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Bis repetita : l’Autriche confrontée à une vague d’agressions sexuelles du nouvel an à l’image de celle de Cologne l’an passé
©Reuters

THE DAILY BEAST

Tandis que la police allemande disait que les « Nafris » (Nord-Africains) étaient sous contrôle à Cologne cette année, « des hommes au look latino » se déchaînaient à Innsbruck. Peur et racisme sont en hausse.

Josephine  Huetlin

Josephine Huetlin

Joséphine Huetlin est une journaliste freelance qui rédige notamment des article pour The Daily Beast. 

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The Daily Beast parJosephine Hüetlin

BERLIN - Juste avant le passage dans l’année 2017, à Innsbruck, une élégante station de sport d’hiver des montagnes autrichiennes, une foule de 25.000 personnes est rassemblée sur la place du marché pour regarder les feux d'artifice au son d'une valse. Au même moment, quelque chose se passe, qui, selon l'inspecteur en chef Ernst Kranebitter "n’est jamais arrivé ici."

Alors que l'hystérie commence à monter, et que la foule devient plus dense, plusieurs femmes sur la place disent avoir été encerclées par des groupes de cinq ou six hommes, qui dansent autour d'eux, puis touchent leurs seins et leurs entre-jambes. Le reste de la foule ne remarque rien.

"Nous estimons que toutes ces agressions ont été perpétrées par le même groupe. Les agressions ont été systématiques", précise Kranebitter.

Les 18 femmes qui se sont plaintes à ce jour, dont la plupart ont entre 19 et 25 ans, ont décrit leurs agresseurs comme ayant une apparence étrangère ("Südländischer Typ"  qui se traduit par une "apparence typée du sud"). Certains avaient des barbes, il manquait une dent à l’un, un autre avait les cheveux hérissés avec des pointes blondes.

Ces informations sont un choc pour Innsbruck, une ville universitaire qui est moitié kitsch, moitié conservatrice, le genre d'endroit où les gens ne verrouillent pas la porte de leur maison quand ils sortent. La dernière fois que l'inspecteur Kranebitter a dû répondre aux questions de la presse nationale, c’est lorsque que l'ex-Miss Autriche est morte mystérieusement après être tombée d'un pont dans la montagne. Et cette fois, il n’a rien à montrer. Les photographies que les victimes ont fait de leurs agresseurs se sont révélés floues et inutilisables. Les images des caméras de vidéosurveillance dans le centre d'Innsbruck ne sont pas enregistrées.

L'incident rappelle les attaques de Cologne l'année dernière, où, de la même manière, des groupes d'hommes réunis dans le centre de la ville ont encerclé des femmes. Par contre à Cologne, il y a eu environ 1 200 femmes agressées, et certaines ont été violées.

Alors que 662 femmes ont déposé plainte pour agression sexuelle et 28 pour viols, il n’y a eu que deux hommes condamnés . Plus d'une centaine de plaintes ont été classées faute de preuves suffisantes (l'Allemagne a depuis réformé ses lois sur le viol) ou parce que les personnes accusées, qui seraient des réfugiés en provenance d'Afrique du Nord et au Moyen-Orient, ont disparu.

Les conséquences ne se sont pas limitées à Cologne. La police autrichienne a gratuitement confié 6 000 alarmes de poche à des femmes dans la perspective du Nouvel An cette année. "Nous voulons que la population se sente en sécurité", dit un porte-parole de la police. On ne sait pas si certaines de ces alarmes ont été confiées ou utilisées à Innsbruck.

Un policier de Salzbourg a déclaré au journal autrichien Der Standard que la police locale avait reçu beaucoup d'appels de femmes inquiètes, demandant, par exemple, si elles peuvent encore aller faire du jogging.

Cette année, pas de scènes chaotiques qui se sont déroulées en face de la gare centrale de Cologne il y a un an. Et la police a tweeté une photo montrant des centaines de jeunes hommes aux cheveux noirs entourés par des policiers, qui les ont mis en garde : "Comportez-vous correctement ou rentrez chez vous".

La photo était accompagnée de cette légende : "#SafeinCologne: plusieurs centaines de Nafris (diminutif de Nord-Africains) contrôlés à la gare centrale. Infos à suivre".

"Nafri", le diminutif utilisé par la police pour parler des Nord-Africains, a laissé beaucoup de gens perplexes ou indignés, ou les deux. Jan Böhnerman, un comique allemand, a tweeté : "Quelle est la différence entre un Nafri et un Nègre ?".

Le chef de police Jürgen Mathies s’est ensuite excusé pour avoir utilisé le terme "Nafri", affirmant que ce n’est absolument pas une insulte raciste. Il a repoussé les accusations de contrôle au faciès expliquant que la police avait reçu des informations sur les intentions de certains des hommes qui sont venus à la gare.

Mais la polémique n’est pas retombée en Allemagne. Cette semaine, la patronne des Verts, Simone Peter, a félicité la police pour son travail, tout en ajoutant : "Néanmoins, une question se pose au sujet de la proportionnalité et de légalité, si près de 1 000 personnes ont été contrôlées et une partie d’entre elles interpellées, au vu de leur seule apparence ".

Le journal Flensburger Tagesblatt écrit : "Plutôt que des critiques, les policiers ne méritent qu'une chose : des remerciements", tandis que la journaliste Tina Hassel a tweeté : "Comment peut-on se permettre de critiquer l'opération de la police à Cologne maintenant ?" Même les propres membres du parti de Simone Peter se dépêchent de prendre leurs distances face aux propos de leur patronne.

Cette année, les 50.000 personnes qui sont venues saluer l’arrivée de la nouvelle année entre la gare et la cathédrale de Cologne ont pu profiter, selon les mots du maire de la ville, d’une "atmosphère, qui rétabli la confiance des habitants de Cologne" sous l’oeil de 1 500 officiers de police, équipés de gilets fluorescents jaunes.

Espérant peut-être sauver l'ambiance, l'artiste berlinois Philipp Geist a mis à disposition des craies de couleur sur la place devant de la cathédrale de Cologne. Elles ont été utilisées pour écrire des mots comme :"inquiétude", "désir", "solidarité", "droits de l'homme" et "tolérance".

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