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L’univers n’existe pas... en tous cas si on se fie à ce que les scientifiques sont capables de démontrer aujourd’hui
©Reuters

Matière et anti-matière

Les scientifiques du CERN ont fait de nouvelles découvertes sur l'asymétrie entre matière et anti matière. Cela pourrait ouvrir la voie à de nouvelles recherches dans la compréhension de l'univers.

Aurélien Barrau

Aurélien Barrau

Aurélien Barrau est professeur à l’Université Joseph Fourier, membre de l’Institut Universitaire de France et chercheur au Laboratoire de Physique Subatomique et de Cosmologie du CNRS.

Il a publié en mars 2013 Big Bang et au-delà - Balade en cosmologie (Ed. Dunod) qui explique, dans un langage clair et accessible, les dernières découvertes en cosmologie, et des Univers multiples paru chez Dunod en 2014.

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  1. Atlantico : Quelle est la question que se pose la communauté scientifique à propos de l'asymétrie entre la quantité de matière et d'antimatière dans l'univers, qu'elle ne réussit pas à démontrer ?

Aurélien Barrau : Il faut d’abord rappeler que bien que son nom sonne de façon presque « mystique », l’antimatière n’est pas quelques chose de mystérieux. Elle est bien comprise théoriquement depuis 1931 et fut observée expérimentalement en 1932 ! La question de l’existence de l’antimatière ne se pose donc plus depuis longtemps. Même le corps humain émet de très faibles quantités d’antimatière. 

Elle est essentiellement définie par le fait qu’elle possède une charge électrique opposée à celle de la matière et par cette étonnante propriété de s’annihiler (de se transformer en énergie) en présence de matière. 

L’antimatière est fort heureusement très peu abondante dans notre environnement. C’est la raison pour laquelle nous ne nous annihilons quand nous serrons la main d’une autre personne : nous sommes tous deux faits de matière et pas d’antimatière.

La question qui se pose est donc la suivante : puisque matière et antimatière semblent jouer des rôle symétriques, pourquoi l’univers n’est-il pas lui-aussi symétrique ? Pourquoi la matière semble-t-elle l’avoir emporté sur sa consoeur antimatière. 

  1. Des chercheurs aux CERN en Suisse ont effectué des mesures 350 fois plus précises que les précédentes. "L'univers ne devrait pas réellement exister" conclut Christian Smorra physicien à la collaboration Baryon-Antibaryon Symmetry Experiment du CERN. La précision grandissante des techniques de mesure pourra-t-elle nous permettre de constater un jour le déséquilibre fatal à l'antimatière et à l'origine de notre existence ?

Ce que cette assertion un peu caricaturale signifie est que si l’on procède à un calcul simple avec les lois de la physique telle que nous les connaissons, matière et antimatière auraient dû s’annihiler presque entièrement dans les premiers instants qui suivirent le Big Bang. Il devrait ne plus exister que de la lumière dans l’Univers. C’est un paradoxe qui est connu depuis longtemps.

Du point de vue expérimental, l’expérience AMS, sur laquelle je travaille, est un détecteur de particules placé dans l’espace (sur la Station Spatiale Internationale) et tentant précisément de détecter, en ce moment même, d’éventuels traces d’anti-noyaux qui signeraient la présence d’anti-étoiles. A ce stade l’hypothèse dominante est qu’il n’existe pas d’anti-étoiles ou d’anti-galaxies.

  1. Quelles sont les hypothèses les plus convaincantes pour expliquer pourquoi l'univers existe (encore) malgré cette symétrie toujours constatée ? 

Trois conditions qui ont été énoncées par le physicien Russe Andreï Sakharov en 1967 pour expliquer l’état actuel de l’Univers en dépit de cette propension de la matière et de l’antimatière à l’annihilation. Deux d’entre elles concernent la physique des particules élémentaires à proprement parler et la dernière est relative à l’équilibre thermique du Cosmos.

Or les deux conditions relatives à la physique des particules - c’est-à-dire à l’infiniment petit - ne sont pas remplies par les théories dont on dispose aujourd’hui ! En un sens cela est extrêmement intéressant parce qu’il s’agit donc d’une indication d’existence de « nouvelle physique ». Et c’est précisément à partir des de ces traces ou des ces signes que de meilleurs modèles peuvent être élaborés. On dit parfois que tout va en ce moment « trop bien » en physique : nos théories fonctionnent si parfaitement qu’il est difficile de trouver des motivations pour créer celles qui les remplaceront. Avec la fameuse énigme de la matière noire, le fait que matière et antimatière ne se soient pas complètement annihilés après la Big Bang est une de ces étrangetés qui nous servent de guide.

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