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Abrogation du plan climat d’Obama : quel impact mesurable réel ?
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Risque concret ou symbole ?

Le chef de l'Agence américaine de protection de l'Environnement Scott Pruitt a annoncé hier l'abrogation du « Clean Power Plan ».

Christian Gollier

Christian Gollier

Christian Gollier est économiste à la Toulouse School of Economics et co-auteur des 4e et 5e rapports du GIEC.

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Atlantico : Quel bilan peut-on faire du "Clean Power Plan" sur le climat? 

Christian Gollier : Cette régulation des émissions de CO2 par le secteur électrique américain avait été promulguée par l’agence de l’environnement en 2015, sous l’ère Obama. Mais elle n’a jamais pu être mise en œuvre car elle a été immédiatement attaquée en justice par les Etats à majorité républicaine producteur de charbon.  De plus, Trump a toujours promis de stopper cette « guerre au charbon » lors de sa campagne présidentielle. L’objectif de cette régulation était de réduire d’un tiers les émissions du secteur électrique en 10 ans. C’était la pièce maitresse de l’Amérique pour respecter ses engagements dans le cadre des Accords de Paris, et une démonstration aux yeux du reste du monde d’une volonté de s’engager sérieusement dans la lutte contre le changement climatique. On peut donc maintenant être sûr que cette politique ne verra jamais le jour, même si certains Etats pourraient décider unilatéralement de poursuivre l’expérience au niveau local.

A court terme, cela permet aux Américains d’économiser 33 milliards de dollars, qu’ils ne devront pas investir dans la substitution de ces centrales au charbon par des centrales moins polluantes, voire par des éoliennes et du solaire. A plus long terme, cela conduira néanmoins à plus de décès liés aux importantes pollutions locales causées par le charbon. L’administration Trump s’est d’ailleurs empressée de récuser les estimations scientifiques de ces bénéfices sociaux, pour les ignorer complètement. Mais surtout, cela va conduire à un réchauffement de la terre plus élevé qu’espéré, pour de nombreuses générations, aux Etats-Unis comme sur le reste de la planète.  Mais, ça, l’administration Trump s’en fiche complètement.

Scott Pruit et Donald Trump sont de fervents partisans de la sortie de l'accord de Paris sur l'environnement. La fin du "clean power plan" semble être un pas de plus dans ce sens. Quels sont les risques d'une sortie effective des USA de cet accord pour l'environnement?

Cette démarche unilatérale met en danger la stabilité des Accords de Paris, basée essentiellement sur l’idée que si chacun y met un peu de bonne volonté, tout est possible. Dans cet accord, chacun se tient par la barbichette. Si chaque pays pense que tous les autres sont sérieux dans leur promesse de lutte contre le changement climatique, chaque pays a intérêt à être sérieux dans sa promesse aussi, car personne ne veut être désigné comme le fossoyeur de la planète. Mais si le doute s’installe sur les promesses des autres, alors chacun peut ne plus se sentir lié par sa propre promesse, et l’Accord s’effondre. Il y a deux équilibres, et le drame est que le bon équilibre décrit par l’Accord de Paris est instable.

Le départ des Américains est donc bien plus grave que le simple fait qu’on ne pourra pas compter sur eux dans les quelques années à venir. Il est grave parce qu’il offre une bonne excuse à tous les autres parties prenantes à l’accord de s’assoir sur leurs promesses.

Outre une volonté de se démarquer de son prédécesseur, quel est l'intérêt pour Donald Trump d'abroger cette loi? Jusqu'où le climato-scepticisme du Ministre et du Président peuvent aller?

Trump avait besoin des votes des Etats charbonniers de la Côte Est pour gagner l’élection de 2016. Il faut comprendre qu’aux Etats-Unis, la proportion de gens qui restent sceptiques sur l’origine humaine du changement climatique est beaucoup plus importante qu’en France et en Europe. Et cette proportion est curieusement beaucoup plus forte chez les républicains que chez les démocrates !  Quant à Scott Pruit, il a construit toute sa carrière de juriste sur la défense des intérêts du secteur du charbon. Sa décision n’est qu’un retour d’ascenseur.

Mais l’histoire n’est pas finie. D’une part, il est possible aux Etats-Unis d’attaquer l’agence environnementale parce qu’elle ne met pas en œuvre une régulation dont les bénéfices environnementaux dépassent les coûts de mise en œuvre. On peut faire confiance aux ONG outre-Atlantique pour déposer des recours sur cette base dès demain. D’autre part, le charbon est aujourd’hui largement concurrencer par le gaz, beaucoup moins émetteur de CO2, dont le prix s’est effondré aux USA suite à la très forte croissance de la production du gaz de schiste. 

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