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Pourquoi l'économie française continue modestement à créer des emplois nets alors que la croissance était nulle au 2e trimestre
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Trompe-l'oeil

En dépit d'une croissance nulle au deuxième trimestre, notre économie persiste à créer des emplois. C'est le fait d'un rééquilibrage temporaire qui ne devrait pas masquer le caractère très faible de la création, par rapport au stock d'emplois en France.

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès est maître de conférences à Sciences Po (gestion publique & économie politique). Il a notamment publié Réformes: mission impossible ? (Documentation française, 2010), L’âge d’or des déficits, 40 ans de politique budgétaire française (Documentation française, 2013). et récemment Le Logement en France (Economica, 2017). Il tient un blog sur pfgouiffes.net.
 

Vous pouvez également suivre Pierre-François Gouiffès sur Twitter

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Atlantico : D'après l'Insee, l'économie française a créé 24 100 emplois au deuxième trimestre 2016, soit une hausse de 0,2%. Dans le même temps, la croissance du PIB a été nulle. A quoi est dû ce paradoxe ? Peut-on imaginer que l'emploi puisse progresser durablement alors que la production stagne ?

Pierre-François Gouiffès : La revue de ces données conjoncturelles doit être complété par l’analyse rétrospective. Les 24 100 emplois marchands supplémentaires d’avril à juin 2016 sont positifs mais correspondent à l’évolution trimestrielle la plus faible depuis le redémarrage de la création d’emplois marchands au second semestre 2015 : on avait approché ou dépassé les 40 000 emplois créés sur les quatre trimestres précédents. Rappelons en outre qu’avec 16 042 000 emplois marchands fin juin, on ne fait que retrouver le niveau du début de l’année 2012…

Donc il y a une cohérence au moins partielle entre une tendance certes positive mais étiolée de l’emploi et la constatation quelques jours avant d’une stagnation du PIB français : progression de l’emploi marchand de 0,15% d’un côté, stabilité du PIB de l’autre. Il y a en outre une spécialisation sectorielle puisque seul l’emploi tertiaire marchand, en progression constante depuis fin 2014, progresse (+37 300) tandis que l’industrie et la construction continuent de perde des emplois. Rappelons enfin que les statistiques de l’emploi, basées sur des décisions des entreprises de moyen terme, n’intègrent que faiblement les aléas qui ont pu toucher le PIB français, à l’instar des perturbations liées aux conflits du premier semestre.

Donc il n’y a pas pour le second semestre 2016 d’incohérence dans les différentes données fournies par la statistique publique. Sur moyenne période il n’est bien sûr pas possible que l’emploi notamment marchand continue à se développer dans une conjoncture dégradée.

Sur un an, 143 000 postes ont été créées. Le gouvernement est-il en passe de réussir son pari et d'inverser la courbe du chômage ?

Pierre-François Gouiffès : La tendance est effectivement clairement positive avec ces 143 000 emplois créés sur cinq trimestres, mais elle s’est hélas étiolée au second trimestre 2016. Si l’on regarde ensuite la situation depuis le début du quinquennat, on constate seulement un retour au niveau de l’emploi marchand initial.

Pour sa part le niveau de chômage prend en compte l’évolution des emplois mais également celle de la population active. Et sur ce point il y aussi une amélioration de la situation depuis fin 2015 à la fois réelle mais objectivement modeste puisque l’on reste encore très proche des plus hauts historiques France : 3,781 millions demandeurs d’emploi sans aucune activité fin juin 2015 et 5,734 millions de demandeurs avec ou sans activité partielle, tout ceci avec des augmentations qui restent très significatives depuis le début du mandat (plus de 1,1 millions de chômeurs avec ou sans activité partielle).

Donc le gouvernement peut se targuer d’un retournement de tendance relativement récent amenant au retournement d’une tendance en dégradation puissante depuis plus de huit ans. Mais ce redressement est tout sauf spectaculaire dans sa portée et son ampleur, ce qui en limite évidemment la valeur ajoutée politique.

Quelles réformes structurelles devraient être mises en place pour améliorer durablement l'emploi ?

Pierre-François Gouiffès : Le terme de « réforme structurelle » renvoie à un bloc de réformes ayant plusieurs caractéristiques : leur mise en œuvre dans la plus grande partie de l’OCDE et la réticence des exécutifs politiques français à les mettre en œuvre nourrie par l’opposition radicale d’une partie de l’électorat français à les admettre.

Le plus important et directement utile pour l’emploi marchand semble concerner la réforme du marché du travail, qui sort tout juste du psychodrame collectif de la loi El Khomri dont les effets positifs sur l’emploi sont éventuellement à venir. Il y a également le champ de la réforme du marché des biens dont la loi Macron 2015 a donné des exemples à la fois concrets et limités (transport en autocar). N’oublions pas enfin l’enjeu des finances publiques et notamment le volet prélèvement obligatoires dans un pays devenu le champion du monde en matière de fiscalité élevée.

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