Manuel Valls, l'homme pour qui la politique est communication<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Manuel Valls, l'homme pour qui la politique est communication
©

On n'est pas couché

Présent sur le plateau d'On n'est pas couché samedi soir, Manuel Valls a confirmé une fois de plus son appétence et sa maîtrise de la communication politique. Homme politique ancré dans son temps, celui de l'immédiateté, du buzz et de la toute-puissance des médias, le Premier ministre ne cesse jamais de penser à son image de marque personnelle. Au risque de vider la parole politique de son sens.

François Belley

François Belley

François Belley est publicitaire. Il est l’auteur du roman « le je de trop », de l’essai « Ségolène la femme marque » et du blog « La politique spectacle décryptée par un fils de pub ! »

Voir la bio »

Atlantico : D'une manière générale, comment pourrait-on qualifier la communication de Manuel Valls ?

François Belley : Je dirais que la communication de Manuel Valls est avant tout cohérente. Elle était déjà cohérente lorsqu’il était au ministère de l’Intérieur. Elle est aujourd’hui cohérente à Matignon. Quelles que soient ses responsabilités, Manuel Valls reste en effet raccord avec son positionnement de "Monsieur Sécurité" à la droite de la gauche avec ce sourire quasi inexistant, cette mâchoire serrée, ce sourcil froncé, ce poing serré et ce regard parfois noir. Cette posture propre à Manuel Valls doit pouvoir nourrir cette image qui le rend si singulier dans "les linéaires politiques". Dans sa stratégie de présidentialisation, Manuel Valls cultive donc en permanence les 3 postures importantes d’un leader : celles de la gravité d’Etat, de la fermeté du chef et de la détermination politique.

Manuel Valls est un vrai communicant. C’est ce qui le distingue des autres ministres. Il a l'expérience, celles notamment de directeur de la communication de Lionel Jospin et de directeur de la campagne de François Hollande. Il connaît donc la force de l’image. Fait nouveau par rapport à la génération précédente, qui plus est à gauche, Manuel Valls assume complètement cette communication décomplexée, un peu comme Ségolène Royal dans sa version 2006/2007. Comme elle à l'époque, chez Manuel Valls, tout est politique, à commencer par sa communication. L'axe de la sécurité au sein du PS, le changement de nom du parti, c'est lui. A l’instar de Nicolas Sarkozy lors de son passage au ministère de l’Intérieur, le Premier ministre sait donc attirer l'attention et créer sur lui la visibilité nécessaire pour nourrir son statut de personnage présidentiable.

Pour Manuel Valls, la politique est communication et la manière de dire les choses importe autant que le discours lui-même. A quoi cela mène-t-il selon vous ? Y a-t-il un risque de voir l'action politique vidée de son sens ?

Manuel Valls a compris que nous vivons dans une société d’image où le signe l’emporte sur le sens. Et contrairement à Lionel Jospin dont il était le chargé de communication, Manuel Valls a bien intégré l’importance de cette image médiatique dans l’action politique. Chez Manuel Valls, la forme est donc tout aussi importante que le fond. Il a intégré la twitterisation de la vie politique où il faut exister en continu. Et vite. Alors Manuel Valls occupe l'espace. Mais ce phénomène est visible partout ailleurs, surtout dans l’univers des marques commerciales. C’est le syndrôme des réseaux sociaux. Pour exister, il faut être vu. Selon moi, il y a urgence de réhabiliter l'homme politique. Pour cela, il faut de l’action, du courage, du terrain, de l’engagement. Au sein des états-majors des partis politiques, on devrait pouvoir écrire partout sur les murs : "moins de parole, plus d'actes". Le risque, on le connait. On le vit aujourd’hui : désintérêt, discrédit, défiance, abstention…

Peut-on dire que la tendance de Manuel Valls à confondre politique et communication est représentative de l'époque que nous vivons ?

Manuel Valls est simplement dans son époque. L'époque est à l'immédiateté. Alors il va vite. L’époque est à l'ultra communication. Alors il communique. L’époque est au buzz. Alors il multiplie les petites phrases et les mots choc (rappelons nous les termes de "kyste", "mafia" ou encore "gangrène" qu’il avait utilisés, comme Nicolas Sarkozy avec "racaille" et "karcher" en son temps). L’époque est au spectacle. Alors il va chez Laurent Ruquier pour toucher le plus grand monde, parler à ceux qui ont décroché de la politique et enfin pour créer l’événement par un accrochage, une déclaration ou une image forte. A titre de comparaison, Lionel Jospin, lors de la campagne présidentielle de 2002, avait refusé d’aller chez Michel Drucker. Contrairement à Lionel Jospin, Manuel Valls est un "bon client" pour les médias.

Manuel Valls se réclame souvent de Georges Clémenceau. Qu'y a-t-il derrière cette comparaison ? Comment expliquer cette fascination ?

En politique, les références historiques ne manquent pas, de Jeanne d’Arc en passant par Jaurès, De Gaulle ou encore Mitterrand. Ces références sont forces d’évocations et d’images. Elles nourrissent le storytelling de l’homme politique mais également l’imaginaire de l’opinion. L’homme politique joue en permanence avec les symboles, surtout lorsqu'il est en campagne. Ainsi, l'homme politique aime faire référence à des hommes, des lieux, des discours également. George Clémenceau, c’est l’histoire de France, la République, et surtout un destin hors norme. George Clémenceau, c’est le "Tigre". Et le tigre, c’est l’animal rapide et puissant que l’on dit aussi imprévisible. S’associer au "Tigre" n’est donc pas un hasard. "La politique c’est du sérieux" dit Manuel Valls. Et chez Manuel Valls, il ne faut pas l'oublier, tout est politique.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !