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Les paradis fiscaux ne sont plus ce qu'ils étaient
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G20 de Cannes

"Nous ne voulons plus de paradis fiscaux" : Nicolas Sarkozy a été clair en conclusion du G20 de Cannes. Retour sur les progrès réalisés en la matière, ces dernières années.

François d'Aubert

François d'Aubert

François d'Aubert est Magistrat à la Cour des comptes.

Ancien député UMP.

Président de la Cité des Sciences et de l'Industrie, il est élu en septembre 2009 secrétaire du Peer Review Group du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements  chargé de lutter contre la fraude fiscale en coopération avec l'OCDE.

 

 

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La lutte contre les paradis fiscaux a été inscrite par le G20 de Londres d'avril 2009 comme une priorité. La France, avec l'Allemagne, a joué un rôle déterminant pour que ce sujet ultra sensible aux enjeux financiers considérables reste à l'agenda du G2O, avec un premier bilan  présenté à Cannes des actions menées pour davantage de transparence et de coopération en matière d'échange de renseignement, ceci sur des problématiques liées à la crise et d'autres, montées en puissance dans les années de folie financière précédent la crise.

Paradis fiscaux : des milliards de recettes perdues pour les États

Face à l'ampleur des déficits budgétaires des grands pays, l'"optimisation" comme l'évasion et la fraude fiscales représentent des milliards de recettes perdues pour les Etats, au travers de capitaux non déclarés transférés sur des comptes ouverts dans d'opaques structures offshore. Cette situation pose aussi une question d'équité par rapport à toux ceux qui, eux, paient des impôts ; injustice d'autant plus flagrante que ce sont les plus aisés - en jargon bancaire les "HNWI"(Heigh Net Worth Individuals/plus de 1 millions de $ d'actifs financiers, environ 12 millions de personnes dans le monde) - qui sont les principaux utilisateurs de paradis fiscaux. Soulignons l'actualité brulante de ce problème, symbolisé par les armateurs grecs dont les capitaux en Suisse évalués entre 24 et 240 mrds d'euros échappent à l'impôt. Idem pour les multinationales qui réussisent grâce à des montages sophistiqués et des prix de transfert souvent manipulés, en profitant des différences de législations fiscales, à échapper dans de larges proportions à l'impôt sur les sociétés ou sur les plus values, alors que la plupart des PME n'en ont pas les moyens. Le problème n'est d'ailleurs pas spécifiquement français, il est aussi américain, allemand, italien…

Lutte contre les paradis fiscaux : quels résultats ?

Depuis deux ans, des actions concrètes ont été engagées avec des résultats probants dans la lutte contre cette opacité juridique, comptable et bancaire qui facilite ces pratiques : la coopération entre administrations fiscales en matière d'échange de renseignements a progressé à grands pas avec des modifications importantes dans les législations nationales et surtout avec de nouvelles conventions bilatérales respectant les standards de l'OCDE : plus de 700 ont été signées avec des pays qualifiés récemment encore de paradis fiscaux ou de juridictions non coopératives. Celles-ci permettent en particulier d'identifier les propriétaires et bénéficiaires réels de structures offshore type trusts ou limited liabilitiy companies.

Même dans de grands centres financiers offshore, comme la Suisse ou Singapour, le secret bancaire recule : ainsi disparaissent les principaux obstacles juridiques qui entravaient la levée du secret bancaire pour raisons fiscales. A été aussi mis en place par le Forum Fiscal Mondial un dispositif permanent d'évaluation des législations anti-opacité  et de la coopération fiscale entre les 105 pays membres du Forum, lequel apprécie également l'effectivité de la coopération. 59 pays ont été déjà évalués et pour certains d'entre eux appelés avec insistance, 400 recommandations ont été émises publiquement pour démanteler des dispositifs encore trop opaques. Une dizaine de pays ont été recalés après examen approfondi et ne pourront être notés qu'après amendement de leurs législations ou de conventions d'échanges de renseignements non conformes.

Sur le front du blanchiment d'argent sale (drogue, corruption, contrefaçon, soit plus de 600 mrds $ de "chiffre d'affaires" illicites par an) - dont les paradis fiscaux et les centres financiers offshore sont les pricipaux supports - la lutte s'est également durcie avec la mise à jour permanente de listes grises et noires de pays ne respectant pas les recommandations du Groupe d'action financière (GAFI), appuyée par des sanctions financières de plusieurs dizaines de millions $ visant en particulier banques et  établissements financiers ne respectant non conformes.

Le "shadow banking" en question

Dernier front, celui du "Shadow Banking" ou banque  de l'ombre, c'est-à-dire toute une série de transactions, de produits et d'entités financières portés par des territoires non coopératifs, pesant aussi lourd que les transactions bancaires classiques, mais échappant pour une large part aux régulations prudentielles : la crise prouve tous les jours les risques qu'ils font courir aux investisseurs et surtout aux contribuables chargés bien malgré eux de payer les pots cassés. Les nouvelles régulations qui se mettent en place devront-elles aussi être respectées par les pays aujourd'hui récalcitrants.

La lutte contre les paradis fiscaux et les juridictions non coopératives requièrent un engagement permanent  des Etats, l'élimination des structures juridiques opaques et une coopération très forte des Etats à tous les niveaux, mais d'abord au plan européen ; des changements de comportements des nombreux acteurs impliqués dans ces opérations d'évitement, de fraude et de blanchiment sont également nécessaires : sans doute ont-ils plus conscience aujourd'hui qu'hier, au vu des mécanismes d'échanges de renseignements mis en place et des sanctions qui les accompagnent, que ces pratiques font courir des risques, non seulement au système financier, mais aussi aux investisseurs et à ceux qui sont tentés d'utiliser les juridictions non coopératives pour frauder ou blanchir de l'argent sale.

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