Exode fiscal : Paris Londres aller simple...! Après les riches, ce sont les entrepreneurs qui partent<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Exode fiscal : Paris Londres aller simple...! Après les riches, ce sont les entrepreneurs qui partent
©

La plus belle ville du monde ?

Les plus riches fuient vers des horizons plus favorables en matière fiscale. Pour ceux qui en ont les moyens, mieux vaut vivre à Londres qu'à Paris. Pourtant, les exilés fiscaux ne sont pas les seuls à préférer la capitale britannique : ceux qui veulent entreprendre et créer les rejoignent de plus en plus.

Jean-Philippe Delsol

Jean-Philippe Delsol

Jean-Philippe Delsol est avocat, essayiste et président de l’IREF, l'Institut de Recherches Economiques et Fiscale. Il est l'auteur de Civilisation et libre arbitre, (Desclée de Brouwer, 2022).

Voir la bio »

Pourquoi de plus en plus de français partent à l’étranger et principalement vers les pays les plus libéraux ? Les Français domiciliés à l’étranger, qui pourront élire désormais et pour la première fois 11 députés, étaient 1 339 302 à être inscrits sur les listes auprès des ambassades ou consulat en 2006. Ils sont passés à 1 471 622 en 2010. Les pays ayant adopté une véritable économie de marché sont les plus attractifs. En 2008 on recensait 139 349 Français en Suisse, 117 076 aux USA et 112 660 au Royaume Uni. Mais ces chiffres ne sont qu’une partie de la réalité parce que beaucoup de ces Français ne se déclarent pas auprès des autorités françaises. Ils n’en ont pas l’obligation. Il y aurait à Londres environ 400 000 Français alors qu’il n’y aurait à Paris que quelques dizaines de milliers d’Anglais. Pourquoi ?

Il y a bien sur les plus riches qui partent pour trouver des cieux fiscaux plus cléments :

  • En Angleterre, le système de la « remittance basis » permet à un Français qui s’expatrie sans décider de vivre définitivement dans ce pays de ne payer ses impôts anglais que sur les sommes gagnées ou rapatriées au Royaume Uni. Certes, ceux qui ont résidé pendant 7 ans au cours des 9 dernières années avaient à payer un impôt minimum de 30 000 £ par an, somme portée à 50 000 par an à partir de l’exercice 2012/2013 pour ceux qui auront été résidents pendant 12 des dernières 14 années. Mais outre que cette « charge » minimale est bien modeste, les revenus impatriés depuis l’étranger pour être investis dans des sociétés non cotée ou toute autre activité industrielle ou commerciale restent non imposables au Royaume Uni.
  • En Suisse, le système du forfait encore en vigueur, notamment dans les cantons romans, permet aux étrangers de payer un impôt unique, en lieu et place des impôts sur la fortune, sur les revenus fédéral, cantonal et municipal ; sur la base d’un revenu forfaitaire égal à 5 fois le le loyer de la résidence d’habitation ou sa valeur locative. Sur cette base, l’impôt peut s’établir à des montants de base de l’ordre de 100 000CHF à Genève et moins en Valais.
  • A Bruxelles, l’ISF n’existe tout simplement pas…

Mais il n’y a pas que les plus riches qui partent. Les exilés français à Londres sont d’abord des jeunes qui veulent travailler et qui en ont assez des contraintes du système français, qui veulent pouvoir s’embaucher aisément, qui veulent pouvoir embaucher pour créer leur entreprise sans avoir peur de ne pas pouvoir débaucher. Les charges sociales, employeur et employé, sont de l’ordre de 20% de l’autre coté de la Manche ou en Suisse contre environ 70% dans l’Hexagone.

En fait il ya en France sans doute à peu près autant d’Anglais qu’il y a de Français en Angleterre. Mais les Anglais en France, qui repartent d’ailleurs depuis la chute de la livre, sont pour beaucoup des retraités désireux de s’installer dans nos campagnes moins pluvieuses que les leurs. Alors que les Français qui partent sont pour une petite partie des riches qui exilent aussi leur patrimoine, leurs projets et des emplois ; et pour la très grande majorité des jeunes qui ont envie de créer et de gagner sans être montrés du doigt.

Pour enrayer l’exode des plus riches, le gouvernement a d’ores et déjà remis en place, en juillet 2011 avec effet rétroactif au 3 mars, une « exit tax » dont le décret d’application vient de paraître. Et comme cela ne semblait pas suffire, la promesse est faite de punir les exilés français d’un nouvel impôt mondial susceptible de les poursuivre où qu’ils soient. Certes les Etats-Unis font cela aussi, mais outre que par ailleurs les prélèvements obligatoires sont aux USA de  l’ordre de 30% contre 45% en France, il n’y pas d’impôt sur la fortune de l’autre coté de l’Atlantique. Quoiqu’il en soit, ces barrières fiscales seront des murs de papier pour les jeunes générations, les forces vives qui partent avant d’avoir réussi et pour créer de la richesse ailleurs. Ils ne reviendront pas en France quand ils auront gagné leur pari. Et l’emploi, l’innovation, l’image seront acquis à d’autres qu’à la France.

Il y aurait pourtant des solutions simples à mettre en œuvre pour inverser la tendance : copier l’Angleterre qui conserve des taux d’imposition favorables pour les investisseurs malgré la polémique que cela suscite, qui réduit ses dépenses plus qu’elle n’augmente ses impôts, avec la suppression de 500 000 emplois publics en 4 ans, la réduction du budget des Finances d’un tiers, de ceux des Affaires Etrangères, de l’Intérieur et de la Justice de 25%. Tout n’est pas plus beau chez la perfide  Albion, mais la « Grande Société » de David Cameron est celle des réformes pour rendre les services publics plus compétitifs et autonomes, pour  donner, dans le domaine de la santé,  plus de choix aux patients et plus de liberté aux professionnels. D’une manière générale, le Premier ministre veut remettre le Royaume Uni au travail et décourager l’assistanat en limitant les allocations aux familles et surtout aux chômeurs qui n’acceptent pas les emplois qui leur sont proposés. L’Angleterre aura peut-être ainsi les moyens de rester dans la course qui se joue désormais, et de plus en plus, en Asie plutôt qu’en Europe.

Pour sa part Paris restera peut-être la plus belle ville du monde. Notre beau pays de France gardera sans doute toujours les richesses patrimoniales de son passé, sa culture, son art culinaire et le bon temps de vivre. Mais voulons nous vivre dans le musée du monde ?

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !