semble mettre en évidence ce qui peut apparaître comme le gros raté des premiers mois du quinquennat d’Emmanuel Macron : l’incapacité à fédérer au travers d’un destin national, la capacité à transcender la position sociale de chacun, dépasser son individualisme de classe vers un projet collectif, au travers d’un récit national. Le mouvement des gilets jaunesn’est qu’un symptôme de plus de l’atomisation individualiste de la société, à l’œuvre depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Dans cette optique, l’idée d’un débat national peut être une solution, nonobstant le fait que les membres du Gouvernement issus des Républicains y sont majoritairement opposés, ce qui invalide la 2ème condition de meilleure discipline. Mais quelles modalités d’organisation et quel avenir pour ces propositions, dès lors que le Gouvernement a d’ores et déjà indiqué qu’il ne changerait pas de cap, que la thématique relative à la Constitution aura du mal à passer du fait du blocage par le Sénat de toute réforme ambitieuse sur le sujet et que l’immigration, sujet initialement présenté comme la cinquième grande thématique, s’est finalement vu reléguée au rôle de sous-thème adossé au débat démocratique ?
En outre, le départ de cette initiative paraît d’ores et déjà ratée avec le départ de Chantal Jouanno dans une nouvelle polémique maladroite autour de sa rémunération.


4. La dernière condition renvoie au « bol » dont avait manqué François Hollande selon lui dans son projet d’inverser la courbe du chômage. Comme vu précédemment, une bonne partie des résultats économiques vont dépendre du pari de Donald Trump de remporter son rapport de force avec la Chine et de la mansuétude de Jerome Powell dans sa politique de restriction monétaire. Emmanuel Macron peut également croiser les doigts pour que l’Europe évite une crise italienne et une fin en « no deal » pour le Brexit.

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