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Et Angela Merkel souhaita à l’Allemagne le retour de sa volonté de puissance oubliée
©John MACDOUGALL / POOL / AFP

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Lors de son discours à ses concitoyens, la chancelière Angela Merkel a appelé à ce que l'Allemagne prenne ses responsabilités le monde.

Edouard Husson

Edouard Husson

Universitaire, Edouard Husson a dirigé ESCP Europe Business School de 2012 à 2014 puis a été vice-président de l’Université Paris Sciences & Lettres (PSL). Il est actuellement professeur à l’Institut Franco-Allemand d’Etudes Européennes (à l’Université de Cergy-Pontoise). Spécialiste de l’histoire de l’Allemagne et de l’Europe, il travaille en particulier sur la modernisation politique des sociétés depuis la Révolution française. Il est l’auteur d’ouvrages et de nombreux articles sur l’histoire de l’Allemagne depuis la Révolution française, l’histoire des mondialisations, l’histoire de la monnaie, l’histoire du nazisme et des autres violences de masse au XXème siècle  ou l’histoire des relations internationales et des conflits contemporains. Il écrit en ce moment une biographie de Benjamin Disraëli. 

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Atlantico : Dans son discours annuel du 31 décembre, des vœux à la nation, Angela Merkel a indiqué "dans notre propre intérêt nous devons prendre plus de responsabilités". Comment interpréter ce discours semblant se concentrer sur les "pressions" existantes entre Allemagne et Etats-Unis ? 

Edouard Husson : Le discours d'Angela Merkel avait quelque chose d'irréel. La Chancelière a bien dû concéder la difficulté des temps politiques. Elle a profondément divisé le pays et affaibli son parti par sa politique d'immigration non contrôlée et non choisie. Or hier nous avons eu droit essentiellement à des incantations à l'unité nationale, la liste de menaces ou défis internationaux puis l'affirmation que le pays allait être très actif au cours des deux ans où il va siéger au Conseil de sécurité.  Et une double tentative de défier les USA et de tendre la main à la Grande-Bretagne. 

En fait, comme toujours chez la Chancelière il faut chercher la tactique personnelle. Elle annonce qu'elle restera, qu'elle voudrait rester encore deux ans. Elle a l'intention de se concentrer sur un rôle international. Et elle sculpte son personnage pour l'histoire. J'écoutais hier soir une conversation entre électeurs fidèles de la CDU qui partageaient leur émotion devant le dévouement d'Angela, qui va assumer, disaient-ils, le choc des élections européennes pour qu'ensuite Annegret Kramp-Karrenbauer ait la tâche plus facile! 

Faut-il y voir une approche différente de la question européenne, et notamment de la France ? Qu'est ce que ces derniers mois peuvent nous indiquer de cette approche ? 

Je continue à croire à une grosse surprise d'Angela Merkel annonçant qu'elle prend la tête de la liste CDU/CSU aux européennes pour préparer une sortie par le haut, à la tête de la Commission. L'idée peut paraître absurde mais elle coïncide parfaitement avec le discours des voeux. Qui en Allemagne contesterait à la Chancelière un tel rôle? Beaucoup seraient soulagés pour l'Europe. Sérieusement! Il y a actuellement un silence gêné en Allemagne sur le résultat des prochaines élections européennes, envisagé comme catastrophique. Il y aurait une forme de dramatisation de l'enjeu. Des discours très hostiles dans beaucoup de pays mais qui du coup mobiliseraient les honnêtes gens: on ne peut pas laisser s'installer une telle germanophobie etc.....

Comment la France peut-elle se positionner par rapport à l'approche actuelle d'Angela Merkel ? 

Il est frappant de constater comme la Chancelière est restée abstraite sur les enjeux de solidarité européenne. Pas un mot de soutien au camarade Macron. Rien sur les enjeux économiques et monétaires européens. Le pays voisin est en ébullition, c'est le moins que l'on puisse dire, mais la Chancelière ne parle que de l'Allemagne et d'une solidarité internationale somme toute très éthérée. La question du prochain président de la Commission européenne est fondamentale. Celle du prochain président de la BCE aussi.  Voilà des questions dont il faudrait parler d'urgence avec Berlin. Et puis il y a un danger systémique qui est un secret de Polichinelle: la faillite, de fait, de la Deutsche Bank. De tout cela il serait normal de parler à huis clos, pour un discours de vérité entre dirigeants français et allemands.  Or ce qui se dessine, c'est plutôt l'aggravation du complexe d'infériorité, face au gouvernement allemand, d'un gouvernement français que la crise des Gilets Jaunes enferme, aux yeux de bien des hommes politiques allemands, dans l'image de la France éternelle indisciplinée. 

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