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Coup de filet anti-crack : pourquoi la drogue qui monte est une gangrène absolue
©SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Ravages de la drogue

La police a expulsé le 22 mai dernier plusieurs familles de dealers de crack dans le quartier de la cité Reverdy, dans le XIXe arrondissement de Paris. Cette plaque tournante, installée depuis 10 ans, rapportait près de 8 000 euros par jour. Un phénomène loin d'être maîtrisé car depuis plusieurs mois, la consommation de crack augmente de manière inquiétante.

David Weinberger

David Weinberger

David Weinberger est chercheur à l'Inhesj. Il est spécialisé dans les politiques publiques de lutte contre la drogue.

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Quel est l’état des lieux aujourd’hui de la consommation du crack ?  

David Weinberger : On a observé le retour de ce produit depuis plusieurs mois à Paris dans des proportions inquiétantes. Il est directement lié à la forte augmentation de la production et de la consommation de cocaïne, le crack étant un dérivé de la cocaïne poudre (le chlorhydrate) appelé cocaïne base. Sa consommation est encore plus addictive et plus violente dès les premières prises, ce qui explique qu’elle a augmenté pour atteindre 33% en 2017 de la consommation de cocaïne totale, contre 20 à 25 % en  2013.*

Comment expliquer ce retour du crack à des niveaux élevés de consommation ?

Les trafiquants de drogue inondent à la fois un marché de la cocaïne pour les classes aisées, et un marché issu de la pâte de coca, moins pure, moins chère et à destination des populations pauvres. Ce dérivé est venu sous forme de dose pour environ 3 à 5 euros et vise clairement des consommateurs déjà en rupture sociale et précarisés. Une fois dépendants au produit, leur journée consiste à faire des allers retours pour « faire la manche » et revenir racheter les doses. Les cartels ont une stratégie qui consiste à diversifier les marchés et à inonder l’Europe avec des produits extrêmement toxiques. Le crack est hautement addictif avec des effets dangereux pour le consommateur et pour la sécurité publique. Il engendre des états de violence et de délirium sur la voie publique, avec des comportements qui peuvent terroriser la population.  En Amérique du Sud, ce phénomène a pris une ampleur considérable avec « le paco » cinquante fois plus puis­sant que la cocaïne, qui détruit les neurones en quelques mois. Vendu 50 centimes d’euro la dose, il se fume comme du crack et fait des ravages en Uru­guay, en Colom­bie, au Brésil et encore plus en Ar­gen­tine.

A Paris, la RATP et la Mairie ont réussi à endiguer les problèmes causés par le marché du crack dans le métro et dans plusieurs quartiers. Comment s’assurer que ces opérations puissent être durables ?

Les autorités se sont effectivement saisies du problème, qui avait déjà existé dans les années 70 et 2000 avec l’héroïne. C’est par le travail quotidien des polices de quartier que ce problème peut être maîtrisé, et que l’on peut limiter tous les incidents dus aux au crack dans l’espace public. Mais il est indispensable que ces actions quotidiennes s’accompagnent d’une prise en charge médicale et sanitaire des consommateurs, car on ne fera que déplacer le problème ailleurs. Dès lors qu’ils ne peuvent se passer de cette drogue, il y aura toujours, forcément, des dealers pour leur en procurer. Il faut prendre en compte que cette addiction est une maladie sévère qui laisse ces populations dans une grande souffrance et dans une détresse physique et mentale.

* Selon une étude de l’ANSEM, une augmentation du nombre de décès directement en lien avec l’usage de cocaïne est observée à partir de 2014 (25 cas en 2010 et 44 cas en 2015).Une augmentation des signalements des cas graves est observée avec 47 cas en 2010 et 375 cas en 2016. De 2008 à 2014, un doublement du nombre d’hospitalisations en relation avec l’usage de cocaïne (2 560 en 2008 et 5 316 en 2016) a été constaté.Les complications les plus fréquentes sont des complications psychiatriques (35 %), cardio-vasculaires (30 %) et neurologiques (27 %). Des complications infectieuses (12 %), des complications touchant le système respiratoire (8 %) et ORL (3 %) sont également rapportées.

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