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Macron, Mélenchon, NKM ou même Sarkozy : le test "qui choisir" dans le match des candidats anti-système
©Pascal Rossignol / Reuters

Rebelles autoproclamés

Alors que Donald Trump a été élu président des Etats-Unis, de nombreux candidats potentiels à l'élection présidentielle française revendiquent eux aussi un positionnement anti-système. Au regard de l'opinion publique, une telle attitude pourrait s'avérer payante.

Atlantico : A la suite de la victoire de Donald Trump, plusieurs candidats ont laissé entendre qu'ils pouvaient représenter le renouveau de la classe politique, voire qu'ils étaient eux-mêmes des candidats "anti-système". Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon, Arnaud Montebourg ou encore Nicolas Dupont Aignan, Nathalie Kosciusko-Morizet, Marine Le Pen... Quels sont les critères qui permettent de définir une attitude et un positionnement "antisystème" ? Comment les électeurs peuvent-ils se représenter un tel positionnement ?

Maxime Tandonnet : Nous assistons, à la suite de l'élection de Donald Trump, à un phénomène assez paradoxal. D'une part, les médias, les commentateurs décrivent cette élection comme d'essence quasi diabolique, le triomphe du populisme contre l'idéologie dominante des élites dirigeantes et intellectuelles. Mais d'autre part, une grande partie du monde politique, de droite ou de gauche, veut s'inspirer du modèle Trump, la dernière mode en politique: l'antisystème ou supposé tel. Mais pour comprendre ce phénomène, il faut d'abord définir ce qu'on entend par "le système'". On peut l'analyser à deux niveaux.

D'abord il se définit comme l'ensemble des institutions, de l'idéologie, des valeurs dominantes dans les élites médiatiques, politiques et intellectuelles. Aujourd'hui, en ce sens, la représentation du "système" porte sur les bienfaits de la mondialisation, de l'ouverture, de la diversité, le culte des minorités, de la mobilité planétaire et de l'effacement des frontières. Ce idéologie dominante dans les élites médiatique, autrement dit le "politiquement correct" a été  fortement incarnée par Mme Clinton, jusque dans son discours de candidate battue. Elle s'opposerait ainsi au "populisme", sensibilité dominante dans le peuple, la majorité silencieuse, fondé au contraire sur l'idée de retour à la Nation, un repli sur l'identité. Sur cette base, en se fondant sur le sens le plus commun du mot, les "antisystèmes" seraient les adversaires d'une certaine idéologie dominante. Etre "antisystème" reviendrait à prôner le retour à la Nation et au peuple  contre la "globalisation", l'identité contre la diversité, les frontières contre l'ouverture. Dans cette optique, M. Trump serait la quintessence d'un antisystème, comme les politiques français s'inspirant de son modèle.  Sa victoire représenterait un basculement idéologique, le premier grand revers de la vision mondialiste depuis la fin de la guerre froide en 1990 : d'où l'aversion qu'elle suscite auprès des élites médiatiques et intellectuelles.

Cependant, cette manière de voir les choses, la plus habituelle, ne répond pas vraiment à la question et se cantonne au superficiel. Elle semble évidente mais elle est artificielle et fausse. Il existe une autre façon de comprendre les termes de système et d'antisystème, au second degré. De fait, à quoi ressemble la vie politique aujourd'hui? Partout dans le monde occidental, à une surenchère de la communication, de la parole, de la provocation, du culte des images, toujours plus éloignée du monde réel. Peu importe le fond: c'est la provocation qui compte, celle qui permet de forcer l'attention médiatique. Dès lors, M. Trump, tout en cultivant un style anti-système, serait la quintessence du système. Il a fait campagne sur des coups médiatiques, des provocations parfois violentes destinées à marquer une rupture avec le "politiquement correct". En flattant le peuple, il porte la manipulation de ce dernier au plus haut niveau. Déjà, à la suite de son élection, certaines de ses propositions les plus délirantes, sur la base desquelles il a été élu, auraient été retirées de son site Internet de campagne! C'est tout dire! Le phénomène est sans précédent à ce niveau. En France, la politique suit cette fâcheuse tendance à fuir le réel dans la provocation. En cela M. Trump est bien à la mode. Le système politique est d'abord dominé par le culte de la parole, de la communication, de la provocation, de la médiatisation et de la manipulation de masse. La personnalisation à outrance de la vie politique est le paroxysme de ce phénomène. On ne se bat plus pour des idées ou un projet, mais pour une image médiatisée, un visage une voix, un style. Les slogans remplacent les idées et les provocations sans lendemain se substituent aux projets. Peu importe ce qu'il en restera dans la confrontation avec la réalité. Le réel s'efface devant le rêve.

L'antisystème serait au contraire, dans mon idée, le retour au réel et à la volonté de gouverner, de choisir, de décider, une forme de discrétion et de modestie, d'effacement du "moi-je" et de réhabilitation de l'intérêt général comme but de la politique. L'antisystème, aujourd'hui, défendrait la vérité et la politique des réalités. 

On remarque que ces positionnements concernent à la fois des figures politiques de droite et de gauche. Pourriez-vous nous décrire, pour chacun d'eux, l'offre politique qu'ils représentent ? 

M. Macron, Mme NKM se veulent à leur manière des antisystèmes qui remettent en cause les fondements de leur propre parti. De fait, ils existent avant tout par des petites phrases qui ont défrayé la chronique! Ils sont bien à cet égard des représentants typiques du système... Le courant lepéniste est depuis plusieurs décennies, construit sur la personnalisation du pouvoir, sur le jeu des provocations verbales et d'une forme d'hyper médiatisation autour d'un nom, de silhouettes, de visages. Là aussi, il est l'un des grands précurseurs du système, au cœur même du système politico-médiatique. M. Montebourg est une personnalité intéressante: flamboyant, il apporte un style personnel très marqué, même si ses idées n'ont rien de bien révolutionnaire. Tout est dans l'image, la communication. M. Mélenchon est aussi un personnage très singulier, représentant d'un phénomène où les idées s'incarnent dans un homme, un style, un visage. De tous ceux que vous m'avez cité, le plus authentique anti-système serait peut-être M. Dupont Aignan. Il n'est pas dans une logique de surmédiatisation de sa personne, ni de provocation ou de surenchère verbale. Il a quelques idées forces, autour du gaullisme, une tradition aujourd'hui délaissée. Mais en refusant le jeu  de la surmédiatisation et de la provocation, il peine à percer dans l'opinion et à se faire connaître... Tout le paradoxe de la politique actuelle est là: le véritable anti-système, celui qui refuse la logique de la surmédiatisation et de la dictature des provocation, donc la "trumpisation" est-il condamné à l'échec? Pour l'instant, on peut le craindre... 

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