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La Cour des Comptes dénonce le scandale du recouvrement des cotisations RSI
©Reuters

Dépense publique

Le recouvrement des cotisations RSI est un véritable scandale dont la Cour des Comptes vient d'illustrer le détail de quelques hallucinantes errances. Lecture d'un texte indispensable pour tout travailleur indépendant...

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Le rapport de la Cour des Comptes sur la gestion du RSI est accablant (nous en produisons d'autres extraits relatifs à la consolidation des comptes avec le régime général). L'ensemble des procédures mises en oeuvre est marqué par des irrégularités, soient réglementaires, soient comptables.

À titre d'exemple, les taxations d'office sont calculées selon des méthodes qui ne respectent pas la réglementation, et leur affectation dans les comptes n'est pas régulière.

Le lecteur peut juger par lui-même des constats accablants qui sont dressés. Sur le fond, on peut s'interroger sur la passivité des pouvoirs publics face à cette situation qui dure depuis plus de 10 ans sans paraître s'améliorer. 

Incontestablement, le RSI est un cataclysme industriel qui mériterait des mesures efficaces... On peut penser que son absorption progressive par le régime général ne règlera rien. 

Les prélèvements sociaux sur les travailleurs indépendants

82. Les irrégularités qui continuent d’affecter le calcul, l’appel et la régularisation des cotisations des travailleurs indépendants en taxation d’office entraînent un désaccord sur les comptes ; les faiblesses du contrôle interne du recouvrement des prélèvements sociaux de cette catégorie de cotisants (20,6 Md€) limitent le niveau d’assurance procuré sur la fiabilité des comptes.

Les appels de cotisations en taxation d’office

83. Les appels de cotisations en taxation d’office s’élevaient à 1,7 Md€ en 2016 (2,1 Md€ en 2015), dont 0,8 Md€ pour des cotisants taxés d’office sur plusieurs exercices (1,3 Md€ en 2015). Les créances entaxation d’office représentaient 5,3 Md€ (6,4 Md€ en 2015), dont 1,6 Md€ pour les taxations d’office sur plusieurs années (2,5 Md€ en 2015).

84. Le calcul, l’appel et la régularisation des cotisations en taxation d’office restent marqués par des irrégularités.

85. Les appels de cotisations en taxation d’office effectués par les URSSAF n’ont pu être corrigés pour les cotisants ayant déjà fait l’objet d’une taxation d’office, de même que le montant des créances des exercices antérieurs. L’ACOSS évalue l’incidence de cette irrégularité sur les comptes de l’exercice à au moins 220 M€ pour les produits et 500 M€ pour les créances détenues sur ces cotisants.

86. Les organismes de recouvrement ont procédé en 2016 à la régularisation des revenus 2013 taxés d’office de 25 500 cotisants relevant de l’interlocuteur social unique, sur la base d’une assiette reconstituée à l’aide de données fiscales et en l’absence de déclaration de revenus d’activité de ces cotisants. La réglementation ne prévoyant la régularisation de taxations d’office qu’en cas de déclaration du cotisant, les produits et les créances ont été réduits à tort de 127 M€.

87. En contradiction avec la réglementation, les pénalités prévues avant toute taxation d’office en cas de déclaration tardive de son revenu d’activité par un travailleur indépendant17, la pénalité de 10 % applicable en cas de régularisation de la situation déclarative du cotisant en taxation d’office, ainsi que la taxation d’office des micro-entrepreneurs qui ne déclarent pas leurs revenus d’activité18 ne sont toujours pas appliquées.

88. L’absence de régularisation en 2016 des prélèvements sociaux concernant 58 400 comptes de cotisants radiés, pour la plupart depuis 2015, a réduit les appels de cotisations sociales en taxation d’office. L’impact sur les comptes de 2016 n’a pu être évalué, entraînant une limitation à l’audit.

89. Les insuffisances des dispositifs de contrôle des cotisations taxées d’office maintiennent à un niveau élevé le risque de comptabilisation de produits et de créances incertains.

90. Malgré des améliorations, la supervision et le suivi des comptes de ces cotisants demeurent insuffisants dans le réseau. Le manque de fiabilité des données administratives et les insuffisances du dispositif de relance des cotisants n’ayant pas déclaré leurs revenus d’activité contribuent à maintenir ouverts des comptes de cotisants sans activité professionnelle, entrainant des situations de taxation d’office à tort.

91. De surcroît, un nombre encore élevé de comptes (17 100) de cotisants relevant de l’ISU, taxés d’office depuis plusieurs exercices et exclus du plan annuel de radiation de masse, n’avaient pas été fiabilisés à la fin de l’exercice (représentant 1,3 Md€ de restes à recouvrer). 5 900 comptes de professions libérales étaient dans la même situation.

92. Les produits et les créances résultant de ces taxations d’office ont, par nature, un caractère provisoire et incertain dans leur montant. Une grande part en sera, en effet, annulée par une radiation du compte après deux années d’absence de déclaration de revenus d’activité, ou fortement réduite lorsque celle-ci sera transmise. Ces réductions anticipées de produits ne sont pas traduites de manière adaptée, en fin d’exercice, par les dépréciations enregistrées dans les comptes. 

Les dispositifs de contrôle et de supervision

93. Les dispositifs de contrôle et de supervision ne garantissent pas encore une maîtrise suffisante des risques de portée financière liés au recouvrement des prélèvements sociaux de ces cotisants.

94. Les cadres nationaux de contrôle interne pour les cotisants relevant de l’ISU et les professions libérales, renforcés en 2016, ne couvrent toujours qu’imparfaitement les risques de portée financière auxquels sont confrontés les principaux processus.

95. Les plans de contrôle sur pièces des cotisants relevant de l’ISU et des professions libérales engagés au second semestre n’ont été que partiellement mis en œuvre et certains contrôles n’ont pu déboucher sur la mise en recouvrement des redressements. Les praticiens et auxiliaires médicaux n’ont pas été couverts, sauf exception, par ces actions.

L’affiliation des cotisants et la gestion des appels et des remboursements

96. La gestion des données administratives des cotisants reste marquée par des traitements tardifs ou incorrects.

97. Le traitement des données administratives continue de s’améliorer, mais un volume encore important d’opérations rétroactives résulte de la prise en compte ou de la régularisation tardive, par les organismes, des modifications survenues dans la situation des cotisants, des affiliations et des radiations.

98. L’incidence financière des radiations rétroactives a fortement augmenté en 2016, à la suite de l’élargissement du périmètre du plan annuel de radiation de masse des comptes de cotisants ISU taxés d’office sur plusieurs exercices : 1,2 Md€ de cotisations ont été annulées, dont 0,8 Md€ dans le cadre des plans annuels (contre 0,8 Md€ et 0,3 Md€, respectivement, en 2015).

99. Une partie des comptes en taxation d’office sont radiés à une date postérieure à la date fixée par la règlementation, ce qui entraîne le maintien à tort de créances dans les comptes de l’activité de recouvrement. Les conditions de ces radiations ne sont pas pleinement sécurisées et les données fiscales disponibles ne sont pas prises en compte.

100. Le contrôle des montants remboursés aux cotisants (1,7 Md€) laisse subsister un risque de remboursements injustifiés.

101. Le dispositif de contrôle a posteriori des remboursements et des diminutions de cotisations ne couvre pas, en particulier, les praticiens et auxiliaires médicaux. Il n’a été mis en œuvre qu’en fin d’exercice, ce qui a conduit à reporter à 2017 le contrôle de 80 % des montants figurant au plan de contrôle 2016 (420 M€).

102. Reposant principalement sur les liasses fiscales transmises par les cotisants, que les données en provenance de la DGFiP ne permettent pas encore de fiabiliser, les contrôles montrent des faiblesses persistantes dans la détection des anomalies et dans la centralisation des résultats. La fiabilité des indicateurs de suivi et de risque financier s’en trouve affectée. La mesure du risque financier résiduel reste très partielle au plan national.

103. Les règles de prescription sur le délai et le point de départ du calcul de la prescription des montants restant à rembourser aux comptes des cotisants ne sont pas correctement appliquées.

Le recouvrement amiable et forcé

104. Les risques de non-recouvrement des créances relevant de l’ISU et d’erreurs dans la comptabilisation des créances prescrites ne sont encore qu’imparfaitement couverts.

105. Des dysfonctionnements continuent d’affecter les actions automatisées du recouvrement de ces créances. Un montant important de créances ayant une ancienneté de plus d’un an (1,1 Md€) n’ont pas fait l’objet d’actions automatisées de recouvrement amiable ou forcé.

106. Le montant des créances détenues sur des cotisants dont l’adresse est inconnue reste élevé (0,7 Md€, contre 0,6 Md€ en 2015). La mise en recouvrement de certaines majorations de retard complémentaires19 n’a pas été effective en 2016.

107. Malgré la diffusion d’instructions nationales en 2016, les cotisants défaillants ne sont, sauf exceptions, pas poursuivis jusqu’au stade de l’assignation devant les tribunaux.

108. La détection des créances prescrites reste incomplète et mal sécurisée, principalement au stade du recouvrement forcé. La moitié des contraintes anciennes ont été identifiées comme prescrites et un quart ont été sécurisées durant l’exercice, mais 200 M€ de contraintes présumées prescrites restaient à analyser en fin d’exercice.

109. Le retard pris dans le traitement des dossiers éligibles à l’admission en non-valeur identifiées par le traitement de détection et une maîtrise insuffisante des règles d’admission en non-valeur font peser un risque sur la correcte comptabilisation de ces créances.

Les praticiens et auxiliaires médicaux

110. Les risques liés aux appels et prises en charge de cotisations sociales des praticiens et auxiliaires médicaux demeurent élevés, entraînant une incertitude sur les comptes.

111. Les praticiens conventionnés de secteur I et de secteur II ayant opté pour le contrat d’accès aux soins et les auxiliaires médicaux bénéficient d’une prise en charge d’une partie de leurs cotisations maladie et famille par les régimes d’assurance maladie (1,9 Md€). Les risques d’erreurs déclaratives ne sont que partiellement couverts par la mise en œuvre d’un contrôle de cohérence.

112. La fiabilisation des données administratives et leur cohérence avec celles de la branche maladie restent à consolider. L’intégration des données d’assiette dans le système d’information des URSSAF reste affectée par de nombreuses anomalies.

La justification des enregistrements comptables

113. La justification des comptes reste affectée par des désaccords sur la correcte comptabilisation des produits et des charges et sur les montants des impôts et taxes affectés notifiés à l’ACOSS par la direction générale des finances publiques, ainsi que par des limitations et incertitudes portant sur les enregistrements comptables et sur les estimations comptables.

La comptabilisation des produits et des charges

114. Le rattachement incorrect à l’exercice de plusieurs produits affecte la qualité des comptes.

115. Les produits de cotisations et de contributions sociales des travailleurs indépendants (20,6 Md€) sont comptabilisés à leur date d’exigibilité dans les comptes combinés de l’activité de recouvrement et de ses attributaires, au lieu d’être rattachés, selon le principe de comptabilisation en droits constatés, à l’année d’acquisition du revenu.

116. Les produits à recevoir de prélèvements sociaux précomptés sur les revenus de remplacement comptabilisés en fin d’exercice par l’ACOSS, tels que les pensions de retraite ou d’invalidité, incorporent à tort, à hauteur de 0,7 Md€, des prélèvements assis sur des revenus de remplacement versés début janvier. Cette comptabilisation contrevient à la règle de rattachement des produits à l’exercice, le fait générateur des cotisations étant la date de versement des revenus qui en constituent l’assiette.

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