Marine Le Pen en voie de se convertir au réalisme économique : mais peut-on croire aux signaux qu’elle émet ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Marine Le Pen veut amender le programme économique du FN.
Marine Le Pen veut amender le programme économique du FN.
©Reuters

Bip bip

Marine Le Pen a commencé à publiquement changer son programme économique pour respecter certaines contraintes de marché, ce qui plonge une partie de ses dirigeants et de ses électeurs dans l'expectative.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Faut dire que le FN doit une partie de son succès à un programme économique qui prône la rupture brutale avec des politiques de gouvernement, y compris avec les principes de l'économie de marché. Le FN, comme tous mouvements extrémistes, proposait un plan B à une situation qui était certes compliquée pour beaucoup, mais qu'il fallait réformer.

Alors que Marine Le Pen, comme son père d’ailleurs, a toujours proclamé son opposition violente à l’Union européenne, à l’Euro, à l‘emprise des marchés, ainsi qu’à la mondialisation industrielle et financière, elle vient - à la surprise d’une partie de son entourage - d'entreprendre une révision de son programme économique vers plus de responsabilité et de pragmatisme.

Ce virage quasiment idéologique concerne trois grands dossiers de son programme.

Le premier de ces dossiers concerne l’euro et l'Europe. A écouter Marine Le Pen, il ne sera plus question pour elle de quitter l‘Europe et l'euro. Il faudra seulement négocier une réforme de fonctionnement de l'UE... Et des critères de stabilité de la monnaie unique. Elle veut, comme la Grande-Bretagne, initier une démarche de réforme et ensuite soumettre le système au référendum.

Le deuxième dossier porte sur la durée du travail, et plus clairement sur les 35 heures. Marine Le Pen, qui avait toujours défendu les 35 heures, commence à reconnaitre qu'il faudra passer aux 39 heures. Elle ne partage pas encore le diagnostic du manque de compétitivité qui piège le système français mais elle s’en rapproche.

Le troisième dossier sur lequel elle a beaucoup assoupli ses positions est celui de la retraite à 60 ans ; cette position était sanctuarisée. Elle admet maintenant qu’il faudra sans doute travailler plus longtemps, elle parle de 63 ans pour tenir compte de l'allongement de la vie.

Il est évident que sur ces trois points, la présidente du FN  brise ce qui était incontournable pour le Front National et qui a été très important dans la conquête des électorats populaires.

Il est évident aussi que si elle franchit ces lignes jaunes, c’est parce qu’avec un certain nombre de ses conseillers, elle sait qu'elle ne pourra pas séduire l'électorat de droite, les classes moyennes et cadres dirigeants du privé, qui connaissent les réalités de l'économie, les contraintes.

Marine Le Pen sait que si elle veut gouverner, il lui faut un socle de propositions crédibles et réalisables.

Accessoirement, elle peut aussi avoir besoin de séduire les patrons de grandes entreprises qui pour l'instant hésitaient à s'intéresser au FN. Ces grands patrons sont aussi accessoirement des sponsors, et Marine Le Pen, comme les autres responsables politiques, aura besoin d‘argent. 

Le problème pour elle, c’est qu'un tel virage ne fait pas l'unanimité dans son parti. Certains dirigeants et même des très proches sont violemment opposés à de tels changements qui seront ressentis comme des trahisons. Le risque politique sera de voir des couches populaires prendre de la distance par rapport au FN.

Nul ne sait aujourd'hui quel sera l‘impact d'un changement de positions économiques de la présidente du FN sur les discours des autres partis, ceux de la droite comme de la gauche.

Dans l’immediat ça devrait dire deux choses à la classe politique :

La première, c'est qu'il est urgent de définir des programmes et des projets dans tous les domaines de l'action politique. Programmes cohérents et projets réalisables ; l'électorat veut bien rêver, mais il ne supportera plus qu on lui mente sur la réalité de la situation économique.

La deuxième chose est que le FN est peut-être en train de comprendre que les qualités qu'il faut pour promettre un exercice responsable et sérieux du pouvoir ne sont pas celles qu'il faut mobiliser pour conquérir ce pouvoir. 

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