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Sommet de l’attractivité à Versailles : une obsession française qui s’aveugle sur les véritables problèmes du pays
©Reuters

Idée fixe

Quelque 140 dirigeants de firmes étrangères seront accueillis ce lundi en grande pompe par Emmanuel Macron, Édouard Philippe, et 15 ministres, pour un "sommet sur l'attractivité". Mais alors que depuis des années, le débat français se focalise sur l'attractivité et le coût du travail, d'autres paramètres sont largement oubliés par les gouvernement successifs.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Jean-Yves Archer

Jean-Yves Archer

Jean-Yves ARCHER est économiste, membre de la SEP (Société d’Économie Politique), profession libérale depuis 34 ans et ancien de l’ENA

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  1. Atlantico : Ce lundi 22 janvier, Emmanuel Macron réunit les grands patrons au château de Versailles dans le cadre d'un sommet de l'attractivité. Est-il possible d'évaluer la part "gâchée" du potentiel économique du pays en la matière ? 

Philippe Crevel : De tout temps, nous prenons un malin plaisir à gâcher nos atouts. Notre positionnement géographique qui nous offre de larges façades maritimes, nos terres arables, nos axes de circulation multiséculaire, notre patrimoine historique et environnemental, notre culture, notre présence dans toutes les zones économiques avec nos territoires d’outre-mer aux quatre coins de la planète, nous disposons des moyens pour figurer en tête de nos nombreux classements. Mais, peut-être est-ce trop facile et que nous sommes mus par une volonté d’autodestruction. De siècle en siècle, nous laissons passer notre tour voire nous préférons sombrer que concourir. Il y a une malédiction française. Notre pays n’a jamais été la grande puissance qu’elle aurait pu l’être. Sous Louis XIV, le Roi Soleil monopolisa la puissance au détriment des provinces, au détriment de la bourgeoisie naissante. Il fit de l’Etat l’alpha et l’oméga du pays et privé l’économie réelle de ressorts. Le pli fut pris et ses successeurs firent évoluer les institutions tout en conservant voire en amplifiant l’étatisation. Napoléon 1er comme le Général de Gaulle considérèrent que le pays ne pouvait être gouverné que de manière verticale, militaire, le préfet n’étant qu’un général civil et encore il porte l’uniforme.

La France a dépensé beaucoup d’énergie à construire un Etat au départ pour se défendre, pour conquérir puis après les deux conflits mondiaux, après la perte des colonies, les pouvoirs publics ont cherché leur légitimité non pas dans l’économie mais dans l’édification de la protection sociale, une véritable réussite au point qu’elle capte plus du tiers du PIB.

La France, c’est l’Etat et c’est un slogan, l’intendance suivra. De ce fait, à l’exception de quelques périodes, sous Napoléon III ou durant les Trente glorieuses, la France et l’économie sont souvent en indélicatesse. Notre pays est passé à côté de la première révolution industrielle du fait de la Révolution ; elle faillit rater à côté de la deuxième ne raison des deux conflits mondiaux et de ses divisions. Pour la 3e, la France a pris du retard du fait d’une gestion publique des plus dispendieuses et d’un relâchement global (temps de travail, éducation, mœurs politiques). La France est un pays de bas et de rebonds. Du fait de sa richesse, de ses atouts, le pays a une capacité à surmonter les épreuves, après la révolution, après 1815, après 1870, après 1940. Le lent déclin que nous connaissons depuis 1981 s’arrêtera-t-il avec l’arrivée d’Emmanuel Macron. Trop tôt pour le dire !

Jean-Yves Archer : Effectivement, le président Macron a décidé de réunir près de 150 chefs d'entreprises étrangères ce lundi, à Versailles. Il aurait pu être opportun de réaliser une sorte de " fertilisation croisée" en réalisant des rencontres B to B entre ces patrons étrangers et leurs homologues français. Après tout, qui de mieux placé qu'un chef d'entreprise hexagonal pour " vendre " notre pays à des groupes en quête d'investissements ?

Même remarque déceptive concernant la taille des entreprises : seuls les grands groupes auront droit de cité alors que l'essor des ETI (entreprises de taille intermédiaire) est une priorité vitale pour le tissu productif de notre pays. Il y a donc, là aussi, une occasion manquée. Et on ne pourra pas dire que le lieu était trop modeste pour accueillir une centaine de participants additionnels.

L'attractivité est un concept qui recouvre plusieurs aspects. Immédiatement on pense à l'attractivité pour les capitaux et donc au volume d'investissements réalisés en France par des entités étrangères. Or, sous cet aspect, tout n'est pas bon à prendre et le libéralisme en vogue prohibe de se prémunir contre les fonds vautours qui viennent prendre la technologie et n'ont que faire des installations productives (cas de Molex en Occitanie).

Exciter le flux d'investissements étrangers est pertinent à condition de ne pas se faire souffler des pépites (Transports Dentressangle, Lafarge ) voire des entreprises stratégiques du type Safran ou autres.

L'attractivité est directement corrélée à la notion économique d'externalités positives : autrement dit, la présence d'infrastructures de transport, la cartographie sanitaire, le réseau éducatif, etc.

Concernant la part gâchée du potentiel attractif du pays, j'estime que l'exemple de la métropole du Grand Paris est hélas probant. Les emplois sont à l'Ouest et les domiciles sont à l'Est d'où des heures de déplacements erratiques et exténuants en transport en commun ou en automobile.

Sur la dernière décennie, l'ensemble des Franciliens met désormais, en moyenne, 40 minutes de plus pour effectuer le trajet domicile-travail. C'est une aberration hissée au rang d'externalité négative tout autant que la montée objective de l'insécurité dans ce territoire sur la même décennie.

Qu'on le veuille ou non, ce double facteur de déséconomie externe influencera le succès du futur Paris Saclay et d'autres projets franciliens.

Tant Madame Pécresse qu'Anne Hidalgo seraient bien inspirées d'actualiser leurs quelques connaissances économiques. Il suffit de relire leurs déclarations grotesques et cocardières au sujet des gains à escompter du Brexit pour Paris et sa région. Et de les confronter à l'amorce de réalité…

  1. Au-delà de la problématique du coût du travail, abondamment cité concernant l'attractivité de la France, d'autres questions telles que la fiscalité, les barrières à la fluidité du marché du travail et l'instabilité juridique ne sont pas des facteurs plus importants ?

Jean-Yves Archer : La problématique du coût du travail a subi un effet loupe du fait de la vision monoculaire du rapport Gallois de novembre 2012 qui a purement et simplement oublié de dédier une part de son raisonnement à la notion de compétitivité hors-prix. Prenez l'industrie automobile et regardez le prix moyen de vente des modèles. Renault se vante de ses volumes en oubliant que même Skoda présente une meilleure rentabilité et un effet-gamme attractif. La banque du groupe PSA ne dégage pas plus de 0,54 milliard de produit net bancaire là où celle de VW (Volkswagen Financial Services) dépasse largement les 2,3 milliards.

La qualité de nos produits, les positionnements de gamme, la capacité à intégrer des dispositifs de maintenance prédictive (n'est-ce-pas Monsieur Pépy ?), le taux d'efficience de nos appareils logistiques sont autant d'incinérateurs de profit qui éloignent les investisseurs étrangers.

Effectivement, vous avez raison de souligner – comme l'ont fait loyalement et avec pertinence Thierry Mandon et Guillaume Poitrinal (auteurs d'action pour la simplification en 2014) – que notre inflation normative et notre empilement législatif instable nuisent à notre attractivité.

Nous sommes un pays caractérisé par la multiplication de schémas verticaux, de silos qui nuisent à la fluidité des opérations économiques. Le marché du travail nous en donne un exemple assez pathétique : même avec 6 millions de chômeurs (catégories A et B), certains secteurs sont en tension et en difficulté de recrutement consécutivement à nos 2% de croissance en 2017.

Cela démontre qu'il fallait d'abord s'attaquer à la réforme de la formation plutôt qu'au fameux chantier des Ordonnances Pénicaud pour faciliter la rencontre entre l'offre et la demande sur les différents marchés sectoriels du travail.

Philippe Crevel : Depuis des années, le débat se focalise à tort sur le coût du travail. Les pays d’Europe du Nord, le Benelux voire l’Allemagne ont des coûts équivalents ou supérieurs aux nôtres et cela ne les empêche pas d’enregistrer des excédents commerciaux quand nous accumulons depuis quinze ans des déficits. C’est un problème structurel et complexe. Ainsi, malgré la reprise de l’économie, nous constatons que la France n’arrive pas à gagner des parts de marché à l’exportation. Cela n’est pas dû à nos coûts mais à notre absence physique sur certains marchés porteurs et à notre incapacité à répondre à un surcroît de la demande mondiale du fait de l’étroitesse de notre système productif. La France ne possède pas assez d’entreprises exportatrices du fait de leur petite taille et de leur manque de fonds propres. De 2002 à 2016, leur nombre est passé de 129 429 à 124 100. En Allemagne, leur nombre a augmenté en passant de 2004 à 2015 de 105 980 à 320 848.

Les facteurs qui minent la compétitivité de la France nombreux : fiscalité, niveau de compétences, organisation pyramidale, réglementation du droit du travail

La pression fiscale

La France se caractérise par un niveau élevé de dépenses publiques, 56 % du PIB contre une moyenne de 48 % au sein de la zone euro (hors France). De ce fait, les prélèvements obligatoires sont en France 5 points de PIB au-dessus de la moyenne de la zone euro (hors France). Ils sont 18 points au-dessus du niveau américain. Ce niveau est la traduction de choix collectifs en faveur d’une forte redistribution sociale.

Mais la fiscalité n’explique pas tout d’autant plus qu’il faut se méfier des comparaisons en la matière. En effet, certaines dépenses ou recettes peuvent être qualifiées de publiques dans certains pays et dans d’autres pas. Ainsi, les cotisations aux régimes complémentaires de retraite sont en France des prélèvements obligatoires quand en Allemagne, ce n’est pas le cas. Le poids des dépenses publiques varie d’un pays à un autre en fonction du budget de la défense et de la répartition des dépenses d’éducation entre le secteur public et le secteur privé.

Le problème des compétences

La croissance française est, selon plusieurs organismes internationaux, de plus en plus entravée par les mauvais résultats de son système de formation. Cette situation rejaillit tant sur les jeunes actifs que sur l’ensemble de la population active.

La France arrive en 35e position pour les performances des enfants de CM1 en mathématique et en 34e position pour les performances des enfants de CM1 en compréhension écrite.

Un sous-investissement de 2010 à 2015

Les entreprises françaises ont réduit fortement leurs investissements après 2010 du fait de la baisse de leur taux de marge. Un retard non négligeable a été pris en matière de digitalisation. Par ailleurs, le vieillissement des équipements pèse sur la productivité. La France, pays essentiellement tertiaire et de TPE, est moins avancée que l’Allemagne ou les pays d’Europe du Nord sur la robotisation de la production. Le nombre d’entreprises recourant à des systèmes informatiques (robots, cloud, gestion connectée des stocks, gestion connectée des flux) y est plus faible qu’en Europe du Nord. Certes, depuis un an, les entreprises ont repris le chemin de l’investissement mais il faudra plusieurs années pour rattraper le retard accumulé.

Un marché du travail longtemps trop rigide

Le droit du travail et le droit social protègent les actifs ayant un emploi et tout particulièrement ceux employés au sein des grandes entreprises. Les salaires réagissent très peu aux évolutions du chômage ou de la compétitivité. Les mesures prises ces deux dernières années réduisent un peu les contraintes. Mais en matière de simplification, des progrès sont encore à réaliser en particulier au niveau fiscal et social. Par ailleurs, les gouvernements depuis 15 ans se refusent de remettre en cause les 35 heures. Enfin à l’exception de Nicolas Sarkozy, nul n’a osé repousser l’âge légal de départ à la retraite.

La France, pays ayant un savoir-faire dans le domaine des services a souffert durant le dernier cycle économique qui a été très industriel marqué par l’équipement des pays émergents en machines-outils. Le nouveau cycle devrait être plus services, tourismes, bancaires, assurance, grande distribution. Logiquement, la France pourrait en profiter pour regagner des parts de marchés. Mais, pour le moment, tel n’est pas le cas. En 2017, le déficit commercial s’est encore accru du fait que le regain de croissance s’est traduit pas une augmentation des importations de biens industriels.

Derrière ces "défauts" de l'économie française, quels sont ses atouts pour attirer les capitaux étrangers ? ​

Philippe Crevel : Au sein de l’Union européenne, la France figure parmi les pays possédant un grand nombre d’atouts sans pour autant parvenir à les exploiter à leur réel niveau.

La France, une attractivité géographique de premier plan

Disposant d’une très grande variété de paysages, d’une longue histoire, la France demeure la première destination touristique mondiale avec plus de 83 millions de touristes étrangers en 2016. Pour autant, ces derniers dépensent moins dans notre pays qu’en Espagne ou aux États-Unis. La France possède, du fait de sa géographie et de son histoire d’un patrimoine hors du commun, admiré par les touristes de tous les continents. Versailles, les Châteaux de la Loire, Paris, la Côte d’Azur, la Corse, les Alpes sont autant de lieux prisés.

La France dispose de terres agricoles de grande qualité produisant une large gamme de produits végétaux et animaux. Du fait de l’étendue de son littoral, surtout en prenant en compte les régions d’outre-mer, la France dispose d’un des plus grands espaces maritimes à l’échelle mondiale, espace qu’elle exploite mal par ailleurs.

La France, un très bon niveau en matière de recherche

La recherche développement, en France, se classe parmi les meilleures de l’OCDE. L’effort public en la matière représente 0,78 % du PIB, soit juste en-dessous des États-Unis (0,8 %) et au-dessus de la moyenne de la zone euro-hors France (0,76 %).

La productivité, la France juste derrière les États-Unis

La France se caractérise de longue date par une très forte productivité par tête. Notre pays se classe juste derrière les États-Unis et loin devant l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne. Certes, cela est un peu la conséquence du faible temps de travail. Il faut limiter le recours aux travailleurs. En outre, le calcul de la productivité qui retient la valeur ajoutée produite par actif est faussé par le coût du travail et par l’étroitesse de la population active française.

 La France, un pays de créateurs d’entreprise

La France détient au sein de l’OCDE le record des créations d’entreprise rapportées à la population. Cette situation est avant tout imputable à la mise en place en 2008 du statut des auto-entrepreneurs qui a migré, depuis 2015, vers celui des micro-entrepreneurs. La France compte, aujourd’hui, plus d’un million de micro-entrepreneurs dont 50 % seraient actifs. Si entre 2009 et 2014, plus de la moitié des créations d’entreprises étaient dues aux auto-entrepreneurs, depuis leur poids s’est réduit. Les micro-entrepreneurs représentent 40 % des créations.

La France, un pays de leaders mondiaux

Parmi les 40 entreprises du CAC 40, 33 se classent parmi les trois premières mondiales au sein de leur secteur d’activité ; 16 sont même des leaders mondiaux sur leur métier (Danone, Cap Gemini, Engie, Legrand, Safran, Air Liquide, etc.). La France détient des positions fortes dans les secteurs de l’assurance, de la banque, de la grande distribution, de l’aéronautique, de l’aérospatiale, des médicaments, du logiciel (jeux), de l’automobile, de l’énergie, des gaz rares, des travaux publics, etc.

La France, socialement homogène

La France se caractérise par un taux de pauvreté et par un écart entre les plus bas et les plus hauts revenus parmi les plus faibles. Les dépenses sociales qui représentent 34 % du PIB figurent parmi les plus élevées de l’OCDE.

Le taux de pauvreté correspond à la proportion d’individus (ou de ménages) dont le niveau de vie est inférieur pour une année donnée à un seuil, dénommé seuil de pauvreté (exprimé en euros). Le seuil de pauvreté est déterminé par rapport à la distribution des niveaux de vie de l’ensemble de la population. Le seuil le plus souvent utilisé est celui de 60 % du niveau de vie médian.

’indice (ou coefficient) de Gini est un indicateur synthétique d’inégalités de salaires (de revenus, de niveaux de vie…). Il varie entre 0 et 1. Il est égal à 0 dans une situation d’égalité parfaite où tous les salaires, les revenus, les niveaux de vie seraient égaux. A l’autre extrême, il est égal à 1 dans une situation la plus inégalitaire possible, celle où tous les salaires (les revenus, les niveaux de vie…) sauf un seraient nuls. Entre 0 et 1, l’inégalité est d’autant plus forte que l’indice de Gini est élevé. Une baisse de l’indice de Gini observée entre deux dates indique une diminution globale des inégalités. À l’inverse, une élévation de l’indice reflète une augmentation globale des inégalités

Un léger réveil numérique

Emmanuel Macron rêve de transformer la France en start-up nation. Nous n’en sommes pas là mais nous disposons de quelques fleurons dans les nouvelles technologies, dans l’univers du jeu. Si la France est distancée pour la valeur ajoutée et les emplois dépendant du numérique, en revanche, elle arrive en deuxième position pour les levées de fonds. En 2017, 2,56 milliards d’euros ont été levés dans l'Hexagone pour 605 opérations en capital-risque. Avec 18 % des montants levés en Europe, la France se situe, selon le cabinet EY, derrière le Royaume-Uni (40 %) mais devant l'Allemagne (12 %). 2,563 milliards d’euros ont été ainsi levés en 2017 pour 605 opérations contre respectivement 2,2 milliards d’euros et 574 opérations en 2016. L’Île-de-France est la première région d’accueil de ces investissements (77 %) suivie par la Auvergne-Rhône-Alpes (4 %) et PACA (3,9 %). Dans 25 % des opérations de levée de fonds, des grands groupes ont pris des participations en jouant ainsi leur rôle d’incubateur.

Lors du salon « Consumer Electronic Show (CES) » de Las Vegas de ce début d’année, dans l'espace du CES 2018 dédié aux start-ups, la France comptait presque autant de représentants que les États-Unis (275 contre 289), tandis la Chine n’en avait que 50, le Royaume-Uni 30 et l’Allemagne 20. Une trentaine de start-up françaises ont bénéficié de nominations dans les différents concours du CES 2018, et deux ont été primées (Blue Frogs Robotic pour un robot domestique et Lancey Energy Storage pour un radiateur « intelligent »). Les entreprises françaises ont été remarquées dans les domaines de la maison connectée, de la santé et des transports. Elles sont reconnues pour leur innovation et leur capacité à associer technologie et confort d’utilisation.

Néanmoins, comme pour le reste de l’économie, les entreprises du digital sont freinées par leur petite taille. Les levées de fonds françaises peinent à dépasser les 100 millions d'euros, contrairement aux start up britanniques (qui ont réalisé 8 opérations comprises entre 100 et 500 millions en 2017). La France compte peu de jeunes entreprises valorisées à plus d’un milliard d’euros quand elles sont une quinzaine au Royaume-Uni et une dizaine en Allemagne.

Par ailleurs, la Commission européenne publie un classement annuel (European Innovation Scoreboard), fondé sur une trentaine d'indicateurs (intégrant R & D, brevets, emplois, création de richesse) selon lequel la France ne figure qu’au 11e rang au sein de l’Union européenne loin derrière l’Allemagne, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et les pays scandinaves.

Si la France, depuis une dizaine d’années, se caractérise par un niveau élevé de créations d’entreprise, ce dynamisme ne se traduit pas par une montée en puissance du secteur des technologies de l’information et de la communication. Même si elles sont mises, à juste titre, en avant, les start-ups représentent une faible part des créations. A l’échelle macroéconomique, la taille du secteur des Nouvelles Technologies reste faible. L’investissement des entreprises dépendant des NTIC pèse 0,5 % du PIB contre 1,5 % aux États-Unis.

Les NTIC sont à l’origine de 4,3 % de la valeur ajoutée des entreprises françaises. Ce poids devrait atteindre 5 % d’ici 2020. Néanmoins, les entreprises butent sur des goulots d’étranglement en matière de main d’œuvre.

Les questions de financement et donc de croissance des start-up françaises peuvent également expliquer le léger décrochage de la France vis-à-vis des NTIC. En règle générale, les phénomènes de rattrapage s’effectuent par à-coups. Une possible mise à niveau est donc attendue même si la question de formation des actifs constitue un réel handicap.

La France peut-elle cesser de gâcher ses atouts. Cela passe certainement par un accroissement du volume de travail, une réduction des dépenses publiques et une simplification des procédures administratives. Il n’y a pas de fatalité. L’Allemagne l’a prouvé au début du 21e siècle, le Canada plus récemment.

Jean-Yves Archer : Une étude de la Banque des Règlements Internationaux a démontré que les pays du Sud ainsi que l'Inde et la Chine veulent monter en gamme au moyen de fusions-acquisitions réalisées dans les pays du Nord où se trouvent les avantages concurrentiels en matière de technologie.

Autrement dit, c'est la répétition du schéma Mittal " croquant " le leader Arcelor.

Notre potentiel technologique est la future cible des pays dotés de liquidités : c'est ce potentiel qui est notre principal atout. Le deuxième étant qu'un groupe étranger peut vouloir s'européaniser en faisant l'acquisition d'un site de production dans l'Hexagone et de parer tout risque protectionniste ( Toyota à Valenciennes ).

Cet exemple démontre – depuis maintenant des années - que l'on peut produire en France et y gagner de l'argent à la condition de déployer un management pertinent et d'y assembler des modèles recherchés par le public (marketing et effet-gamme cité plus haut ).

Dernière remarque, Emmanuel Macron devrait prendre le temps de vanter l'attractivité de notre pays auprès des contribuables " soulagés " de la charge de l'ISF : il serait quand même regrettable que l'argent ainsi rendu disponible ne quitte le territoire pour aller s'investir dans des projets plus " glamours".

Nous vivons dans un univers où le théorème H-O-S est remis en question (  https://www.glossaire-international.com/pages/tous-les-termes/theorie-hos.html ) par l'habileté productive des nouveaux compétiteurs. Il serait temps qu'une certaine élite politique intègre ce fait dans son cadre conceptuel.

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