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Rentrée de la cour des Comptes : le gouvernement est-il aussi vertueux qu’il l’affirme dans la gestion des finances publiques ?
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Cigale ou fourmi ?

Alors que se tient ce lundi l'audience solennelle de la Cour des comptes, on constate de véritables efforts vers une gestion plus saine des deniers de l'Etat depuis l’élection d'Emmanuel Macron. Pour autant, il est encore bien difficile de qualifier cette gestion de rigoureuse.

Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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Atlantico : Ce lundi matin se déroule l'audience solennelle de la Cour des comptes. L'année dernière, le Premier président de l'institution qualifiait nos finances publiques d'"encore fragiles et vulnérables". Depuis l'élection d'Emmanuel Macron, comment a évolué la situation ? Le gouvernement est-il vraiment aussi vertueux que les discours qu'il tient sur lui-même ? 

Jean-Yves Archer : Le premier président Didier Migaud a officiellement confirmé, l'année dernière, que le dernier budget du quinquennat Hollande comportait des zones d'insincérité pour un total voisin de 10 milliards. Effectivement, depuis l'explosion du nombre de chômeurs placés arbitrairement en formation ( catégorie D) en passant par l'augmentation du nombre d'emplois aidés, bien des artifices comptables ont été utilisés pour masquer les dérives d'un budget parfaitement qualifiable d'électoraliste. La France n'avait pas les moyens d'une baisse d'impôt sur le revenu applicable dès le 1er janvier 2017 : pourtant Hollande l'a fait.

Depuis l'élection d'Emmanuel Macron, la trajectoire des finances publiques a été effectivement positivement rectifiée mais il faut noter trois points-clefs. Tout d'abord, il y a des lacunes dans le PLF 2018 qui concernent la situation des entreprises publiques. Rien n'a été inscrit concernant la reprise partielle de la dette de la SNCF par l'Etat. Or, le président Macron s'y était engagé en juillet 2017 lors d'une interview retentissante à un magazine cheminots.

De même, la situation financière d'Areva (recapitalisée durant l'été à hauteur de 2,5 milliards d’euros) demeure précaire et il est probable que les pénalités et les conséquences des retards sur la construction des EPR de Finlande et de Flamanville aient un impact très défavorable sur les comptes de ce fleuron français.

Concrètement, le gouvernement Valls s'était engagé à reprendre 20 milliards de dette parmi les 45 que compte la SNCF. Ces failles du PLF 2018 se retrouveront sur le chemin de l'élaboration de la future loi de finances pour 2019. Je rappelle que 30 milliards à " couvrir ", cela représente 1,5% de PIB. C'est cette réalité qui n'est pas encore rendue publique mais qui parait inexorable.

Autre angle d'approche, le déficit pour 2018 est supérieur à celui pour 2017. On passe ainsi de 76 mds à 83 mds ce qui ne saurait être porté au crédit de l'action de Bruno Le Maire qui affirme qu'il n'y aura pas d'impôt nouveau pendant le quinquennat mais accumule les taxes dont la dernière en date vient de l'application d'une loi de 2014 relative aux inondations : taxe Gemapi.

Troisième point, le montant des engagements hors-bilan de l'Etat continue à s'accroître à un rythme plus que préoccupant. Si la dette de Maastricht a cru de 630 milliards durant le quinquennat Hollande (soit à peu près autant que durant la gestion Sarkozy), les engagements hors-bilan (pour moitié les retraites à venir des fonctionnaires et pour moitié un bazar porteur de gestion hasardeuse) ont cru de 840 milliards pour atteindre la somme de 4.070 milliards soit plus de 22 ans de pression fiscale.

La caution bancaire qu'apporte l'Etat à la dette de l'Unedic soit près de 40 milliards rentre dans la catégorie des engagements hors-bilan à l'instar des régimes spéciaux de retraites (SNCF, La Poste).

N'est-ce pas plutôt le contexte économique global qui a joué en sa faveur, ou est-ce qu'il y a eu de vrais efforts pour tendre vers une gestion plus efficace et rigoureuse ?

Il y a eu de vrais efforts vers une gestion moins débridée et erratique. En revanche, il parait prématuré de qualifier les résultats acquis de gestion rigoureuse. Des observateurs aussi divers que Pascal Perrineau, Thomas Porcher ou des acteurs (députés membres de la Commission des finances) comme Gilles Le Gendre ou Amélie de Montchalin savent pertinemment que le chantier de la réforme de l'Etat est loin d'être engagé voire seulement amorcé. Où en est le débat sur le périmètre de l'Etat et de ses multiples Agences et autres organismes satellites ?

Au demeurant, notre pays a l'art de tisser des toiles d'araignée incompréhensibles. Le récent rapport de la Cour des comptes (11 janvier 2018) sur les strates organisationnelles incohérentes du Grand Paris  démontre avec de multiples illustrations une incapacité publique à faire simple et efficace.

On retrouve l'enseignement primordial de la Loi d'Alfred Wagner formulée dès 1872 : " Plus la société se civilise, plus l'État est dispendieux. " De facto, l'abandon du projet d'Exposition Universelle en 2025 est un acte de lucidité au regard de nos futures capacités contributives. Même si ces dernières s'améliorent mécaniquement avec les rentrées fiscales accrues (notamment de TVA) qui sauveront la physionomie de l'exécution du budget 2018.

Quelles incidences ont pu avoir et vont avoir les huit nouveaux impôts et taxes instaurés par le gouvernement Philippe ? 

D'éroder les gains de pouvoir d'achat ! Ceux-là mêmes qui doivent découler de la réforme des cotisations sociales. On retrouve là les conclusions du rapport de l'OFCE qui a notamment démontré que 2018 ne serait pas l'année de la relance du pouvoir d'achat.

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