Mais comment Manuel Valls en est arrivé à ce destin à la Sarkozy sans être passé à l’Elysée<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
 Mais comment Manuel Valls en est arrivé à ce destin à la Sarkozy sans être passé à l’Elysée
©SEBASTIEN BOZON / AFP

De l’homme d’avenir au tout sauf Valls

Ligne politique autoritaire face à une gauche Terra Nova, lois impopulaires comme la déchéance de nationalité ou loi Macron, les raisons ne manquent pas pour expliquer la baisse de popularité de Manuel Valls qui est passé du statut d'Homme providentiel pour réinventer la gauche à l'enfariné de service.

Olivier Rouquan

Olivier Rouquan

Olivier Rouquan est docteur en science politique. Il est chargé de cours au Centre National de la Fonction Publique Territoriale, et à l’Institut Supérieur de Management Public et Politique.  Il a publié en 2010 Culture Territoriale chez Gualino Editeur,  Droit constitutionnel et gouvernances politiques, chez Gualino, septembre 2014, Développement durable des territoires, (Gualino) en 2016, Culture territoriale, (Gualino) 2016 et En finir avec le Président, (Editions François Bourin) en 2017.

 

Voir la bio »

Atlantico : Le candidat Manuel Valls a subi une flagrante baisse de popularité. Mais pourquoi ? Est-ce son positionnement autoritaire contre une gauche type terra nova ? L'absence de résultats sur les questions sécuritaires ou de chômage,  des lois impopulaires comme la déchéance de nationalité…  Quelles sont les raisons de ce déclin ?

Oulivier Rouquan : Premier point, l’image de Manuel Valls n’est pas exécrable. Il y a 6 mois, 44% des enquêtés sympathisants de gauche en gardaient une bonne appréciation (Viavoice, Libération, juin 2016). Il restait en novembre, le premier classé par les sympathisants de gauche pour incarner la fonction présidentielle – après… Alain Juppé (Louis Harris, novembre 2016). Son dynamisme, ses convictions, son honnêteté, sa détermination sont bien évalués (OpinionWay, janvier 2017). Il est vrai cependant que la loi El-Khomri d’une part, l’épisode de la déchéance d’autre part, ont coûté à l’ancien Premier ministre, surtout auprès des sympathisants de la gauche.

Second point, l’usure du pouvoir n’épargne pas un chef de Gouvernement sortant ; la règle vaut depuis très longtemps : Lionel Jospin en dépit d’un bilan jugé très honorable a rapidement perdu en « popularité » entre 2001 et 2002. Il s’agit d’une « mécanique » institutionnelle : la position de sortant rend comptable d’un bilan, qui grève une campagne. Elle éloigne des citoyens et va à l’encontre d’un sentiment de proximité… Manuel Valls n’a donc pas laissé suffisamment de temps, entre son départ de Matignon et le début de la primaire, temps qui lui aurait été utile pour entreprendre une régénération par l’ascèse.

Contrairement à Emmanuel Macron, l'ancien chef de gouvernement n'a pas observé de temps de césure dans la vie politique entre son départ de Matignon et sa candidature à l'élection présidentielle. Est-ce que cela a pu lui porter préjudice ?

 Ce point est complémentaire du précédent. Manuel Valls, n’assumant pas une sorte de traversée du désert, n’a pas travaillé un projet clairement distinct de son action gouvernementale. Dans les enquêtes d’opinion sur la primaire, il est attractif auprès des sympathisants PS et de gauche pour sa personnalité et son aptitude à gagner, mais moins pour l’originalité de ses propositions. Les débats de la primaire lui auront peut-être permis de renforcer ce point.

Si la comparaison avec Emmanuel Macron est faite, remarquons que ce dernier, parti plus tôt de la gestion des affaires pour se préparer, essuie pourtant la critique sur le flou de ses propositions… L’installation de sa pré-campagne a été fondée sur quelques « saillances » et un art certain de la figuration, mais moins jusqu’à aujourd’hui, sur la présentation d’un projet cohérent d’action. Cependant, son départ du Gouvernement a libéré l’ancien ministre de l’économie et inspirateur de la loi El-Khomri, de la charge publique et de l’imputation de responsabilité qui est son corollaire…

Est-ce que, au final, on ne reproche pas à Manuel Valls la même chose que l'on reprochait à Sarkozy, à savoir sa personnalité et non pas ses idées ou sa ligne politique ?

Comme dit plus haut, sa personnalité ne suscite pas dans l’opinion publique un rejet de même nature et de même niveau que Nicolas Sarkozy au sortir du pouvoir. Manuel Valls a débuté sa campagne en apparaissant très tendu ; peu à peu, il figure comme étant légèrement plus serein. A l’instar de tout un chacun, il a les défauts de ses qualités : ainsi en fonction du trend dominant de commentaires, Manuel Valls peut paraître « ferme et déterminé » … ou « autoritaire et nerveux » ! Avec Lionel Jospin en quelques mois, l’on était passé de « sérieux et efficace »… à « ennuyeux et austère ». La circulation médiatique de ces perceptions indique à quel point la bulle de la communication politique est affaire d’influences et d’impositions d’effets de cadrage. A cet égard, est diffusée depuis plusieurs années, l’idée que Manuel Valls serait un « Sarkozy de gauche », comme vous le rappelez. En fait, cette comparaison est bien sûr un handicap pour le candidat à la primaire ; elle est donc établie avec des arrière-pensées.

Sur le fond, Manuel Valls en se basant sur la perception des attentes et de l’opinion, nourri de sa gestion de la crise terroriste et donc de son expérience gouvernementale, insiste sur l’enjeu de la laïcité et de la sécurité. Il livre une conception assez verticale et homogène du pacte Républicain. Cette vision ne rassemble pas l’ensemble de la gauche… Mais lors des débats de la primaire, les candidats ne se sont pas trop écharpés sur ce thème. Si bien que Manuel Valls a neutralisé pour l’instant, une figuration clivante de cet enjeu. Elle l’eût fait apparaître comme trop autoritaire à une grande partie de l’électorat de gauche. Pour autant, la trace de son style gouvernemental qui a pu être considéré comme brutal n’est pas effacée…

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !