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Davos : Socialist France is back !
©Fabrice COFFRINI / AFP

Le retour du retour

A Davos, Emmanuel Macron avait des allures de "rock star", passant aux yeux des décideurs présents comme étant "l’homme de la situation". Pourtant, il persiste à vouloir imposer le modèle français de dépense publique massive et de surendettement aboutissant à un chômage de masse et la faillite de son modèle social.

Aurélien Véron

Aurélien Véron

Aurélien Véron est président du Parti Libéral Démocrate et auteur du livre Le grand contournement. Il plaide pour passer de l'Etat providence, qu'il juge ruineux et infantilisant, à une société de confiance bâtie sur l'autonomie des citoyens et la liberté. Un projet qui pourrait se concrétiser par un Etat moins dispendieux et recentré sur ses missions régaliennes ; une "flat tax", et l'ouverture des assurances sociales à la concurrence ; le recours systématique aux référendums ; une autonomie totale des écoles ; l'instauration d'un marché encadré du cannabis.

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A Davos, Emmanuel Macron a été accueilli en fanfare par un public conquis d’avance. Vantant ses réformes qui n’ont pourtant rien de révolutionnaire, il a eu droit à des applaudissements nourris lorsqu’il a déclamé « France is back ! » Aux yeux des décideurs présents, Macron est l’homme de la situation dans une Europe fracturée, affaiblie par le Brexit, l’affaissement de l’autorité d’Angela Merkel et l’émancipation sulfureuse des pays de l’Est. La première partie de son discours a flatté en anglais son auditoire plutôt favorable au libre-échange, aux Etats limités et à la concurrence. La seconde, retour au français, insistait sur la place centrale de l’Etat, de la redistribution des richesses et de l’Etat providence. Sous le girondin perçait à nouveau le jacobin.

Personne ne conteste le talent fulgurant d’Emmanuel Macron. Séducteur de génie, négociateur hors pair, il sait retourner une opinion hostile en l’affrontant en face et convaincre sur des lignes floues. L’ennui de ces victoires, c’est qu’elles justifient l’ambiguïté sa politique. Comme un libéral, il promeut l’esprit d’entreprise, le sens du risque, le droit à l’erreur… et la reconnaissance du succès. En anglais.

C’est alors en français qu’il redevient social-démocrate malthusien plaidant pour encadrer les disruptions numériques et affronter la prétendue réduction massive du travail disponible qui en. Si l’Etat ne reprend pas les choses en main – sous-entendu comme en France depuis des décennies avec l’immense succès que nous connaissons -, il annonce que « Schumpeter va vite ressembler à Darwin ». Formule séduisante mais creuse.

Chaque sensibilité peut ainsi trouver ses marques dans ce discours affirmant tout et son contraire. Un peu canaille, Emmanuel Macron a aussi choisi de faire rire l’auditoire aux dépens de Donald Trump en ouverture. Certes, ce grand communiquant offre un contraste flatteur pour les Français humiliés jusqu’ici par la médiocrité de ses prédécesseurs avec l’insipide Theresa May, la bien terne Angela Merkel et l’imprévisible Donald Trump au vocabulaire limité à 30 mots. Mais les contradictions de son exposé ont-elles au autant de succès que ses boutades ?

Car 30 minutes après avoir vanté en anglais sa baisse de l’impôt sur les sociétés, il n’a pas hésité à critiquer la course à la réduction des impôts dans le monde, cette fois en français. On l’a entendu défendre en anglais le libre-échange et la concurrence? Personne n’a alors en tête sa menace voilée à l’égard de fonds américains qui lorgnaient sur Danone (secteur stratégique bien connu) ou, au sein de l’Union européenne, son blocage initial de la reprise des chantiers STX par un groupe italien. Une demi-heure plus tard, il appelle en français à étendre l’Etat providence au monde entier pour lutter contre les inégalités. Macron veut une Europe harmonisée. Mais il persiste à vouloir imposer le modèle français de dépense publique massive et de surendettement aboutissant à un chômage de masse et la faillite de son modèle social. Serait-ce son idéal ?

A côté de nous pourtant, l’Allemagne parvient à réduire sa dette chaque année malgré une pression fiscale largement inférieure à la nôtre (8.5% de PIB, soit près de 190 milliards d’euros à l’échelle de la France, différence essentiellement due aux prélèvements sur le capital et le travail, les plus nocifs). La différence entre nos dépenses publiques pèse approximativement le même poids. Moins de dépenses sociales outre-Rhin, moins d’aides au logement, une sécurité sociale concurrentielle et partiellement privée. Avec pour conséquence une croissance plus durable.

Emmanuel Macron a raison de s’inquiéter de la montée des populismes. Mais avant de faire la morale aux pays qui, comme la Suisse, ne connaissent pas nos fléaux - chômage de masse, corruption et délitement institutionnel -, il ferait mieux de faire le bon diagnostic. Pour y parvenir, je lui recommande de relire « La route de la servitude » du Nobel d’économie, Friedrich von Hayek. Il y décrit très clairement comment l’Etat providence transforme mécaniquement les démocraties en régimes totalitaires. La surenchère croissante de demande sociale est alimentée par la majorité de plus en plus exonérée d’impôts directs exigeant des minorités, et maintenant des générations futures, qu’elles financent son train de vie.

Manifestement, Emmanuel Macron ne juge pas prioritaire la réduction significative de la dépense publique. Pas plus que celle de la pression fiscale. Les assurances sociales resteront des monopoles bureaucratiques ruineux, les administrations pléthoriques continueront à occuper leur temps en harcelant citoyens et entrepreneurs dans leur quotidien. Malgré la simple modernisation de certains rouages engagée par Macron, le « modèle social » français a un bel avenir devant lui.

Avec le Macron que nous connaissons à ce jour, le monde risque surtout de découvrir que « Socialism is back ! »

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