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Ras le Pôle ! Quand François Hollande pointe la courbe du chômage, les naïfs regardent son doigt
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Bonnes feuilles

Après eux, comment sauver la France ? Décidément, le quinquennat de François Hollande ne fut qu'une longue succession d'oraisons funèbres. Mort des illusions anticapitalistes de la gauche. Mort de la lutte contre la finance ennemie. Mort d'une reprise économique que la conjoncture internationale rendait pourtant possible. Mort d'une présidence normale. Mort des victimes d'un terrorisme islamiste contre lequel rien d'efficace n'a été entrepris. Mort du parti socialiste, éliminé de ses plus anciens bastions électoraux. Mort politique, enfin, d'un président-candidat qui, cerné par ses anciens ministres, Valls, Macron et Montebourg, n'a même pas pu briguer un nouveau mandat. Il faut désormais faire le bilan sans complaisance de ce qui s'est réellement passé depuis 2012. Manuel Valls et tous ceux qui ont participé aux menées de Hollande vont entreprendre une réécriture de l'Histoire pour tenter de se disculper. Mais les Français ont droit à la vérité. Ce livre met les fossoyeurs face à leur responsabilité. Après eux, notre pays peut encore se relever. Extrait de "Nous, Fossoyeurs : le vrai bilan d'un fatal quinquennat", de Serge Federbusch, publié aux éditions Plon (1/2).

Google et Yahoo, internet

Serge Federbusch

Serge Federbusch est président d'Aimer Paris et candidat à l'élection municipale de 2020. Il est l'auteur de La marche des lemmings ou la 2e mort de Charlie, et de Nous-Fossoyeurs : le vrai bilan d'un fatal quinquennat, chez Plon.

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Pendant quatre ans, François Hollande a pronostiqué l’inversion de la courbe du chômage qui devait signer le succès de sa politique économique. Il espérait que l’amélioration conjoncturelle internationale se fasse rapidement et fortement sentir en France. Et, surtout, il comptait sur la création massive d’emplois subventionnés pour que la presse bien orientée se focalise sur ce succès à bon compte et claironne le brio gouvernemental et la clairvoyance présidentielle. Ne voyant rien venir, il a fini par forcer le trait en janvier 2016 : 500 000 formations supplémentaires, dont le principal mérite est de faire passer les chômeurs de catégorie A en catégorie D ou E, moins commentées. Elles ont été promises pour un coût budgétaire de 1 milliard d’euros.

Ces emplois « bidons » sont en réalité si peu désirés par les chômeurs que, malgré tous les efforts du gouvernement, seules 101 000 personnes supplémentaires en ont bénéficié de mai 2015 à août 2016 : 48 000 en catégorie D et 53 000 en catégorie E. En fait, c’est l’accumulation des handicaps dus à sa propre politique : hausse des impôts, climat de confiance brisé avec le monde des affaires, incapacité à diminuer les dépenses publiques, qui a eu raison de la promesse faite en début de mandat. Tout avait commencé par une interview au Journal du dimanche du 15 avril 2012, à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle : « Le chômage n’est pas une fatalité. Et j’inverserai la courbe. » Le 25 avril 2012, lors d’une conférence de presse, François Hollande reprend cet engagement et précise : « J’accepterai d’être jugé sur cette promesse. » Quatre mois après son élection : le 9 septembre 2012, au 20 heures de TF1, il anticipe un retournement « d’ici un an ». Sitôt la promesse énoncée, elle est toutefois tempérée par les membres du gouvernement. « Je ne sais pas si nous y parviendrons », dit le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, tandis que la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, parle d’« horizon 2014 » 1. Fidèle à ses méthodes d’enfumage, François Hollande réitère tout en repoussant discrètement l’échéance de trois mois : « J’ai moi-même dit que nous avions l’objectif à la fin de l’année 2013 de pouvoir l’inverser mais, d’ici là, nous allons encore subir des augmentations du nombre de demandeurs d’emploi avec toutes les conséquences que cela a. »

Un an jour pour jour après l’engagement initial de François Hollande, le 9 septembre 2013, la fameuse courbe n’a toujours pas changé d’orientation : le nombre de chômeurs sans aucune activité (catégorie A) n’a jamais cessé d’augmenter, et celui des chômeurs toutes catégories confondues (A, B et C) n’a légèrement baissé qu’une fois, en mai 2013 (–3 600 inscrits). Sans ciller, Michel Sapin entend « ne pas jouer sur les mots », renvoyant à la fin de l’année 2013 et affirmant l’importance d’une « inversion durable » de la courbe. Las ! A la fin de l’année 2013, l’inversion est toujours aux abonnés absents, quel que soit le mode de comptage. Afin de masquer l’échec, le gouvernement ne parle plus soudain que de stabilisation et non d’inversion. « Stabiliser, c’est ce que nous avons réussi, [ça] ne suffit pas », lifte Hollande lui-même en décembre 2013. En juin 2014, le récent ministre du Travail François Rebsamen affiche un nouvel objectif : « stabiliser » le taux de chômage en dessous des 10 % en 2014. Il ne sera pas tenu, puisque le chômage reste à 10,5 % à la fin 2014. Cela étant, la reprise mondiale et les créations d’emplois factices finissent malgré tout par pointer leurs museaux. Aussitôt, Hollande théâtralise l’enjeu en se fixant une nouvelle échéance… quatre ans après l’objectif initial ! Mais c’est encore et toujours la même méthode : compter sur l’absence de mémoire des électeurs et la passivité des médias pour escamoter ses échecs. « Si le chômage ne baisse pas d’ici 2017, je n’ai aucune raison d’être candidat », dit Hollande le 18 avril 2014, lors d’un déplacement dans une usine Michelin. Cependant, aux auteurs du livre Le Pari, il explique, courant 2015, que l’évaluation de sa promesse se fera sur « une tendance », « une ambiance » (2). On se croirait dans une boîte de nuit ou sur un podium de défilé de mode. En mars et avril 2016, la décrue semblait enfin s’amorcer. Mais à quoi était-elle vraiment due ?

Outre l’environnement international, il convient en effet d’évaluer l’impact des dispositifs d’emplois aidés pour apprécier la réalité de cette baisse. Si l’on observe ainsi le chiffre du mois d’avril 2016, dont le gouvernement a pu enfin se gargariser, il conjugue le niveau le plus bas des sorties pour reprise d’emploi (18,4 %), le niveau le plus élevé d’entrée en stages (10 %) et un des plus hauts niveaux de sorties pour radiation administrative ou défaut d’actualisation (54,1 %). Toute l’astuce a en effet consisté à orienter le débat sur l’évolution de la courbe pour éviter qu’on n’aborde la question de la nature réelle des emplois obtenus par ceux qui étaient sortis de la catégorie A du chômage. Les socialistes français aiment depuis des décennies se sentir puissants en créant des emplois aidés quand, parallèlement, leur politique administrative et fiscale en détruit dans le secteur privé. Les désarrois de l’industrie et le destin des cols bleus leur importent moins que la prolifération de cols blancs dans le secteur public. Un blog hébergé par le site AgoraVox a fait l’effort ô combien fastidieux de reprendre mois après mois les données officielles, catégorie par catégorie, type de contrat par type de contrat, en y ajoutant le chômage déguisé. Le résultat est proprement terrifiant. En avril 2016, 6 429 900 personnes étaient privées d’emploi ou réduites à l’état de travailleurs occasionnels plus ou moins officieux, toutes catégories confondues. Chômeurs auxquels il faut ajouter 4 030 000 environ d’« invisibles » qui n’entrent pas ou plus dans les statistiques. Au total, on atteint alors 10,4 millions de chômeurs ou sous-employés en France. S’agissant des radiations des listes de Pôle Emploi, elles s’élèvent en moyenne mensuelle pour le premier trimestre 2016 à 337 700.

Les reprises d’emploi déclarées ne sont que de 97 000, soit 18,4 % des sorties de listes. En juillet 2016, mêmes causes, mêmes punitions, l’auteur du blog reprend ses calculs et montre comment le chômage réel continue inexorablement sur sa pente ascendante (3). Ce mois-là, il dénombre 12 700 chômeurs supplémentaires malgré 326 100 radiations, un record terrifiant ! Enfin, le 26 septembre 2016, tombent les chiffres qui douchent définitivement les espoirs de redressement : le chômage augmente brutalement dans toutes les catégories : 5 518 000 (A, B, C) ; 325 000 en D et 432 000 en E, soit un total astronomique de 6 275 000 personnes non ou superficiellement employées en métropole et dans les DOM-TOM. Entrons dans les détails. Quels étaient donc les demandeurs d’emploi par catégories en avril 2016, où une comparaison exhaustive peut être faite ? A : 3 511 000 (–0,6 % sur un an). B : 722 200 (+3,9 % sur un an), travailleurs pauvres de moins de 78 heures. C : 1 163 700 (+5,1 % sur un an), travailleurs pauvres de plus de 78 heures. D : 280 600 (+1,2 % sur un an), stages parking (dits de reconversion ou de mises à niveau), etc. E : 422 100 (+11,5 % sur un an), contrats aidés, etc. Au total, au moment précis où François Hollande proclame que « ça va mieux », 6 099 600 individus hors DOM-TOM sont au chômage total ou partiel, soit + 1,8 % sur un an. Ils sont 6 429 900 DOM-TOM compris. Le chômage de longue durée (entre deux et trois ans) a augmenté de 1,7 % sur un an et celui de très longue durée (plus de trois ans) de 11,3 %. Le sous-emploi des plus de 50 ans a augmenté de 6,4 % sur cette même période de douze mois. Ajoutons qu’un chômeur inscrit à Pôle Emploi sur deux (49,6 %) ne perçoit aucune forme d’aide ou indemnité. Enfin, ne sont pas comptés dans ces 6 429 900 demandeurs d’emploi et travailleurs occasionnels 1 530 000 foyers bénéficiaires du RSA. Sur 2 530 000 foyers, seuls 1 000 000 environ sont inscrits à Pôle Emploi, les autres bénéficient d’autres suivis (associations, collectivités locales, etc.). Plus encore, 1 100 000 individus sur les 2 millions de bénéficiaires de l’allocation pour adultes handicapés ou d’une pension d’invalidité ne sont pas recensés par Pôle Emploi, malgré une aptitude et un désir d’accès à un emploi adapté. Et c’est sans parler des innombrables sans droits et autres retraités précaires dont beaucoup aimeraient arrondir leurs maigres pensions et qui pourraient encore physiquement travailler. Bref, la France de Hollande est frappée par un mal qui ne cesse d’empirer en dépit des dispositifs cosmétiques surexploités.

1.       http://www.lepoint.fr/politique/baisse-du-chomage-dans-un- an- ayrault-je-ne-sais-pas-si-nous-y-parviendrons-19‑09‑2012‑1507783_ 20.php

2.       Bastien Bonnefous et Charlotte Chaffanjon, Le Pari, Plon, mars 2016.

3.       http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/vraischiffres-chomage-juillet-183976

Extrait de Nous, Fossoyeurs : le vrai bilan d'un fatal quinquennat, de Serge Federbusch, publié aux editions Plon. Pour l'acheter, rendez-vous sur ce lien.

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