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Refaire de la France une grande puissance européenne : qui propose quoi parmi les candidats ?
©Reuters

Tout en finesse

Deux candidats tirent leurs épingles du jeu sur cette question. Et François Fillon semble être doté du programme le plus robuste pour reformer le pays.

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan est consultant en stratégie et président d’une association qui prépare les lycéens de ZEP aux concours des grandes écoles et à l’entrée dans l’enseignement supérieur.

Avocat de formation, spécialisé en droit de la concurrence, il a été rapporteur de groupes de travail économiques et collabore à plusieurs think tanks. Il enseigne le droit et la macro-économie à Sciences Po (IEP Paris).

Il écrit sur www.toujourspluslibre.com

Twitter : @erwanlenoan

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Lorsque l'on observe le programme des différents candidats en course pour la présidentielle, quel est celui qui se donne le plus les moyens de faire de la France une grande puissance ? 

Erwan Le Noan : Pour répondre à cette question, il faut s’en poser 4 autres.

La première, c’est : « quels sont les critères pertinents pour évaluer cette « puissance » de la France ?». Chaque candidat prétend évidemment que son programme est le mieux adapté pour valoriser la France : en cela il reflète des préférences diverses. Pour certains électeurs, ce qui doit primer, c’est une économie robuste. Pour d’autres, c’est l’incantation de la « grandeur » liée à un rayonnement culturel. Certains estiment par ailleurs que ce qui doit l’emporter c’est une vision de la souveraineté, politique et militaire. D’autres enfin y préfèrent le modèle de solidarité. Tous les candidats incluent, plus ou moins, ces critères ; mais tous n’y accordent pas la même valeur.

La deuxième question est de se demander ce qui constitue le premier obstacle à la « puissance » de la France aujourd’hui. Il y a de bonnes raisons de considérer que c’est la faiblesse de son économie. Il me semble que deux candidats ont posé ce constat : François Fillon et Emmanuel Macron. Le premier le pose très clairement, le second plus implicitement.

La troisième question c’est : « lequel de François Fillon et Emmanuel Macron a le programme le plus à même de relever l’économie française ? ». Clairement, de ce point de vue, François Fillon est plus ambitieux et plus radical (notamment sur la réforme de l’action publique) qu’Emmanuel Macron qui s’inscrit dans une lignée réformiste progressive. Le premier défend un message de rupture avec le modèle social-démocrate, le second son amendement (dans une voie quimarque toutefois un bond pour la gauche).

Une dernière question consiste à se demander lequel des deux candidats peut le mieux mettre en œuvre ses réformes ? En clair : vaut-il mieux un réformiste timide qui puisse agir ou un radical ambitieux qui serait contraint ? Je crois que s’il était élu, François Fillon bénéficierait d’une majorité assez solide et plutôt disciplinée, ce qui lui permettrait de faire face à des agitations qui existeront dans le pays et dans son camp. La faiblesse d’Emmanuel Macron, sur laquelle il n’a pas rassuré à ce jour, c’est que sa majorité est inconnue, qu’elle serait probablement plutôt ancrée à gauche, qu’elle risque d’être volatile. Il vante une « majorité de projet » : c’est une piste ambiguë car cela peut correspondre à des ralliements momentanés, pour des textes précis et pas d’autres, ce qui conduit à un gouvernement en tractations et fragilités permanentes. On risque la 4e République…

Le sentiment de perte d'influence de la France sur la scène internationale, tout comme ses faiblesses sur le plan économique ont pu participer à créer un contexte anxiogène favorable au populisme. Comment analysez-vous ce sentiment, quels en sont les causes profondes ?

Erwan Le Noan : Les Français sont inquiets de l’affaiblissement de la France, réel ou (et !) perçu, car il signifie un rabaissement de leur culture et une fragilisation de ce qui les protégeait jusqu’à maintenant. Cela joue évidemment dans leur déprime et alimente leur peur du déclassement.

Pour autant, il ne faut pas se tromper de diagnostic. Nos difficultés ne sont pas le fait de la mondialisation : tant d’autres pays ont su y faire face, parfois avec des défis plus grands ! Nos problèmes viennent de notre Etat-Providence, en situation d’échec coupable, à se réformer, et dans l’incapacité de se repenser ou se rénover. Ce point, François Fillon le pose clairement (pas Emmanuel Macron, qui reste nécessairement flou sur son diagnostic ; faire autrement serait s’aliéner une partie de son électorat).

Dans quelle mesure peut-il être intéressant sur le plan électoral d'apparaître comme crédible pour assurer la puissance du pays à l'avenir ? 

Erwan Le Noan : Si l’on fait le constat que les citoyens français sont désespérés de l’impuissance du politique, on peut faire le pari que le candidat qui leur montrera qu’il a la capacité de mettre fin au renoncement et de changer le pays aura de bonnes chances d’être élu.

Le problème de cette campagne est qu’elle ne pose pas la question en ces termes. François Fillon a le programme le plus robuste pour réformer la France ; mais il ne peut pas ignorer qu’il a perdu sa crédibilité dans une part non négligeable de l’opinion. Or, c’est un handicap pour réformer. Emmanuel Macron, de son côté, n’est pas atteint par des affaires ; mais il n’est pas certain qu’il apparaisse parfaitement crédible auprès des citoyens pour mener des réformes audacieuses, dont la France a pourtant besoin. Ni l’un ni l’autre ne parviennent à remporter la bataille de la crédibilité, pour des motifs différents. Le choix qui reste à l’électeur est donc par défaut : l’efficacité contre la pureté, d’une certaine manière.

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