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La chorégraphie Sarkozy Merkel déplaît beaucoup moins à Londres qu'auparavant
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From Britain, with love

L'interview commune du chef d'Etat français et de la chancelière allemande de lundi soir vue par le correspondant de la BBC en France.

Hugh Schofield

Hugh Schofield

Hugh Schofield est correspondant en France pour la BBC.

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Atlantico : La chancelière Angela Merkel a présidé lundi le 14e conseil des ministres franco-allemand avec Nicolas Sarkozy, et en a profité pour apporter un soutien appuyé au Président français. Qu'ont pensé les Britanniques de cette journée de lundi où le couple franco-allemand s'est une fois de plus mis en scène ? 

Hugh Schofield : Je suis correspondant en France depuis plus de 20 ans, et le constat reste toujours le même : les relations entre la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ne peuvent être appréhendées que sous la forme d'un triangle conflictuel.

Autrement dit, si un axe marche bien, cela signifie nécessairement que les deux autres en pâtissent. Si pour certains, l'embellie des relations franco-allemandes signifie un échec de la Grande-Bretagne, je ne suis pas sûr pour ma part ni de comprendre ni de cautionner pareille logique. Dans tous les cas, elle me semble totalement caduque. Si les Britanniques ont longtemps tiré profit des tensions au sein du couple franco-allemand, c'est désormais pour le bien de la Grande-Bretagne et du Premier ministre David Cameron que "l’axe central" de l’UE fonctionne. De cette entente dépend directement la bonne santé de tout le Royaume-Uni.


Le couple franco-allemand a par ailleurs répondu de concert aux questions de David Pujadas pour France 2 et de Peter Frey pour la ZDF durant le 20 heures. Qu'avez-vous retenu de cette interview ?

H.S : Beaucoup a été écrit sur l'incompatibilité profonde, voire personnelle, entre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. Force est toutefois de constater que d’une relation à l’origine difficile, pour ne pas dire conflictuelle, ils ont réussi à un construire un "quelque chose", une entente nouvelle.

Mieux, le simple fait que ces dirigeant ne s'entendent pas sur le plan personnel, mais réussissent à s'entendre au nom du bien de l'Europe, donne à leur collaboration une dimension quasi exceptionnelle. C'est très impressionnant.

Tout au long de cette interview, j'ai eu le sentiment d'un véritable désir d'entraide entre le couple franco-allemand. La seule façon dont Angela Merkel a balayé la question de David Pujadas sur une éventuelle réunion avec François Hollande ne laisse pas place au doute. Elle rejette d'ores et déjà la politique socialiste, et leur volonté de réformer le traité européen portant sur le pacte budgétaire. Même si cela n'est pas forcément en mesure de secourir Nicolas Sarkozy dans les sondages d'intention de vote, elle a fait son devoir !


Il n'y aurait donc plus de dissension au sein du couple franco-allemand ?

H.S : Certes, ils s'efforçaient de parler d'une seule voix, mais n'oublions qu'il s'agissait pour beaucoup d'une sorte de chorégraphie "vocale". Pour preuve, les efforts ont été fournis pour vanter à la fois le modèle allemand et français. D'un côté, les avantages du système économique outre-Rhin ont été soulignés, et de l'autre, les louanges du système familial ou énergétique français n'ont pas été oubliées. 

L'essentiel de cette chorégraphie peut ainsi être résumé, mais ne leur en tenons pas rigueur, politesse oblige !

Ce rapprochement est-il dommageable pour la position de la Grande-Bretagne au sein de l'Union européenne ?


H.S : L'élection présidentielle approche, et il sera intéressant de voir comment les Français vont réagir au positionnement ambigü de Nicolas Sarkozy, désireux d'aligner le modèle français sur celui de son voisin allemand.  

Stratégiquement, le positionnement est intelligent puisqu'il oblige les socialistes à adopter une politique et un comportement au strict opposé, qui fait le jeu de ceux qui défendent avec ardeur le protectionnisme, le repli sur soi, la fermeture des frontières... Attention toutefois à ne pas alimenter les discours xénophobes. Bref, des idées susceptibles de plaire à la gauche de la gauche et aux extrêmes, mais définitivement pas à l'électorat centriste. Reste à savoir, si cela est susceptible de satisfaire les intérêts électoraux de Nicolas Sarkozy. L'avenir le dira.

Quant aux Britanniques, ils s’amusent des revirements de Nicolas Sarkozy. Celui même qui à ses débuts était si anglophile, et qui se sent désormais l'âme d'un germanophile. L’histoire retiendra certainement que c'est un homme brillant, mais pas constant. Il est certes transporté par la force de ses propres arguments - toujours convaincants a priori - mais a peut-être oublié l'essentiel en politique, le fait de formuler des propositions portées par le peuple souverain.

Les Britanniques se sentent-ils isolé par ce rapprochement franco-allemand ?

H.S : Le langage du couple franco-allemand et celui de l'Europe d'aujourd'hui n'est autre que celui de la libéralisation des marchés, du contrôle budgétaire, autant d'idées en phase avec la politique britannique, et ce depuis des lustres. De fait, il ne faut pas se satisfaire des raccourcis habituels, qui voudraient que les Britanniques regardent le rapprochement franco-allemand d’un mauvais œil. Bien au contraire...

Propos recueillis par Franck Michel

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