Algérie : la baisse des prix du pétrole commence à rendre criant l’échec de son économie administrée<!-- --> | Atlantico.fr
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Une raffinerie en Algérie.
Une raffinerie en Algérie.
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Richesses gâchées

L'exploitation des hydrocarbures représente 98 % des exportations algériennes. Avec une baisse continue des cours du pétrole, la situation économique de l'Algérie se tend peu à peu.

Khaled Menna

Khaled Menna

Khaled MENNA est Maître de recherche au Centre de Recherche en Economie Appliquée pour le Développement (C.R.E.A.D)

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Atlantico : La Banque d’Algérie souligne dans une note en date du 12 juillet que les recettes issues du pétrole et de gaz ont chuté de 50 % au premier trimestre 2014 par rapport à la même période de 2015. A quel point cette baisse est grave pour l’économie algérienne ? Peut-on parler d’économie rentière ?

Khaled Menna : L’économie algérienne est dépendante je dirais d’une manière endémique des recettes des exportations des hydrocarbures. 98% des exportations sont issues des hydrocarbures, 45 % du PIB et 60% de l’ensemble des recettes fiscales de l’Etat. Cette situation est un peu problématique dès qu’elle accentue la vulnérabilité de l’économie algérienne vis-à-vis tout choc externe. La situation actuelle on est un bon exemple. Les prix du pétrole, exprimés en dollar, ont chuté d’environ 50 % au second semestre 2014. Le prix moyen du baril de pétrole est passé de 109,55 dollars/baril au premier trimestre 2014 à 75,38 dollars/baril au dernier trimestre 2014 (100,23 dollars en 2014), puis à seulement 54,31 dollars/baril au cours du premier trimestre de l’année en cours. Cela n’est pas sans effet sur l’économie algérienne. Cette chute des prix du pétrole, se conjugue à une contraction des quantités d’hydrocarbures exportées au premier trimestre 2015 (- 8,99 %). Cette situation baissière s’est aggravée par le niveau des importations. Les importations de biens (fob), qui ont connu un trend haussier ces

dernières années, ont baissé comme en témoigne leur niveau à fin mars 2015 (13,3 milliards de dollars), soit un recul de 8,4 % par rapport à la même période de 2014 (14,5 milliards de dollars).

A quels freins est confrontée l’économie algérienne ? Comment expliquez-vous leur prégnance ?

Les freins sont multiples. Ont peut citer des blocages d’ordre institutionnel, sociale et sociétale et de la nature même de l’économie algérienne. La persistance de ces difficultés relève encore de la qualité du climat d’affaires qui entrave d’une manière très négative la capacité de création d’entreprises.

Ces obstacles nous interpellent sur la volonté ou la capacité des autorités publiques à mener à terme le programme des réformes engagé depuis 1990. Si des raisons objectives sont à signaler, d’autres relèvent carrément du domaine de la politique économique et des orientations politiques. Le non achèvement  de la mutation de l’économie algérienne vers l’économie de marché pèse lourdement  sur les tentatives de diversification de l’économie.

Quelles sont les solutions pour rendre l’économie moins dépendante des hydrocarbures ?

Il n’y a pas une solution miracle. Il faut déployer les efforts pour soutenir une croissance durable créatrice de richesses et d’emplois à travers l’investissement dans l’innovation et le capital humain. D’autres secteurs peuvent être une niche extraordinaire de croissance comme le tourisme, l’industrie manufacturière, les nouvelles technologies de l’information. Mais cela ne  peut se faire sans un cadre réglementaire adéquat garantissant la propriété privée, l’accès aux financements pour les entreprises et une administration au service de ces dernières.

L’économie algérienne a-t-elle les moyens de résister à une baisse durable du cours des matières premières ? 

Pour le court terme oui. Mais pour le long terme, la tendance dépensière de l’Etat n’est pas soutenable. L’impact sur les finances publiques, fortement tributaires de la fiscalité pétrolière, se reflète dans le creusement du déficit budgétaire et l’érosion plus rapide des ressources du Fonds de régulation des recettes. Sous l’effet de la baisse des recettes de la fiscalité pétrolière (- 28,2 %) par rapport au premier trimestre 2014, la capacité de financement du Trésor s’est contractée de 571,6 milliards de dinars au premier trimestre 2015, chutant à 3916,5 milliards de dinars à fin mars 2015 (4488,1 milliards de dinars à fin décembre 2014 et 5088,6 milliards de dinars à fin mars 2014).

Les moyens existent si on les utilisent d’une manière rationnelle : une épargne publique importance, un déficit budgétaire maitrisable, un matelas de devises  (réserves de change confortable), une inflation maitrisée malgré des signes d’une relance de l’inflation, capacité d’exportation des hydrocarbures non encore utilisée, capacités touristiques non exploitées, secteur agricole, capital humain. Tous ces atouts restent tributaires d’une bonne gouvernance et une vision économique claire. 

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