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"Article 353 du Code Penal" : quand le crime est innocence
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Le dernier roman de Tanguy Viel raconte une histoire de crime faussement banale. Un livre à la Simenon, servi par un style époustouflant.

Valérie de Menou pour Culture-Tops

Valérie de Menou pour Culture-Tops

Valérie de Menou est chroniqueuse pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).  Culture-Tops a été créé en novembre 2013 par Jacques Paugam , journaliste et écrivain, et son fils, Gabriel Lecarpentier-Paugam, en Master d'école de commerce, et grand amateur de One Man Shows.

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LIVRE

Article 353 du Code Penal

de Tanguy Viel

Les Editions de Minuit

174 pages

L’AUTEUR

Tanguy Viel est un écrivain d’origine Brestoise. Pensionnaire de la Villa Médicis en 2003-2004, il a écrit une dizaine de romans salués unanimement par la critique.

THÈME

Au cours d’une sortie en mer, Martial Kermeur, un père de famille breton divorcé et chômeur, jette à la mer Lazenec, un promoteur véreux qui a fait miroiter un projet immobilier pharaonique jamais réalisé. Lors de son audition par le juge, le meurtrier retrace les circonstances de la manipulation et démontre minutieusement la mécanique d’une escroquerie.

POINTS FORTS

-        On sait dès le départ ce qu’il s’est passé, on connait le criminel. Le roman s’attaque donc à la genèse du geste et à la psychologie de son auteur marquée par le climat social environnant.

-        Les lieux- Brest et ses environs- sont très présents et imprègnent fortement la narration. Les vents, les habitants, les mouettes et la fermeture dramatique de l’arsenal de Brest donnent une atmosphère profonde et austère au récit.

-        Une réflexion aiguë sur la manipulation, l’aveuglement, la notion de culpabilité et la justice. Tanguy Viel réussit l’exploit de nous glisser dans la peau du meurtrier -un blessé de la vie- et nous décrit parfaitement  l’emprise : séduire sa proie, s’attacher la confiance, faire rêver, y compris le fils  Kermeur invité par Lazenec  à des matches de foot et partant dans sa Porsche.

-        Notre cœur se serre lorsque Kermeur engloutit la totalité de sa prime de licenciement dans l’arnaque et  on en vient à approuver son geste  en se disant qu’il a bien fait de tuer cette horrible crapule. Une sorte de catharsis pour tous ceux qui ont eu à connaître des abus dont ils auraient aimé se venger !

-        Le héros, au départ, passif- il se laisse vivre, jusqu’à en oublier de jouer au loto le seul jour où ses chiffres fétiches sortent- passe à l’action non seulement pour sa libération  personnelle mais aussi en raison  des effets collatéraux produits. Il fait finalement, œuvre de salut public en éliminant un sale type comme Lazenec.

-        Tanguy Viel touche le mystère de la notion de « l’intime conviction », inscrite à l’article 353 du Code de procédure pénale, une notion subjective qui permet au juge et aux jurés de guider leur décision à partir d’une conviction personnelle.

-        Le style de ce roman est époustouflant. Tanguy Viel est un virtuose des mots et il donne au récit une exceptionnelle densité et une profonde émotion.

POINTS FAIBLES

Je n’en vois pas.

EN DEUX MOTS

Ce roman, faussement policier, est un vrai roman social : une existence qui se gâte avec le chômage, le divorce, le désœuvrement et puis l’arrivée d’un personnage flamboyant,  porteur de faux rêves, qui semble rallumer l’espoir.

 L’escroquerie, somme toute banale, révèle toutefois un cynisme effrayant : l’imposteur s’attaque aux plus modestes et  abuse toute une ville en faisant miroiter un  « Saint Tropez du Finistère », créateur d’emplois et mirage d’un bonheur illusoire.

Tanguy Viel explore à la perfection le thème de la confiance et mène une belle réflexion sur le mal qui peut habiter l’âme humaine jusqu’à nous conduire à penser que le meurtre, acte grave, est forcément mérité.  

Il évoque aussi l’injustice avec, heureusement, une fin magistrale qui nous remplit de soulagement.

UN EXTRAIT

« Enfin donc voilà, j’ai dit au juge, il s’est mis tout le monde dans la poche. Et maintenant je dis : si on pouvait seulement entrevoir le démon dans le cœur des gens, si on pouvait voir ça au lieu d’une peau bien lisse et souriante, cela se saurait, n’est-ce pas ? » page 53

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