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Coup de chaud sur la campagne présidentielle : après l’attentat de Berlin, 94% des Français jugent la menace terroriste élevée en France
©AFP

Info Atlantico

Ce baromètre Ifop pour Atlantico montre une nouvelle fois que tout événement terroriste survenant dans un environnement proche réactive chez les Français, de manière significative, la perception de la menace terroriste, et ce sur l'ensemble du territoire, quelle que soit la formation politique.

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Atlantico : Quels sont les principaux enseignements que l'on peut tirer de ce nouveau baromètre Ifop pour Atlantico au sujet de la perception de la menace terroriste par les Français ? 

Jérôme Fourquet Aujourd'hui, nous sommes toujours sur un sentiment très répandu que la menace terroriste en France est "élevée", pour 94% des Français. Ils sont 50% à considérer cette menace comme "très élevée", soit cinq points supplémentaires par rapport à la dernière mesure qui date d'il y a deux mois environ. Cette hausse est consécutive, bien évidemment, de ce qui est survenu à Berlin il y a quelques jours. On a pu constater une hausse du même ordre au printemps dernier, après les attentats de Bruxelles. On voit bien que, dans un climat où la population française est particulièrement inquiète et consciente de la menace, tout événement terroriste intervenant dans un environnement proche réactive cette perception. De la même façon, nous avions vu en septembre, au moment où un attentat à la voiture piégée avait été déjoué à proximité de Notre-Dame à Paris, que cet évènement avait faire remonter la perception d'une menace terroriste imminente, et de manière encore plus forte d'ailleurs que ce qui est observé dans ce nouveau baromètre.

L'intensité de la menace est perçue de manière similaire aussi bien dans les communes rurales (48%) qu'en région parisienne (52%). Cela montre que ce sentiment est très largement diffusé sur l'ensemble du territoire ; ainsi, les habitants de la région-capitale ne sont pas les seuls à se sentir exposés.

Le score relatif à la perception de la menace terroriste en France est très élevé chez les sympathisants de n'importe quelle formation politique. Néanmoins, ce sentiment est encore plus significatif chez les sympathisants du FN qui sont 62% à considérer cette menace comme "très élevée", alors que ce chiffre tourne autour de 50 % en moyenne pour les sympathisants des autres principales formations politiques. 

Quelles conséquences politiques peut avoir cette perception élevée/très élevée de la menace terroriste en France par les Français ? Quelle pourrait en être la traduction dans le débat public ? 

Ce sentiment est perçu chez les Français, comme nous l'avons vu, de longue date, au moins depuis 2015. Ainsi, la société française a basculé dans un nouveau climat qui a des répercusisons à la fois politiques et éventuellement électorales, mais aussi très concrètes : on peut penser notamment à la décision qui a été prise d'armer, de manière assez générale, les polices municipales, alors que c'était un vieux serpent de mer du débat sur la sécurité en France. Nous avons également assisté au vote de plusieurs lois par le Parlement, renforçant l'arsenal sécuritaire, et ce en-dehors aussi de la période de l'état d'urgence, notamment le renforcement de sanctions vis-à-vis de personnes suspectées d'être en lien avec le djihadisme ; des pouvoirs de perquisition, d'écoute, d'enquête et d'investigation - qui n'avaient jamais été accordés jusque-là aux policiers - ont également été donnés par ces lois. A la suite du mouvement de protestation lancé au sein de la police nationale - qui s'inscrit dans ce contexte de menace terroriste très aigüe -, le gouvernement a annoncé qu'il allait aligner les conditions de la légitime défense pour les policiers sur ce qui est déjà en vigueur chez les gendarmes, une revendication historique des policiers obtenue à la faveur de ce contexte tout à fait nouveau. La traduction législative de tout cela, c'est la prolongation de l'Etat d'urgence. En termes d'opinion, plusieurs sondages réalisés précédemment pour Atlantico ont montré qu'une partie significative de Français sont favorables à l'internement préventif des fichés S, mais également à l'instauration de la perpétuité pour des personnes condamnées pour fait de terrorisme. 

L'exécution par la police italienne de l'auteur présumé de l'attentat de Berlin - qui aurait peut-être transisté, d'après les premiers éléments de l'enquête, par la France via Chambéry - révèle une fois de plus le caractère global de cette menace dont ont conscience les Français. De fait, je pense que nous allons relancer le débat sur le contrôle aux frontières, la coopération entre les forces de police européennes, etc. 

Si l'on considère le cas du PNR, un nombre important de parlementaires européens ont manifesté des réticences à l'égard de ce fichier depuis une dizaine, voire une quinzaine d'années. Or, à la suite des attentats de Paris et de Bruxelles, un certain nombre de ces verrous psychologiques et idéologiques ont cédé. Au fur et à mesure que cette menace va s'installer et se révéler réelle en France et chez nos voisins européens, tout un ensemble de conséquences politiques et idéologiques vont en découler. Si l'on pousse l'analyse jusqu'au bout, la victoire de François Fillon sur Alain Juppé est une traduction de cette nouvelle période dans laquelle nous sommes. Francois Fillon a fait des propositions économiques très libérales, mais il a aussi écrit un livre, Vaincre le totalitarisme islamique, qui lui a permis de se relancer dans la campagne. Du côté du PS, les difficultés que connaît aujourd'hui Manuel Valls, bien qu'elles se cristalisent sur la loi Travail et le 49.3, ont à voir également avec la déchéance de nationalité pour des faits de terrorisme, proposée par François Hollande et soutenue par Manuel Valls à la suite des attentats du 13 novembre. On voit les conséquences politiques de cela sur une gauche fracturée sur ce type de question. Pour ce qui est du FN, après ce que certains ont qualifié de "cure médiatique", le parti a repris de la voix depuis l'élection de François Fillon - qui décèle en lui une menace potentielle - et s'est largement exprimé sur les attentats de Berlin, ressortant ainsi leurs arguments habituels : critique de la politique d'Angela Merkel, jugée irréaliste et irresponsable, d'accueillir un million de migrants et d'ouvrir les frontières, critique de l'espace Schengen, critique de l'immigration, etc. Tout ceci a donc des effets directs sur le débat politique. 

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