Pourquoi Nicolas Sarkozy est-il plus fort sur Facebook et François Hollande sur Twitter ? <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Pourquoi Nicolas Sarkozy est-il plus fort sur Facebook et François Hollande sur Twitter ?
©

I like, please RT

Sur Facebook, le candidat UMP compte près de 587 000 "fans" contre seulement 77 000 pour le candidat PS. A l'inverse, près de 204 000 "followers" suivent le compte Twitter de François Hollande, contre 131 000 abonnés aux tweets de Nicolas Sarkozy. Comment l'expliquer ?

Arnaud Mercier

Arnaud Mercier

Arnaud Mercier est professeur en sciences de l'information et de la communication à l'Institut Français de Presse, à l'université Paris-Panthéon-Assas. Responsable de la Licence information communication de l'IFP et chercheur au CARISM, il est aussi président du site d'information The Conversation France.

Il est l'auteur de La communication politique (CNRS Editions, 2008) et Le journalisme(CNRS Editions, 2009), Médias et opinion publique (CNRS éditions, 2012).

Le journalisme, Arnaud Mercier

Voir la bio »

Atlantico : Sur Facebook, le candidat UMP compte près de 587 000 "fans" contre seulement 77 000 pour le candidat PS. A l'inverse, près de 204 000 "followers" suivent le compte Twitter de Hollande, contre 131 000 abonnés aux tweets de Sarkozy ? Comment l'expliquer ?

Antoine Mercier : Dans un premier temps, il convient de dire que les usages des réseaux sociaux par les candidats ne sont pas encore stabilisés. Dans le sens où, ils ne sont pas encore le fruit de routines, d’habitudes prises qui s’imposeraient comme des évidences : on est encore largement dans une phase exploratoire. Et l’investissement d’un réseau social ou d’un autre est plus le fruit de la personnalité qui, au sein des équipes de campagne, s’occupe du développement Internet, qu’une décision très claire des candidats ou une affinité déclarée pour tel ou tel réseau. L’erreur serait de survaloriser un regard stratégique autour de ces usages. Ce serait une forme de sur-interprétation que de penser que tout est pensé et maîtrisé.

Ensuite, chaque réseau social à ses avantages, ses forces, que les candidats exploitent plus ou moins bien. Nicolas Sarkozy n’a réinvesti Facebook que récemment et a fait un très bon usage de l’outil Timeline qui permet de décrire un récit de vie et qui en cela correspond au "storytelling" avec la narration d’une histoire personnelle à grand renfort de photographies. De son côté François Hollande à investit Twitter, mais ce n’est pas lui qui tweete en permanence, sinon ces équipes de campagnes, ce qui en limite l’intérêt en partie.

Ni l’un ni l’autre des candidats n’a brillé, dans les années précédentes, par un activisme personnel dans l’un ou l’autre des réseaux sociaux. Derrière le Twitter de François Hollande, il y a surtout son fils qui est très à l’aise sur ce support.  Cependant,  j’estime que Twitter sera plus reprise par la classe politique dans le futur car par son mode de fonctionnement, il est très approprié à un phénomène classique dans la vie politique française qui est celui de la petite phrase, du petit mot grinçant, et finalement il y adéquation entre le mode d’expression et ce qui fait un des usages de la vie politique.  Ce qui est certain c’est que finalement les candidats n’utilisent pas tellement la dimension interactive de ces réseaux, ils s’en servent encore comme plateforme publicitaire en y distillant exclusivement des messages de campagnes : meetings, interviews, plateaux télés. Alors que le président américain Barack Obama a démocratisé une forme de tweet-interview et installé une vraie interaction avec ses followers.

A la décharge des candidats français, il ne faut pas oublier que le rôle des réseaux sociaux a commencé à être pris au sérieux en 2007, notamment par l’action de Ségolène Royal.

Le fait que Nicolas Sarkozy ait plus "d'amis" sur Facebook, et François Hollande sur Twitter, n’est-il pas aussi un indicateur sur le type d’électeurs qui les suivent ?

Je ne pense pas qu’on puisse affirmer pouvoir de par le choix du réseau social faire une sociologie des abonnés des deux candidats. Ces abonnements ne sont pas exclusivement des fans qui suivent passionnément la campagne des deux candidats et chaque contenu de leur post. Il y a une grande part d’internautes qui sont là par curiosité, ou qui par ce ralliement font un geste militant minimal en affichant une sympathie ou un intérêt pour un candidat, mais sans pour autant suivre toutes les informations de campagnes déversées sur ces réseaux sociaux.

Que se soient pour les candidats ou pour leurs abonnés, les usages ne sont pas stabilisés. Ce phénomène est comparable à celui qui existe dans la presse : on s’abonne, mais cela finit par se perdre dans un flot d’informations et un certain nombre de gens sont inscrits sans suivre vraiment ce qui s'y passe. Cela ne détermine pas de façon significative, une stratégie de suivi de campagne et des profils sociologiques particuliers qui permettrait de déterminer qu’il y a plus de jeunes sur Facebook, plus de vieux sur Twitter, plus de cadres supérieurs dans l’un ou d’ouvriers dans l’autre. Cela reste assez flottant, là aussi les usages sociaux ne sont pas assez solides pour en tirer des règles sociales fortes.

Le choix d’un réseau social peut-il avoir une incidence sur la façon de mener la campagne ?

Je ne pense pas. Les candidats accordent toujours beaucoup d’importance aux médias traditionnels, que sont la télévision et la radio. Le gros de la campagne reste de ce côté-là. François Hollande est moins innovant sur Internet que ne l’a été Ségolène Royal en 2007. D’eux-mêmes, les candidats n’utilisent pas toutes les ressources techniques et les potentialités de l’outil.

D’autre part, le flux d’informations sur les réseaux est tel que contrôler leur impact sur les abonnés est très difficile. En revanche, la vraie nouveauté tient à ce que font les citoyens et les journalistes à travers les commentaires qui succèdent à des émissions politiques, notamment par la mise en place dans les rédactions du "cover it live". Les gens utilisent Twitter comme un outil de décryptage de chaque apparition télévisée des candidats. Ils montrent un vrai recul, et une posture critique vis à vis de la campagne et ça évoque bien le besoin qu’on les internautes d’exercer leur sens critique face à tous les évènements qui agitent la campagne. 

Propos recueillis par Priscilla Romain

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !