"Numéro zéro" : ce n'est pas le meilleur Umberto Eco...<!-- --> | Atlantico.fr
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"Numéro zéro", d'Umberto Ecco. Ed. Grasset, 220 pages 19.00 €.
"Numéro zéro", d'Umberto Ecco. Ed. Grasset, 220 pages 19.00 €.
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Le livre du jour

En 1992, à Milan, Colonna, écrivain raté et journaliste intermittent, se voit proposer de suivre la mise en place des Numéros Zéro d’un quotidien présenté comme un modèle d’indépendance mais qui ne paraîtra jamais. Il s’agit en fait d’un moyen de chantage pour le commanditaire.

Isabelle de Larocque La Tour pour Culture-Tops

Isabelle de Larocque La Tour est chroniqueuse pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).

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L'auteur

Essentiellement connu pour des romans comme Le Nom de la Rose, policier médiéval tiré à 17 millions d’exemplaires ou Le pendule de Foucault, complot ésotérique incroyablement érudit, Umberto Ecco est un pionnier de la sémiotique (étude des signes comme facteurs de la communication à partir d’un code commun). Il est également l’auteur de nombreux essais universitaires sur l’esthétique médiévale, la communication de masse, la linguistique et la philosophie.

Thème

En 1992, à Milan, Colonna, écrivain raté et journaliste intermittent, se voit proposer de suivre la mise en place des Numéros Zéro d’un quotidien présenté comme un modèle d’indépendance mais qui ne paraîtra jamais. Il s’agit en fait d’un moyen de chantage pour le commanditaire. Un numéro zéro n’ayant pas de date déterminée, cinq rédacteurs, plus ou moins loseurs, sont chargés de fureter dans le passé afin d’y découvrir des pépites oubliées qui deviendront prétexte à des articles de fond, des rapprochements féconds et de brillantes anticipations, tâche facile quand on connaît la suite. Mais les juxtapositions opérées débouchent sur la découverte d’une énorme manipulation qui remonte à la chute du régime fasciste et l’un des journalistes, le type même du complotiste, y laissera sa vie.

Points forts

- En gros, tout ce qui évoque le « grand » Umberto Ecco : · Le bonheur de retrouver le goût du complot (et même du complot dans le complot) qui fait le charme de ses thrillers, même si le Braggadocio de Numéro Zéro est loin d’avoir la carrure du Belbo du Pendule de Foucault · La liste drolatique, sur quatre pages, de tous les pseudo-Ordres de Malte avec les titres ronflants de leurs Grands Maître-bidon · Le brainstorming délirant auquel se livre la rédaction qui détourne les lieux communs pour en faire des Cadavres Exquis surréalistes

- L’humour (et la cruauté) avec lequel Umberto Ecco traite des travers de la presse écrite : · La nécessité d’employer des mots simples lorsque l’on s’adresse à un lecteur de quotidien : ne jamais avoir la faiblesse d’écrire palingénésie quand on peut dire renaissance morale ; partir du principe que le lecteur moyen n’a pas lu un seul livre et que, s’il n’a jamais vu une Diva, il veut tout savoir de ses amours secrètes… · L’art de rédiger un démenti · Chaque mot employé doit plaire à « l’actionnaire de référence »

- L’intrigue est sans failles mais nécessite une bonne connaissance de l’histoire de l’Italie depuis la chute du fascisme. Tous les événements utilisés sont vérifiables sur le Net, y compris le documentaire de la BBC sur l’opération Gladio et le livre de Yallop sur la mort de Jean-Paul 1er. (A se demander si Umberto Ecco n’a pas bâti son complot à partir de là…)

Points faibles

· Le style, volontairement neutre et un rien bâclé, aurait pu s’expliquer par la pauvreté de la traduction. Mais non, il s’agit de celle de Jean-Noël Schifano qui a traduit une grande partie de l’œuvre d’Umberto Ecco, et avec quel brio !

· L’absence de cet art si particulier dans lequel Ecco excellait, celui de jouer avec les mots. On ne peut s’empêcher de regretter les « tétrapilotectomie » (art de couper les cheveux en quatre) et autres « pilocatabase » (art de s’en sortir au poil près) qui émaillaient ses précédents romans · La fantastique érudition qui était la marque de cet auteur hors norme est singulièrement réduite. Ce n’est plus Borges qui inspire l’intrigue, c’est Wiquipédia

En deux mots

Richard Millet a écrit dans Langue Fantôme: « Umberto Ecco s’est rasé la barbe », lorsque celui-ci a revu et simplifié Le Nom de la Rose pour le rendre plus accessible au commun des lecteurs (surtout, si vous possédez la première édition, gardez-la précieusement !) Aujourd’hui, à la lecture de Numéro Zéro, il pourrait dire qu’Umberto Ecco est atteint d’alopécie.

Une phrase

P 131 – Au cours d’une conférence de Rédaction : « Il conviendrait, pour le plaisir de notre éditeur, que nous trouvions de quoi jeter l’ombre du soupçon sur ce juge fouineur. Sachez qu’aujourd’hui, pour contrecarrer une accusation, il n’est pas nécessaire de prouver le contraire, il suffit de délégitimer l’accusateur »

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Informations

"Numéro zéro", d'Umberto Ecco. Ed. Grasset, 220 pages 19.00 €

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