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Bayrou et Hulot, les deux candidatures qui pourraient faire beaucoup plus de mal à Hollande que celle de Mélenchon
©Reuters

Ouille

Selon un sondage BVA pour la presse régionale et Orange, Jean-Luc Mélenchon égalerait, voire dépasserait François Hollande au premier tour de l'élection présidentielle. Pour autant, le président de la République a plus à craindre d'une éventuelle candidature de François Bayrou ou de Nicolas Hulot, deux hommes qui mordraient sur son électorat, que de la progression du leader du Front de Gauche.

Bruno Cautrès

Bruno Cautrès est chercheur CNRS et a rejoint le CEVIPOF en janvier 2006. Ses recherches portent sur l’analyse des comportements et des attitudes politiques. Au cours des années récentes, il a participé à différentes recherches françaises ou européennes portant sur la participation politique, le vote et les élections. Il a développé d’autres directions de recherche mettant en évidence les clivages sociaux et politiques liés à l’Europe et à l’intégration européenne dans les électorats et les opinions publiques. Il est notamment l'auteur de Les européens aiment-ils (toujours) l'Europe ? (éditions de La Documentation Française, 2014) et Histoire d’une révolution électorale (2015-2018) avec Anne Muxel (Classiques Garnier, 2019).

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Atlantico : Selon un sondage BVA pour la presse régionale et Orange, Jean-Luc Mélenchon égalerait, voire dépasserait  François Hollande au premier tour de l'élection présidentielle. Pour autant, la progression de Jean-Luc Mélenchon représente-t-elle réellement le principal risque pour le président de la République ? François Hollande, au regard de son électorat, n'a-t-il pas plus à craindre d'une éventuelle candidature de François Bayrou ou de Nicolas Hulot ?

Bruno Cautrès : Quels que soient les scénarios testés aujourd'hui dans les sondages d’intention de vote (à moins d’un an de la présidentielle, ce qui doit quand même engager à une certaine prudence) on voit que François Hollande éprouve une vraie difficulté à s'imposer comme le candidat naturel de la gauche. Cela est vrai y compris parmi les sympathisants socialistes et cela est encore plus vrai au sein de l’ensemble des sympathisants de gauche. Dans la grande enquête électorale que réalise le CEVIPOF depuis l’automne dernier, on a récemment testé les probabilités de vote (qui ne sont pas la même chose que les intentions de vote, il s’agit ici de savoir quelle est la probabilité, sur une échelle de 0 à 10, que les répondants votent pour une personnalité politique si elle se présentait à la présidentielle de 2017) pour Jean-Luc Mélenchon (pour lequel nous avons également les intentions de vote) et pour Nicolas Hulot. On s’aperçoit alors que 11.4% de nos répondants déclarent avoir de fortes chances de voter pour Jean-Luc Mélenchon, un chiffre à peu près stable parmi ceux qui indiquent avoir voté pour François Hollande en 2012 (au premier tour). Dans le cas de Nicolas Hulot, ce sont 11.1% qui déclarent avec de fortes chances de voter pour lui mais près de 15% parmi ceux qui indiquent avoir voté Hollande au premier tour de 2012. On voit donc qu’en effet la candidature potentielle de Nicolas Hulot, par ailleurs assez soutenue parmi l’ensemble des électeurs de gauche, pourrait venir encore plus concurrencer François Hollande que la candidature déjà déclarée de J.L. Mélenchon. Quant à l’hypothèse d’une candidature Bayrou, elle va dépendre du résultat de la primaire de la droite et du centre, le président du Modem ne semblant vouloir se lancer dans la présidentielle qu’en cas de victoire de Nicolas Sarkozy à la primaire. Le pire scénario pour François Hollande serait d’être pris en tenaille entre une candidature Juppé à droite, Mélenchon sur sa gauche et Hulot sur sa droite et son cœur de cible, celui des électeurs de centre gauche. 

Un tel scénario pourrait-il pousser François Hollande à souhaiter une candidature d'Alain Juppé, celle-ci étant susceptible d'éviter une candidature du président du Modem ? Nicolas Sarkozy serait-il le "meilleur ennemi" de François Hollande ?

Je pense que le meilleur scénario pour François Hollande serait celui d’une candidature Sarkozy, les électeurs du centre et du centre-droit se rabattant alors sur la candidature Bayrou. Cela laisserait espérer à F. Hollande de pouvoir se présenter en candidat de rassemblement de la gauche. Dans ce cas de figure (division des candidatures de droite et de centre-droit, tensions entre François Bayrou et Nicolas Sarkozy pendant la campagne), François Hollande pourrait en effet espérer re-souder la gauche autour de lui; mais encore faudrait-il qu’il soit en mesure d’être présent au second tour, une hypothèse qui, au jour d'aujourd'hui, apparaît considérablement fragilisée. Si finalement Nicolas Hulot n’était pas, dans cette configuration, candidat cela permettrait éventuellement à François Hollande d’essayer de rassembler plus encore plus large à gauche dès le premier tour. Mais même dans ce cas de figure, la gauche qui aujourd'hui exprime tout son mécontentement à propos de la loi El Khomri, irait davantage porter ses votes sur J.L. Mélenchon.

N’oublions néanmoins jamais deux éléments essentiels à propos de la présidentielle de 2017. Tout d’abord, c’est une élection à deux tours : il n’est pas mauvais, dans ce cas, d’avoir pour François Hollande une concurrence à gauche au premier tour (par exemple Jean-Luc Mélenchon) et qui, au bout du compte, appellerait à voter Hollande au second tour. Un second élément doit être également rappelé : il est assez probable que Marine Le Pen sera qualifiée pour le second tour de la présidentielle et cela implique que le plus dur, pour des candidatures comme celles de F. Hollande ou N. Sarkozy, est tout simplement de se qualifier pour le second tour…

Peut-on envisager un scénario dans lequel François Hollande se retrouverait pris en tenailles entre Jean-Luc Mélenchon et François Bayrou, voire même Nicolas Hulot ? Quelle stratégie pourrait-il alors envisager pour y faire face ?

Il est évident que plus François Hollande sera concurrencé sur sa gauche et sa droite à la fois et plus il lui sera difficile d’apparaître comme le « leader » de son camp et comme ayant une vocation naturelle à en être le représentant au second tout. La ligne qu’il a choisi d’incarner, celle d’une gauche explicitement réformiste, social-libérale, nécessite pour qu’il puisse se qualifier au second tour qu’il dispose à la fois du soutien des électeurs de centre-gauche, du centre et d’une partie de la gauche. Car il  ne pourra pas rejouer le match de 2012 sur le thème de « mon ennemi c’est le monde de la finance » et subira des pertes, sans doute importantes à gauche. Les candidatures Bayrou et Hulot, qui plus est si elles étaient présentes en même temps, éloigneraient ce scénario et rendraient la qualification de F. Hollande pour le second tour encore plus difficile, voire improbable. 

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