Présidentielles américaines : quand Donald Trump confie que sa campagne n’aurait pas pu prendre le même envol sans les attentats de Paris<!-- --> | Atlantico.fr
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Le mur, ce n'est pas que pour les immigrés...
Le mur, ce n'est pas que pour les immigrés...
©Reuters

L'étincelle

Faisant la course en tête lors des primaires républicaines aux Etats-Unis, Donald Trump n'en finit plus de surprendre. Pourfendeur des élites et des étrangers, le magnat de l'immobilier a récemment révélé que sa campagne avait été boostée par... les attentats de Paris.

Aujourd'hui, les thèmes de campagne de Donald Trump sont bien connus : immigration, mondialisation, libre-échange. Sa campagne était au départ vue comme une vaste blague, jusqu'à son discours de lancement où il a promis de construire un mur pour protéger les Etats-Unis des immigrés clandestins et des Mexicains "violeurs", le faisant décoller dans les sondages. Mais pour The Donald, ce ne sont pas ces thèmes qui l'ont vraiment envoyé dans la stratosphère. C'est autre chose.

Voici la traduction d’une longue tirade du favori à la primaire républicaine, délivrée la semaine dernière après sa victoire dans les Etats de Floride, de Caroline du Nord et d’Illinois, et reprise dans The Daily Beast :

On descendait l’escalator [lors du meeting de lancement de sa campagne, ndlr], et tout tournait autour du commerce et des frontières. Et ce qu’il s’est passé, très rapidement, on a décollé. […] Donc on a commencé et quelque chose s’est passé, quelque chose qui s’appelle Paris. Paris s’est passé. Et Paris était un désastre. Il y a eu, il y a beaucoup de désastres, mais là c’était Paris. On a eu un truc dans le genre à Los Angeles, c’était en Californie que 14 jeunes ont été tués. Et ça continue, et ça continue. Et ce qui c’est passé pour moi, c’est que toute ma campagne a pris un nouveau tournant. Plus seulement à propos des frontières, ou plus seulement des bons deals… Mais ça a pris une autre tournure, une tournure très simple : ce dont notre pays à besoin c’est de protection. Et c’est ce qui va se passer. Et comme ça, d’un coup, les chiffres des sondages se sont envolés. Et je suis tout bonnement super fier de faire parti de ça.

Une analyse du candidat lui-même qui va à l'encontre de beaucoup d'analyses politiques au sujet de sa campagne. On voit habituellement deux ressorts à son succès : d'un côté, sa posture anti-immigration, qui serait teintée de xénophobie et de racisme, et de l'autre, sa posture protectionniste, qui attirerait une classe ouvrière américaine frappée de plein fouet par la mondialisation. Pour le candidat lui-même, ce qui l'a emmené dans la stratosphère n'est pas tant ces deux sujets - même s'ils sont importants - mais le terrorisme.

Comme il le répète souvent, il ne veut pas construire ce fameux mur entre les Etats-Unis et le Mexique seulement pour arrêter l'immigration illégale, mais également pour protéger les Etats-Unis de l'incursion des trafiquants de drogue et d'éventuels terroristes.

Et il voit bien - ce qui suggère que le candidat est bien plus malin et capable de recul sur son propre phénomène qu'on l'imagine souvent - le thème qui relie ses thèmes d'opposition à l'immigration, de protectionnisme, et d'anti-terrorisme : la protection. Face à une classe politique plus qu'essoufflée, le magnat Trump apparaît comme plus crédible pour protéger des Américains qui ne se sentent pas protégés par leurs élites.

Dans son discours, Trump n’oublie pas de rassurer les électeurs inquiets pour la pérennité du deuxième amendement, garantissant le droit constitutionnel de chaque citoyen américain à porter une arme - un droit qui est également vu comme une protection, y compris contre le terrorisme.

Dans une interview donnée début mars au site conservateur Breitbart, Donald Trump Jr, le fils aîné du candidat, rappelle que son père n’a pas attendu longtemps après les attentats pour présenter sa vision des faits : si les Français avait été armés, les attentats auraient pris une autre tournure.

Si vous vous rappelez de San Bernardino, si vous vous rappelez de Paris, il est le seul des candidats pro deuxième amendement à avoir dit le jour suivant – quand le sujet était encore un petit peu sensible – : "Hey, la Californie, la France, vous avez les lois sur le port d’arme les plus dures du monde, et s’il y avait eu des balles qui fusaient de l’autre côté, ça aurait peut être changé les choses. Ca se serait peut-être passé différemment". À quels genres de résultats vous vous attendez quand vous mettez en place un système qui fait de vous des vaches à l’abattoir ? Parce qu’on sait que ces lois anti-armes n’affectent que ceux qui suivent la loi, ces lois n’affectent pas ceux prêts à tuer pour leur idéologie.

Thème de la protection qu'a bien perçu Peggy Noonan, ancienne conseillère de Ronald Reagan et l'une des plus fines chroniqueuses observatrices de la politique américaine, où elle résume la montée de Trump par une phrase : "La montée des non-protégés". Il y a deux sortes de citoyens, ceux qui sont protégés des difficultés de la vie - par leurs diplômes, leur statut, leur place dans l'élite - et les autres, les non-protégés, qui doivent vivre la vie dictée pour eux par les protégés, qui leur expliquent que (par exemple) l'immigration de masse et le libre-échange sont des cadeaux pour eux, et que s'ils ont un avis différent ils doivent être stupides ou racistes, ou les deux.

Je crois que maintenant je vois ça comme une dynamique politique généralisée dans l'Occident. Il y a les protégés et les non-protégés. Les protégés décident des politiques publiques. Les non-protégés les vivent. Et les non-protégés commencent à exprimer leur mécontentement, haut et fort. [...] Et maintenant on a l'impression que l'attitude de la moitié supérieure de la société est : débrouille-toi. Mets-toi à la page, petit raciste. [...] Je ne sais pas si les protégés se rendent compte à quel point cette dynamique est profonde, ou quel est leur rôle dedans.

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