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Angela, Christine, Janet et Hillary… les nouvelles maîtresses du monde : 2016 sera-t-elle l'année de la bascule du pouvoir vers les femmes ?
©Flickr

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La journée de la femme de cette année nous permet d'entrevoir la féminisation des postes de pouvoir. Si dans les faits l'identité sexuelle est moins jugée pour laisser place à la compétence, il faut voir dans la présence des femmes à ces positions clés une évolution sociétale importante en Occident.

Nicole Bacharan

Nicole Bacharan

Nicole Bacharan est historienne et politologue, spécialiste de la société américaine et des relations transatlantiques.
Elle a co-écrit avec Dominique Simonet  "11 septembre le jour du chaos" (Perrin, à paraître le 18 août 2011).

Son prochain livre est Le guide des élections américaines de 2012, co-écrit avec Dominique Simmonet,  à paraître aux éditions Perrin.

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Atlantico : La Journée de la Femme millésime 2016 pourrait avoir une saveur toute particulière, si elle était celle de l'année où Hillary Clinton devenait présidente des Etats-Unis, c'est-à-dire la personne la plus puissante du monde. Il y a fort à parier que la chose ne surprendrait pas réellement l'opinion ; on sait que des postes majeurs de l’exécutif occidental sont déjà tenus par des femmes aujourd'hui : Dilma Rousseff au Brésil, Janet Yellen à la FED, Christine Lagarde au FMI ... Qu'est-ce qui explique cette "féminisation", encore difficile à imaginer il y a quelques décennies à peine, de ces très hautes fonctions ? Comment y sont-elles parvenues ?

Nicole Bacharan : C’est un mouvement très général qui découle tout d’abord d’un accès progressif des femmes à l’éducation et d’années de lutte féministe. Il y a aussi tous les efforts mis en place pour imposer plus de parité. Je ne crois pas que les femmes soient intrinsèquement meilleures dirigeantes que les hommes : certaines le sont, d’autres pas.

Est-on en train de passer un cap symbolique important d'un point de vue historique, comme l'élection de Barack Obama a pu l'être dans un autre registre ?

Il est vrai qu’une présidente des Etats-Unis serait un symbole fort et emblématique, et il me semble que la majorité des Américains accepterait tout à fait l’idée d’avoir une présidente. Je ne sais pas si cette femme est Hillary Clinton, mais viendra un jour une pionnière qui quand elle aura poussé la porte, laissera entrer les autres avec elle. Cette féminisation devient banale. Barack Obama avait passé ce cap ; aujourd’hui il me semble que tout le monde oublie qu’il est noir, et il me semble qu’une femme très influente comme Christine Lagarde n’est plus jugée en tant que femme. C’est une belle et grande femme : cela ne veut donc pas dire qu’elle a perdu sa féminité en route. Mais celle-ci n’est plus ce que tout le monde remarque : aujourd’hui, c’est sa compétence. En ce sens c’est un cap symbolique mais dans les faits, elle est une dirigeante avant d’être une femme aux yeux du public

Ces personnalités ont-elles une pratique du pouvoir spécifique en tant que femmes ? Le fait que ces postes clés soient désormais aux mains de femmes bouleversera-t-il les grands équilibres du monde, ou tout continuera-t-il comme avant ?

J’espère ne pas tomber dans des lieux communs, mais dans mon expérience des femmes dirigeantes, je dirai qu’elles ont une faculté qu’ont moins les hommes d’accepter qu’on les contredise. Quand elles s’aperçoivent qu’elles font fausse route, que les faits sont contre elles, je les trouve beaucoup plus capable d’envisager des alternatives. C’est peut-être lié au fait que la plupart des femmes doivent jongler entre de multiples registres toute la journée (entre vie professionnelle, vie privée, de famille), ou au fait que malgré tout elle reste encore et toujours essentiellement responsable de l’aspect pratique de la vie. C’est difficile à dire, mais je les trouve plus réceptives, plus à même de sortir de la théorie pour se confronter au réel.

Il n’y a rien de spécifiquement féminin chez Christine Lagarde ou chez Janet Yellen. Ces deux femmes me paraissent très compétentes mais je n’ai pas le sentiment qu’elles aient encouragé l’avènement d’une économie plus humaine prenant plus soin des gens en bas de l’échelle sociale. Elles essaient au mieux de faire tourner l’économie, du monde pour l’une, des Etats-Unis pour l’autre. Par contre, en politique, il y a peut-être plus de cela. Il est vrai qu’Hillary Clinton essaie d’arriver au pouvoir en mettant en avant son engagement durable et sincère pour les femmes et les enfants. Cela a vraiment été la cause de son choix d’entrée en politique vers l’âge de 20 ans, elle a maintenant une vraie crédibilité à ce sujet.

Une des choses qui pousse vraiment les questions féministes sur le devant de la scène, c’est la transformation démographique aux Etats-Unis et la transformation des modes de vie : à l’heure actuelle, en dépit des aspects flamboyants de certaines revendications religieuses, la majorité des Américains ne sont pas mariés (51% des femmes ne sont pas mariées), cela veut dire que d’une certaine manière, elles sont chefs de famille. Elles considèrent que le mariage ne leur apporterait rien de plus : elles peuvent avoir une "vie à deux" tout à fait satisfaisante sans être mariée, elles peuvent avoir des enfants sans être mariées, elles peuvent investir, voyager, voter, fonder des entreprises. Elles n’ont pas de limites parce qu’elles n’ont pas le statut de femme mariée mais elles ont des responsabilités très lourdes. Les questions de garde d’enfants, de crèche, d’égalité des salaires, d’augmentation du salaire minimum (car ce sont les femmes en majorité qui sont au salaire minimum), de santé, de soins médicaux (car les femmes ont des besoins de santé spécifiques) sont des questions féminines devenues centrales dans les campagnes électorales du fait de la transformation démographique.

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