Dominique Bussereau et Anne-Marie Idrac sensibilisent les Franciliens à la nécessité d'intégrer des fruits et légumes à leur alimentation
©OLIVIER LABAN-MATTEI / AFP
Changer les mentalités
Le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) entend faire évoluer les messages sanitaires diffusés depuis une bonne dizaine d'années maintenant
"Manger 5 fruits ou légumes par jour, pratiquer une activité physique régulière"… Ces messages ont-ils eu un impact favorable sur les comportements alimentaires ?
Atlantico : "Manger 5 fruits ou légumes par jour, pratiquer une activité physique régulière"… Si ces phrases qui nous sont désormais familières peuvent aujourd'hui être jugés trop moralisatrices ou épuisées, peut-on affirmer que ces messages ont eu un impact favorable sur les comportements alimentaires ?
Jean-Daniel Lalau : Je crains qu’il ne soit impossible de répondre à la question. Quand on même une campagne de vaccination contre le papillomavirus, on dispose d’une évaluation fiable avec le comptage du nombre de cas de cancer du col de l’utérus avant/après ; mais s’agissant de l’alimentation, avec une incitation seulement, et qui plus est s’agissant du comportement le plus difficile à faire évoluer, à savoir le comportement alimentaire… Par contre l’impact sur le porte-monnaie serait observable si la recommandation était suivie d’effet. Un média radio vient en effet de rapporter un coût de 140 EUR pour un mois de consommation quotidienne de 5 fruits et légumes et pour une famille avec 2 enfants (et je ne parle pas du « bio » !).
Comment donner une nouvelle jeunesse à ces messages sanitaires selon vous ? Les pistes du HCSP vous semblent elles convaincantes ?
Je pense que l’on peut toujours faire mieux, que l’on doit faire mieux même : je ne vois en quoi la répétition à l’envi « 5 fruits & légumes »/« manger & bouger », ferait qu’un enfant qui n’aime pas les légumes devienne adepte. Il faut – à mon sens – utiliser les armes des lobbyistes ; il nous faudrait des Jacques Séguéla pour concevoir et diffuser des messages simples, percutants, et incitatifs. J’aime assez à ce sujet le « 0-5-30 » des Canadiens, pour : 0 tabac, 5 fruits & légumes et 30 minutes d’activité physique chaque jour. Et des messages incitatifs parce que « goûteux », à double titre : d’abord parce que le sujet, c’est bien le plaisir, le désir de manger ; ensuite parce qu’à force de normes, on peut parvenir à une saturation, voire à un effet contre-productif.
De quoi devrait s'accompagner ces messages pour assurer une lutte plus efficace (comme un contrôle ou une forme de restriction des actions de marketing alimentaire) ?
Vous donnez une grande partie de la réponse. Pour une mener une politique de promotion de la santé pertinente, il faut, effectivement, considérer les messages en eux-mêmes, leur nature, leurs « cibles », etc., et aussi, dans le même temps, sinon prioritairement, s’attaquer au lobbying délétère. Franchement, quel est le sens d’adosser le précepte « manger/bouger » au spot publicitaire d’une grande chaine de restauration rapide diffusé à la mi-temps dans une phase finale de coupe du monde en direction de millions et de millions de spectateurs ? Au mieux, c’est bête – de se défendre d’un bazooka avec un pistolet à bouchons – ; au pire, c’est très hypocrite. Il faut prendre le problème des légumes… à la racine : la politique de santé, ce devrait être de la politique, tout court. « Politique » de polis pour la ville et ce, … en faisant la police.
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