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Pour Mariano Rajoy, 
le plus difficile commence
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Derecha

Après huit ans de pouvoir socialiste, la droite espagnole a remporté les élections législatives à la majorité absolue avec 186 sièges sur 350 possibles au Congrès. Le nouveau Premier ministre a déclaré la guerre à la crise mais sa marge de manœuvre reste faible...

Thibaud de Fortescu

Thibaud de Fortescu

Thibaud de Fortescu est Chercheur à l'Institut Français de Géopolitique de l'Université Paris 8.

Il est spécialiste de l'Espagne, et notamment des questions électorales et d'immigration.

Il participe régulièrement à plusieurs colloques sur ces thèmes en France et en Espagne.

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C’est donc Mariano Rajoy, galicien de 56 ans, leader du Parti Populaire depuis sept ans, qui sera intronisé Premier ministre. Critiqué pour son manque de charisme, cet homme discret, plusieurs fois ministre pendant les deux mandats de José Maria Aznar, avait échoué en 2004 et 2008 avant de rencontrer, à la faveur de la crise, un contexte propice à la victoire de l’opposition.

Aujourd’hui, la situation est telle que le changement était devenu nécessaire aux yeux de bon nombre d’Espagnols. Pourtant, il est difficile de dire que l’homme (ou son parti) suscite un véritable engouement.

Un programme qui reste flou

Le fort taux de chômage (21% et un jeune sur deux), la hausse spectaculaire des hypothèques et saisies immobilières sont quelques-unes des illustrations les plus frappantes de la précarité dans laquelle s’est enfoncé le pays. Les socialistes, qui subissent la défaite la plus sévère de leur histoire (seulement 110 sièges), payent à la fois leur mauvaise gestion de la crise et le temps qu’ils ont mis à prendre conscience de la gravité de la situation.

Pour autant, le Parti Populaire, qui a surtout surfé sur le mécontentement de la population, est resté très flou sur son programme. Certes, des réformes concernant l’emploi et le marché du travail prônant plus de flexibilité sont annoncées, mais les modalités demeurent inconnues. L’accent sera inévitablement mis sur une politique d’austérité et de nouvelles coupes budgétaires dans la fonction publique devraient voir le jour. Plus surprenant, alors que les Espagnols semblaient s’être fait aux grandes réformes sociétales des gouvernements Zapatero comme le mariage homosexuel ou l’assouplissement de la loi sur l’avortement, ils ont élu un gouvernement qui s’apprête à revenir en arrière sur ces deux points. Dans une campagne où seule l’économie a primé, ces questions sont apparues annexes.

Les mouvements de contestation comme celui des Indignés ont également été relégués au second plan médiatique. Cependant, la montée de petits partis comme Izquierda Unida (ex-Parti Communiste) ou UPyD (parti récent, marqué par un jacobinisme fort) qui obtiennent respectivement 11 et 5 représentants, traduit sans doute l’intérêt d’une frange de l’opinion publique pour d’autres discours que celui des deux grands partis.

Un ministre de l'Economie très attendu

L’arrivée du PP au pouvoir, conjuguée à la précédente victoire aux élections locales de mai dernier (la moitié des mairies et 11 communautés autonomes sur 17 sont aux mains de la droite), met donc le parti face à ses responsabilités. Il lui faudra trouver des solutions efficaces pour relancer l’emploi. Toutefois, au-delà des mesures nationales, le sort de l’Espagne dépendra inévitablement de celui de la zone euro, et une sortie de crise n’est envisageable qu’à travers une amélioration de l’économie européenne. L’urgence de la situation ne laisse pourtant que peu de temps. Il se murmure que Mariano Rajoy a beaucoup consulté au sein des milieux financiers espagnols ces derniers jours, et le nom de son Ministre de l’Economie est attendu avec fébrilité car l’appréciation que feront les marchés et agences de notation de ce changement politique en dépend en partie.

Des enjeux régionaux

Cette victoire du PP aux élections législatives recouvre aussi des enjeux de géopolitique interne. Au Pays basque d’abord, où le retour en force des partis régionalistes/indépendantistes (7 sièges pour la coalition Amaiur et 5 pour le Parti Nationaliste Basque) qui se produit dans un contexte de fin annoncée des activités armées de l’ETA, risque de poser problème au PP, notamment sur la question des prisonniers politiques. En Catalogne, les 16 sièges obtenus par le parti nationaliste conservateur de CiU, qui succède à la conquête de Barcelone en mai dernier est un signe fort de la progression de ce mouvement. En Andalousie enfin, les socialistes qui gouvernent depuis la fin de la dictature ont été sèchement battus et devraient également perdre la tête de la région en mars prochain.

A la lumière de cette victoire qui s’est faite sur le dos d’un mécontentement, des dynamiques plus longues et un ensemble de transformations sociales et sociétales risquent donc aussi d’être bouleversés et les cartes pourraient être redistribuées dans plusieurs régions.

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