Pasteurdon : les scientifiques français progressent dans la recherche contre les bactéries résistantes aux antibiotiques <!-- --> | Atlantico.fr
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Les antibiotiques "intelligents" reprogramment le CRISPR pour qu'il aille couper spécifiquement des gènes de résistance aux antibiotiques ou des gènes de virulence. On déclenche donc une réaction auto-immune de la bactérie, qui la force à se "suicider".
Les antibiotiques "intelligents" reprogramment le CRISPR pour qu'il aille couper spécifiquement des gènes de résistance aux antibiotiques ou des gènes de virulence. On déclenche donc une réaction auto-immune de la bactérie, qui la force à se "suicider".
©Reuters

Antibiotiques intelligents

Alors que les bactéries sont aujourd'hui de plus en plus résistantes aux antibiotiques, des chercheurs français travaillent sur des techniques permettant de rendre les antibiotiques plus "intelligents". Actuellement en pleine période d'appel aux dons (jusqu'à ce dimanche), l'Institut Pasteur est à la pointe de ces recherches.

David Bikard

David Bikard

David Bikard est directeur du laboratoire Biologie de synthèse à l'Institut Pasteur et directeur scientifique de la start-up Eligo Bioscience, incubée à l'Institut Pasteur.

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Atlantico : Vous êtes chef du laboratoire Biologie de synthèse à l'Institut Pasteur et travaillez notamment à la mise en place d'antibiotiques "intelligents". Pouvez-vous nous présenter brièvement vos travaux ?

David Bikard :Le sujet principal de travail de mon laboratoire concerne les CRISPR. Derrière ce nom barbare se cache un système que les bactéries utilisent pour se défendre contre les phages, les virus antibactériens. Les CRISPR font pas mal de bruit en ce moment car il y a énormément d'applications en biotechnologie, notamment en thérapie génique. Ce qui a déclenché toute une vague d'applications avec ces CRISPR, c'est la découverte de ciseaux à ADN (appelées nucléases) que l'on est capable de reprogrammer très facilement. Avec ces nucléases, nous pouvons couper n'importe quelle séquence d'ADN extrêmement facilement.

D'une manière un peu plus générale, nous travaillons dans mon laboratoire sur les mécanismes que les bactéries utilisent pour se défendre contre les phages. Nous essayons aussi d'utiliser ces mécanismes, dont les CRISPR, pour aller combattre les bactéries pathogènes et résistantes aux antibiotiques.

Le principe de nos antibiotiques "intelligents" est de reprogrammer le CRISPR pour qu'il aille couper spécifiquement des gènes de résistance aux antibiotiques ou des gènes de virulence. On déclenche donc une réaction auto-immune de la bactérie, qui la force en réalité à se "suicider".

Le développement de la résistance des bactéries rend-il les antibiotiques de moins en moins efficaces aujourd'hui ?

Bien sûr, il y a de plus en plus de résistance aux antibiotiques, et c'est un phénomène largement documenté. Ce problème est connu depuis bien longtemps. Déjà en 1945, Alexander Fleming qui avait découvert la pénicilline (le premier antibiotique) avait mis en garde contre la résistance. Il avait bien vu dans ses expériences qu'il sélectionnait les bactéries résistantes, mais en réalité jusque dans les années 1970-1980, on découvrait toujours de nombreuses et nouvelles molécules antibiotiques. On avait donc toujours de nouvelles molécules à utiliser, et la résistance n'était donc pas vraiment un problème. Or, il n'y a eu presque aucun nouvel antibiotique introduit sur le marché au cours des 30 dernières années, et pendant ce temps-là les résistances s'accumulent de plus en plus rapidement. Cela devient donc très problématique.

L'Institut Pasteur effectue un appel aux dons jusqu'à ce dimanche pour soutenir financièrement la recherche (Pasteurdon). La générosité des particuliers est-elle indispensable aujourd'hui au secteur de la recherche française ?

Cela joue clairement un rôle très important. La plupart des grandes découvertes ne sont pas issues de travaux de recherche appliquée, mais de travaux réalisés pour comprendre des phénomènes physiques ou biologiques. C'est une recherche qui, forcément, est financée par de l'argent public et par les dons. À l'Institut Pasteur, cela représente une part importante du budget et contribue grandement au fait que l'on travaille dans de très bonnes conditions, tout à fait compétitives avec les meilleurs instituts de recherche au monde.

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