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Travail : comment transformer votre café en un remède miracle
©Reuters

Sur les bons rails

Le café n'a pas les mêmes effets selon l'heure, la quantité absorbée et les tâches que nous avons à faire au cours d'une journée de travail. Voici quelques conseils pour rentabiliser au mieux ses effets, sans dépasser les limites de consommation.

Astrid Nehlig

Astrid Nehlig

Astrid Nehlig est directeur de recherche à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), à Strasbourg.

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Atlantico : Faut-il consommer des quantités modérées de caféine avant d'avoir besoin d'absorber de grandes quantités d'informations ?

Astrid Nehlig : On a en effet montré que l’absorption d’environ 200 mg de caféine (soit l’équivalent de 2 tasses de café) augmente la remémoration et la restitution d’un plus grand nombre de mots appartenant à une liste dont le nombre dépasse l’empan de mémoire.

Donc oui, il n'est pas mauvais de prendre un café ou deux dans ces situations, mais attention à ne pas dépasser cette dose de 200 mg car au-delà, les effets ne s’améliorent pas et peuvent même se dégrader.

Il y a aussi deux catégories de tâches. Il faut se rappeler que chez les sujets jeunes, la caféine n’est efficace que dans les tâches simples qui n’impliquent la mémoire qu’à un degré limité, alors qu’elle n’a pas d’effets dans les tâches complexes qui mobilisent déjà toutes nos capacités et augmentent par elles-mêmes notre vigilance.

Par contre chez les sujets âgés, la caféine n’est efficace que dans les tâches complexes qui nécessitent davantage de ressources cognitives.

La caféine rend-elle les gens plus disposés à collaborer ? Faut-il en prendre avant une réunion par exemple ?

Il y a peu d’informations sur le sujet mais cela semble être le cas. Ainsi dans un jeu de rôles, 150 mg de caféine (une tasse et demie de café) accroît la coopération et la communication de la tristesse montrant que la caféine pourrait apporter une aide à l’obtention de soutien social et protéger de la dépression.

Quelles sont les autres vertus de la caféine ?

La caféine mobilise davantage nos ressources cognitives car elle augmente la vigilance et améliore l’humeur. Elle permet également un rendement meilleur au travail car elle augmente les capacités de concentration et la capacité à éliminer les distracteurs de l’environnement.

Toutefois, attention à ne pas dépasser une dose raisonnable car sinon, elle risque de perturber notre sommeil.

Au-delà de ses propriétés au quotidien sur la vigilance, l’efficacité, le bien-être et la confiance en soi, une consommation régulière de 2-4 tasses de café par jour permet de prévenir le déclin cognitif lié à l’âge surtout chez les femmes, la maladie de Parkinson, d’Alzheimer et selon une étude récente peut-être même la sclérose en plaques.

Quelle est la bonne quantité de café à prendre au cours d'une journée de travail ?

Il n’y a pas vraiment de " bonne quantité " à prendre car nous sommes inégaux devant notre réaction à la caféine. Certains vont boire 4 cafés pendant que d’autres auront suffisamment avec un seul. Ces différences tiennent en grande partie à nos différences génétiques sous-jacentes. La science commence à identifier de plus en plus de variabilités d’expression de divers gènes ou polymorphismes liés à l’action de la caféine.

Un polymorphisme existe au niveau de l’enzyme hépatique qui dégrade 95% de la caféine, le cytochrome P450 1A2. Ce polymorphisme divise la population en 2 catégories : les métaboliseurs lents et les métaboliseurs rapides. Les premiers consommeront donc moins de caféine que les autres car la caféine va circuler plus longtemps dans leur organisme.

De plus, il existe de nombreux polymorphismes au niveau du récepteur A2A de l’adénosine, cible préférentielle de la caféine au niveau cérébral qui rend les individus différents dans leur réaction au café sur des fonctions comme le sommeil et l’anxiété par exemple, mais aussi plus simplement sur leur appétence par rapport au café/caféine et sur ses conséquences.

Ceci mène chez la plupart des individus à une consommation " intelligente " de café qui assure l’équilibre entre les besoins ressentis et les potentiels effets déplaisants. Très clairement, la plupart des individus consomment moins de café le week-end quand il n’y a pas la charge de travail.

Y a-t-il une limite à ne pas dépasser ?

Ici, je réponds en partie à la question précédente. L’EFSA en 2015 a indiqué que les doses de caféine qu’on pouvait absorber sans risque pour la santé chez l’adulte sont de 200 mg en une prise (2 tasses de café) et de 400 mg sur la journée (4-5 tasses de café). C’est le conseil à donner.

Ceci est la limite officielle démontrée sans conséquences pour la santé. Il est clair que certaines personnes la dépassent (des écrivains,des hommes célèbres et beaucoup d’anonymes) mais elle ne peut pas être conseillée car chez beaucoup d’individus, elle pourrait présenter un risque pour la santé et générer beaucoup d’effets négatifs : nervosité, tachycardie, tremblements, anxiété.

La caféine fonctionne-t-elle mieux quand vous avez eu un peu de repos que quand vous êtes fatigué ?

Pour affirmer ceci, l’auteur de ce document se base sur des notions de biochimie qui ont du sens. Je n’ai pas la possibilité de vérifier la source du lien que vous m’avez envoyé car il s’agit d’un livre qu’il faut acheter. Cette affirmation ne se base pas, en tous cas me semble-t-il, sur des observations scientifiques et tant qu’on n’a pas de preuves réelles à l’appui de la théorie émise par l’auteur, je me garderais bien de conclure trop hâtivement.

Ceci d’autant plus qu’au contraire, la littérature a démontré d’autres propriétés de la caféine. La caféine s’est avérée plus efficace dans des situations où nous ressentons un peu de fatigue (rhume, baisse de vigilance post-prandiale, conduite de nuit ou prolongée et monotone, travail répétitif, travail de nuit…) et ces faits semblent aller à l’encontre de ce que l’auteur affirme ici.

Je n’ai pas vu de données en cas de fatigue extrême mais il ne faut pas perdre de vue que le système nerveux est comme tout système biologique constamment en mouvement et que même si beaucoup d’adénosine est présente dans le système et occupe ses récepteurs, la caféine qui arrive en quantités suffisantes peut déplacer l’adénosine de ces récepteurs pour se lier à eux. Le système n’est pas figé mais constamment en mouvement. Il ne faut pas oublier non plus que la caféine combat l’inertie du sommeil, état ressenti au réveil lorsqu’on a envie que d’une seule chose, retourner se coucher, moment durant lequel il y a sans doute encore pas mal d’adénosine présente au niveau cérébral.

Donc sur cette partie-là, prudence :  il faut de l’expérimentation avant de pouvoir conclure quoi que ce soit.

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