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Donald Trump n’est pas chrétien selon lui mais le Pape le rencontre ce mercredi : que vont-ils se dire ?
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Lors de la campagne présidentielle, le pape François avait déclaré que celui qui portait un projet tel que celui du mur entre les Etats-Unis et le Mexique n'était pas chrétien.

Christophe Dickès

Christophe Dickès

Historien et journaliste, spécialiste du catholicisme, Christophe Dickès a dirigé le Dictionnaire du Vatican et du Saint-Siège chez Robert Laffont dans la collection Bouquins. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages consacrés à la politique étrangère et à la papauté (L’Héritage de Benoît XVI, Ces 12 papes qui ont bouleversé le monde). Il est enfin le fondateur de la radio web Storiavoce consacrée uniquement à l’histoire et à son enseignement.

 

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Donald Trump va rencontrer le Pape François, un après la petite "escarmouche" qui avait été relevée par la presse entre le pape (qui avait déclaré qu'il ne fallait pas construire des murs mais des ponts entre les hommes) et l'actuel Président des Etats-Unis, alors en campagne. Doit-on s'attendre à une confrontation des différences entre les deux hommes ? 

Christophe Dickès : Non, je ne pense pas. Dès le lendemain de l’élection de Trump, le cardinal Parolin, numéro deux du Saint-Siège a affirmé : « Une chose est d’être candidat, une autre est d’être président, d’être aux responsabilités ». Cela voulait tout dire… De son côté, si Donald Trump visite le pape François aussi rapidement c’est parce qu’il est un élément important sur l’échiquier de la diplomatie mondiale mais aussi et surtout des Amériques. On se souvient du rôle majeur joué par le Saint-Siège dans la réconciliation entre les Etats-Unis et Cuba. Mais la diplomatie du Saint-Siège est aussi active dans bien d’autres coins de la planète et notamment au Moyen-Orient. Le discours de Donald Trump à Riyad a témoigné d’une possible convergence de vue à l’œuvre pacificatrice dans la région. Par ailleurs, Trump a montré qu’il n’était pas un idéologue en posant un revirement sur la question syrienne.

La diplomatie, comme la politique, est l’art du possible. Le Saint-Siège joue un rôle de médiateur, de facilitateur, moins de contradicteur. Il agit en fonction de plusieurs objectifs : la protection des minorités chrétiennes, le respect de la dignité humaine et de la liberté religieuse, les droits de l’homme. Surtout, dans sa méthode, il reste ouvert au dialogue, ce qui fait sa force parce que son action est désintéressée. Le pape François l’a dit à son retour du Portugal : « Il y a toujours des portes qui ne sont pas fermées… Chercher les portes qui au moins sont un peu ouvertes… Entrer et parler de choses communes pour aller de l’avant, pas à pas. La paix est un travail d’artisan, elle se construit chaque jour. De même que l’amitié entre les personnes. » Certes, le pape François peut regretter les excellents rapports entretenus avec la diplomatie Obama. Mais les sociétés évoluent et le Saint-Siège doit prendre en compte les nouvelles réalités politiques comme il l’a toujours fait dans son histoire.

Quels sont les enjeux politiques qui concernent l'Eglise catholique aux Etats-Unis et les catholiques américains pour que Trump fasse de cette rencontre un de ses tout premiers déplacements internationaux ?

Il est difficile de savoir si, dans l’agenda de la visite, la question des catholiques américains sera posée. Donald Trump répond aux attentes des catholiques américains sur l’avortement. Par exemple, il a supprimé  les subventions en faveur des lobbies pro-avortement. Il est entouré de personnes qui n’ont jamais caché leur opposition à l’avortement comme Mike Pence. Enfin, il a nommé Neil Gorsuch à la Cour suprême fin janvier. Or ce juge pro-vie va trancher des questions sociétales et départager les huit juges (quatre progressistes contre quatre conservateurs) de la Cour... Le Saint-Siège sait aussi qu’il est opposé à la théorie du genre.

Bref, toutes ces questions seront sûrement abordées au cours de cette rencontre et peuvent constituer ces fameux points communs dont parlait François. Même s’il en parle moins que son prédécesseur Jean-Paul II, le pape François a évoqué l’avortement à plusieurs reprises en le dénonçant non pas comme « un mal mineur » mais comme « un crime ». Enfin, le pape François sait très bien qu’une majorité de catholiques a voté pour Donald Trump. Même s’il perçoit mal la réalité des classes moyennes américaines avec sa grille de lecture d’Américain du Sud, il ne peut éluder cette réalité.

Une question sur laquelle on pourrait s'attendre à un certain désaccord entre le pape et Trump pourrait être l'écologie. Quelle est l'ampleur de cette nouvelle mission politique pour le Vatican ? 

Je reprends là aussi ce qu’à dit le pape François après sa visite au Portugal. Dans le respect, le Saint-Siège va exposer son point de vue sur la question. En sincérité et sans calcul politique. En fait, l’écologie et la question des migrants constituent potentiellement les deux points de friction entre les deux partis. Mais le pape est un homme qui construit des ponts, parfois sur le temps long. C’est précisément sa force par rapport aux démocraties occidentales qui entrent dans des processus à court terme, rythmés par les élections.  

Néanmoins, il sera intéressant de voir comment Donald Trump sera accueilli. On se souvient du regard noir que le pape François avait porté sur François Hollande venu le visiter en janvier 2014… Je ne crois pas qu’il aura le même regard. Il existe aussi chez les deux hommes une forme de populisme propre au continent américain, différent des mouvements populistes européens. Trump a été élu démocratiquement par une Amérique qui se sent à la marge de la mondialisation. Cette réalité peut aussi les rapprocher.

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