Déficit de l'Etat : dans les subtilités comptables d'une baisse en trompe-l'œil<!-- --> | Atlantico.fr
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Le gouvernement joue avec les chiffres pour duper la population.
Le gouvernement joue avec les chiffres pour duper la population.
©Reuters

Le compte n'y est pas

Le ministère des Finances annonce une baisse des dépenses de 3,6 milliards d’euros pour les 4 premiers mois de l’année 2015, en profitant de l’arrêt du versement au mécanisme européen de stabilité, pour 3,3 milliards d’euros.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Ce mardi 9 juin, le ministère des Finances publiait un communiqué retraçant l’état du budget du pays pour les 4 premiers mois de cette année 2015 : "Le solde général d’exécution au 30 avril 2015 s’établit à -59,8 Md€ contre -64,2 Md€ à la même date en 2014." Ainsi, et en apparence, la situation budgétaire s’améliore dans une proportion de 4,4 milliards d’euros. L’engagement relatif à la baisse des dépenses serait donc tenu. Pourtant, en détaillant l’ensemble des données fournies, l’optimisme affiché ne semble pas tenir toutes ses promesses.

Le déficit correspond au solde entre les recettes et les dépenses de l’Etat. Il convient donc de rechercher quelle dynamique a permis la baisse de ce déficit en ce début 2015. Du côté des recettes, le chiffre atteint 93,3 milliards d’euros contre 93 milliards sur la même période de 2014, soit une hausse de 0,3% sur un an, ce qui correspond à une progression correspondante à celle de la croissance. Tout est normal.

Puis, les dépenses. Puisque la part la plus importante du différentiel est attachée aux dépenses publiques ; celles-ci sont en baisse :

"Au 30 avril 2015, les dépenses (budget général et prélèvements sur recettes) atteignent 135,0 Md€ contre 138,6 Md€ au 30 avril 2014."

Ce sont 3,6 milliards d’euros qui ont été économisés au cours des 4 premiers mois de l’année, en comparaison à l’exercice précédent. Mais la décomposition par postes de cette baisse permet de mieux appréhender la réalité des comptes. Le plus gros poste, celui des dépenses de personnel, progresse encore de 0,9%, passant de 40,921 milliards en 2014 à 41,282 milliards en ce début 2015.

Puis viennent les baisses. En premier lieu, et malgré un discours politique européen basé sur la nécessité de soutenir l’investissement, la baisse des dépenses d’investissement est vertigineuse, passant de 5, 344 milliards en 2014 pour atteindre 4,2 milliards pour le début 2015. Soit un rabot de 21,4%, ou 1,144 milliards en une seule année. La charge de la dette de l’Etat se contracte également de 5,4%, passant de 18,395 à 17, 399 milliards d’euros, notamment en raison de la chute des taux d’intérêts au cours du premier trimestre.

En second lieu, et pour la part du lion, la baisse des dépenses de fonctionnement atteint 12%, de 22,418 milliards à 19,719 milliards, soit une économie de 2,7 milliards. C’est donc sur ce poste des dépenses de fonctionnement que le budget 2015 serait le plus restrictif. Mais en réalité, il n’en est rien. En effet, une annotation (1) indique que la dotation au "mécanisme européen de stabilité" (MES) est incluse dans les chiffres des dépenses de fonctionnement. Or, si la France a pu verser 5 tranches de 3,3 milliards d’euros au MES, le dernier versement a eu lieu le 29 avril 2014, comme l’indique le site du Sénat. De plus, il est précisément indiqué que, au titre du MES

"Le présent projet de loi de finances ne prévoit pas de dépense pour l'exercice 2015."

Ce qui signifie que la baisse des dépenses de fonctionnement n’est rien d’autre que simplement mécanique, le pays s’étant engagé à verser sa dotation jusqu’en 2014, et pas au-delà. Dès lors, et en prenant en compteun périmètre constant, les dépenses de fonctionnement ne baissent pas de 2,9 milliards, mais progressent de 600 millions d’euros. Au final, la résiduel de la baisse des dépenses publiques atteint 300 millions d’euros, et non 3,6 milliards comme cela est pourtant annoncé.

De plus, cette légère baisse n’est que la conséquence de la forte détérioration de l’investissement public, celle-ci étant supérieure au milliard d’euros. Ce qui rappelle le discours de Manuel Valls, le 8 avril dernier : "Mon message est simple : le gouvernement est mobilisé pour l’emploi, l’activité, le travail, l’investissement".

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