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Ce que le record historique de transactions au premier semestre 2017 révèle de l’état du marché immobilier
©Reuters

Bon état ?

Selon les notaires de France, plus de 900 000 transactions immobilières ont eu lieu en France au cours des 5 premiers mois de l'année, un record historique, ce qui tend à pousser les prix vers le haut.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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Atlantico : Alors que les notaires qualifient cette tendance comme un rattrapage des mauvaises années passées, plutôt que comme un phénomène de bulle immobilière, existe-t-il cependant des risques dans le marché actuel ?

Philippe Crevel : Le nombre d’achats de logements anciens en France est depuis 2016 en forte hausse. 907.000 transactions ont été enregistrées entre mai 2016 et mai 2017 selon les derniers chiffres publiés jeudi dernier par les notaires de France. L’année précédente, 824.000 ventes d’appartements et maisons avaient été dénombrées. L’immobilier reste la valeur refuge par excellence. Selon l’enquête du Cercle de l’Epargne réalisée en 2017, les Français considèrent l’immobilier comme le placement le plus intéressant. En effet, 68 % des  Français considèrent que l’immobilier locatif est un placement intéressant (en hausse de 3 points par rapport à 2016). Les taux d’intérêt pratiqués ces derniers mois pour les crédits et la baisse du rendement des autres produits d’épargne expliquent sans nul doute cette évolution. L’immobilier devance toujours l’assurance-vie (59 %) qui est en léger recul (-3 points) certainement en raison de la baisse du rendement des fonds euros et de la polémique, née de l’adoption de la disposition de la loi Sapin II, prévoyant le blocage temporaire des contrats en cas de crise systémique. L’assurance-vie demeure, de loin, le placement financier préféré des Français. En interrogeant les Français plus précisément sur la question de la rentabilité, ces derniers placent toujours également l’immobilier locatif en tête même si la réalité économique est différente. Les Français se sont empressés à acheter de l’immobilier car ils craignaient une hausse des taux d’intérêt, hausse qui s’est révélée faible et éphémère.

Le marché français de l’immobilier reste assez sain car le poids des primo-accédants est faible. Ce sont avant tout des propriétaires qui vendent et qui rachètent. L’endettement demeure maîtrisé. Nous ne sommes pas dans un système avec gage sur les biens. Le système assurantiel qui est la règle dans notre pays préserve les banques en cas de mauvais paiement. La spéculation est assez limitée ce qui limite les risques liées à une bulle. Certes, une hausse rapide des taux d’intérêt qui n’est pas d’actualité à court terme pourrait provoquer une baisse rapide des prix comme cela avait été le cas entre 1992 et 1997.

Des facteurs structurels devraient conduire à terme à un assagissement des prix en dehors des zones géographiques dans lesquels les prix obéissent à des considérations internationales (Paris, la côte d’azur….). Le vieillissement de la population devrait amener une stabilisation des prix. C’est ce qui a été constaté en Allemagne avant l’arrivée d’un million de migrants. Quand le nombre de décès dépasse le nombre de naissances, naturellement, il y a plus de biens immobiliers remis sur le marché.

Alors que la baisse des taux a pu être un important moteur du marché immobilier au cours de ces dernières années, et cette tendance ayant une limite, quels sont les autres moteurs qui pourraient encore alimenter le marché ?

La convergence des rendements des différents placements. Les Français ont à partir des années 90 amplement contribué à l’essor de l’assurance-vie qui est devenue le premier placement avec plus de 1600 milliards d’euros d’encours. Avec la baisse des taux, ce placement attire moins. Les Français qui sont averses aux risques se sont reportés à tort ou à raison sur l’immobilier. Les problèmes économiques de ces dernières années, les tensions internationales favorisent ce type de comportement.

La concentration de la population au sein des grandes métropoles, Paris, Lyon, Lille, Bordeaux, Toulouse, etc, provoque une augmentation des prix en leur sein. Les migrations de population vers le littoral, vers l’Ouest et vers le Sug génèrent dans les régions concernées des tensions tarifaires. A contrario, les villes industrielles de l’Est ou du centre souffrent comme Mulhouse, Belfort ou La Souterraine.

A quoi peut-on s'attendre pour la rentrée 2017 ? Quelles sont les zones géographiques qui profitent le plus de cette tendance, et celles qui en profitent le moins ?

L’immobilier ne serait pas dans les petits papiers d’Emmanuel Macron qui entend réorienter l’épargne des ménages vers les entreprises, vers les actions…. Afin d’atteindre son objectif, il a prévu d’exclure de l’assiette de l’ISF les placements financiers et d’instituer sur les revenus mobiliers un prélèvement forfaitaire de 30 %. En relatif, l’immobilier sera donc pénalisé. Evidemment, cela suppose qu’il réussisse à réformer l’ISF…. Néanmoins, il est possible qu’il y ait un petit report de l’épargne vers les actions.

Au cours des prochains mois, un léger tassement de la demande en biens immobiliers est prévisible. L’engouement du début de l’année était imputable à la crainte exagérée de la hausse des taux. Par ailleurs, la rentabilité de l’immobilier, net de charges, net d’impôts est faible, autour de 1 %. Cette rentabilité baisse au fur et à mesure que les prix augmentent.

Il n’y a pas un marché immobilier mais une multitude de marchés immobiliers. De manière très grossière, ces derniers mois ont été favorables à Paris, valeur sûre mais à la rentabilité faible, à certaines grandes métropoles comme Rennes ou Nantes, Bordeaux. Du fait de l’arrivée de nombreux retraités mais aussi d’actifs sur le littoral, les prix ont tendance à augmenter dans certaines localités de la façade atlantique ou méditerranéenne. Mais, il convient de souligner que dans certaines villes, la multiplication de programmes immobiliers peut apporter des déconvenues. Ainsi, à Bordeaux, de nombreux immeubles en Pinel ont vu le jour mais au sein de quartiers mal desservies ou ne comportant pas de services (commerces, cabinets médicaux, etc.). Nantes peut, au regard de l’activité économique, être considérée comme trop chère. Il faut sans nul doute privilégier Rennes ou Lilles. Par ailleurs, il faut s’intéresser à des villes qui peuvent redécoller économiquement comme Rouen ou le Havre.

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