La possible alliance Peugeot/General Motors signifie-t-elle la fin de l’automobile française ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le constructeur automobile français PSA Peugeot Citroën a entamé des discussions avec le géant américain General Motors.
Le constructeur automobile français PSA Peugeot Citroën a entamé des discussions avec le géant américain General Motors.
©Reuters

Lion griffé

Le constructeur automobile français PSA Peugeot Citroën a entamé des discussions avec le géant américain General Motors. Les investisseurs ont salué la perspective d'un rapprochement entre les deux firmes et les actions de PSA se sont envolées à la Bourse de Paris. Mais est-ce vraiment une raison de se réjouir ?

Robin Rivaton

Robin Rivaton

Robin Rivaton est chargé de mission d'un groupe dans le domaine des infrastructures. Il a connu plusieurs expériences en conseil financier, juridique et stratégique à Paris et à Londres.

Impliqué dans vie des idées, il écrit régulièrement dans plusieurs journaux et collabore avec des organismes de recherche sur les questions économiques et politiques. Il siège au Conseil scientifique du think-tank Fondapol où il a publié différents travaux sur la compétitivité, l'industrie ou les nouvelles technologies. Il est diplômé de l’ESCP Europe et de Sciences Po.

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La possibilité d’une alliance entre les groupes automobiles PSA Peugeot-Citroën et General Motors a eu le mérite d’enchanter les investisseurs, puisque l’action du constructeur français a grimpé jusqu’à 18% en séance, rassurant des analystes inquiets sur les perspectives de croissance. Mais au-delà des raisonnements purement financiers sur la rentabilité future d’un possible ensemble, que révèle ce rapprochement capitalistique ?

La consolidation, une nécessité dans l’automobile de demain

Quelques semaines après la polémique Renault suite à l’ouverture d’une unité de production de très grande taille au Maroc, il y a de quoi se voiler de noir et pleurer en silence la fin de l’automobile française. Et pourtant il faut rappeler aux esprits chagrins que les alliances peuvent se révéler de très bonnes choses, surtout dans un monde comme l’automobile où les marchés matures tels que l’Europe ne sont certainement plus source de croissance et où les économies d’échelle et la réduction de coûts associés sont le seul vecteur de profits.

A ce petit jeu là, les alliances avec des échanges réduits de capitaux sont beaucoup plus profitables pour les deux partenaires parce que plus flexibles, plus respectueuses, que de coûteuses opérations de fusions-acquisitions nourries à grand renfort d’endettement. Elles réussissent d’ailleurs fort bien aux groupes français, que ce soit Air France – KLM dans l’aviation ou Renault – Nissan dans l’automobile.

Face au bal des prétendants,…

En outre, l’histoire récente de PSA foisonne de fusion ou rapprochement avortées qui font plus les affaires des investisseurs et de la presse économique que des salariés ou actionnaires du groupe. En septembre 2009, Jean-Marc Gales, directeur des marques du groupe français, avait dû faire une mise au point, en affirmant qu’il n'y avait pas de discussions en vue d'une fusion avec BMW. Trois mois plus tard, la presse s’enflammait pour la fusion PSA Peugeot-Citroën et Mitsubishi, le quotidien japonais Nikkei rapportant même que Mitsubishi était prêt à laisser PSA prendre entre 30% et 50% de son capital.

…la sagesse de la famille Peugeot

Il faut reconnaître à la famille Peugeot, détentrice de 30% du capital et 46% des droits de vote, une grande sagesse dans son approche de tels partenariats. Ceux-ci ne peuvent se faire qu’en position de force et en pouvant poser ses conditions, dans ce cas il n’y a aucune raison d’en avoir peur. L’exemple le plus connu est l’alliance entre Chrysler et Fiat qui a réussi au-delà des espérances et a contribué à faire sortir Fiat du marasme dans lequel il se trouvait depuis plusieurs années et même à pérenniser des emplois italiens. Mais aujourd’hui le rapport de force entre PSA et General Motors reste très déséquilibré puisque l’américain vaut plus de huit fois le français. La famille Peugeot ne pourraient guère obtenir plus de 3% d’un futur groupe consolidé. Dans ces conditions, du point de vue de Détroit, siège historique de General Motors, PSA risque vite d’être considérée comme une filiale locale plutôt que comme un égal.

De l’importance du Made by France

Une alliance à ces conditions ne ferait que renforcer la mainmise des non-résidents sur les groupes français. Selon le bulletin annuel de la Banque de France sur ce sujet, la capitalisation boursière des 37 entreprises françaises du CAC 40, Arcelor-Mittal, EADS, ST Microelectronics étant situées hors de France, était détenue à 42% par des non-résidents fin 2010. Quelle importance me direz-vous, puisque de toute façon ces grands groupes ont des sites de production réparties à travers le monde, des stratégies fiscales qui permettent de minorer leur imposition en France…

Et bien il semble tout de même essentiel que les entreprises conservent une attache culturelle forte avec leur pays d’origine. Cela leur permet, autant que faire se peut, de garder en ligne de mire la recherche d’un objectif sociétal dans la conduite des affaires de l’entreprise, qui profite aux actionnaires mais dont ne pâtissent pas les salariés, les fournisseurs voire les clients. Tout le monde devrait à cet égard garder en mémoire la résistance de Guy Dollé à l’acquisition d’Arcelor par Mittal Steel en 2006. Guy Dollé, dont les excellents résultats contrastaient avec la faiblesse du salaire - en comparaison de ses pairs cela va sans dire -, avait alors été vilipendé pour son provincialisme, incapable de concevoir la taille critique nécessaire à l’échelle mondiale. Six ans plus tard, la taille critique a accouché de la fermeture de l’aciérie de Gandrange, de l’arrêt de celle de Florange et à faire passer la France derrière l’Espagne en terme de production annuelle d’acier.

La conclusion est donc simple, tout autant que le Made in France, le Made by France même s’il n’est pas réalisé sur le territoire national, doit être encouragé. Alors que l’épargne des ménages est toujours aussi importante et que les besoins des retraites à venir impliquent une nécessaire capitalisation, pourquoi ne pas créer des mécanismes fiscaux incitatifs pour diriger cette épargne vers les actions des ces grands groupes afin de ne pas laisser libre cours aux fonds de pension de retraités anglais, hollandais ou américains pour investir dans le CAC40 et en récolter les substantiels dividendes.

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