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Des moines orthodoxes à l'origine de la crise grecque ?
Des moines orthodoxes à l'origine de la crise grecque ?
©Reuters

Effet domino

En 2008, des moines grecs se lancent dans une recherche de fonds afin de rénover un monastère byzantin du mythique mont Athos. Leur démarche aboutit... grâce à quelques pots de vin ? C'est ce scandale qui a révélé les failles d'un système qui entraina par la suite la Grèce dans la crise.

C’est l’histoire de la rénovation d’un monastère orthodoxe qui va entraîner un pays entier dans une crise sans précédent. En octobre 2009, la Grèce a révélé qu’elle devait faire face à un déficit et une dette publique abyssaux, qui l'ont obligé à multiplier les appels à l’aide. Les soutiens financiers apportés à coups de milliards par le FMI ou par ses partenaires de l’Union européenne n’ont pas suffi. La note de la dette du pays est régulièrement dégradée par les agences de notation et sa pérennité au sein de la zone euro fait toujours débat.

A l'origine de cette situation historique inédite, un scandale - sur lequel est revenu le magazine américain Vanity Fair - impliquant l’ancien gouvernement grec conservateur de Costas Caramanlis et les moines du monastère de Vatopedi, situé sur  le mont Athos ; un lieu mythique, qui regroupe des édifices orthodoxes et qui est strictement réservé aux hommes, animaux inclus. Rendu public, ce scandale a entraîné la chute du gouvernement Caramanlis en avril 2009, mais n'a pourtant été que peu relayé hors du pays à l'époque.

Des moines pas vraiment irréprochables

Un groupe de moines de Vatopedi a entrepris en 2008 de faire reconstruire et réparer l’un de ses monastères, sérieusement abîmé par le temps. Leur but : lui rendre sa splendeur de l’époque de l’empire Byzantin, ce qui nécessitait énormément d’argent. Pour faire leur état des lieux, les moines ont fouillé l’édifice et ses caveaux, où ils ont découvert des documents indiquant qu’ils possédaient depuis des centaines d’années des droits de propriété sur des terrains, notamment dans le nord de la Grèce et sur un lac. Une aubaine pour le financement des travaux de restauration.

Les moines emmenés par le père Ephraïm, se sont rendu à Athènes, auprès du gouvernement Caramanlis, et sont parvenus à échanger la propriété du lac contre des terrains bien plus rentables appartenant au gouvernement. Le troc semble irréel et ses conditions restent assez obscures. Il semble que les moines aient allègrement graissé la patte d’un certain nombre de membres du gouvernement pour parvenir à leurs fins, bien que le versement d'aucun pot-de-vin n’ait jamais été prouvé.

Reste que le scandale est gravé dans la mémoire des Grecs comme le symbole de la corruption de leurs élites. En l’occurrence, celles du Parti conservateur, auquel les Grecs ont retiré leur confiance plusieurs mois après l’affaire, lors des législatives de septembre 2009.

Un événement déclencheur d'une série de scandales

Difficile de connaître le montant de la perte enregistrée pas l’Etat grec dans cette affaire, les chiffres oscillant entre 100 millions et 1 milliard d’euros. Pas de quoi provoquer la faillite du pays, mais assez pour révéler la situation catastrophique des finances publiques grecques gérées par les conservateurs.

Lorsque le ministre socialiste des Finances, George Papaconstantinou prend ses fonctions en octobre 2009, le déficit public est estimé, selon les chiffres fournis par ses prédécesseurs, à 3,7% du PIB, encore proche des critères de Maastricht pour faire partie de la zone euro. Deux semaines plus tard, la Grèce annonce qu’il est passé à 12,5%, puis à 14%...

Car le scandale des moines en est un parmi d’autres. Pêle-mêle, les socialistes découvrent que le ministère de l’Agriculture emploie 270 personnes pour digitaliser des photos des paysages de Grèce, or tous sont coiffeurs de formation ; qu'en 2009, année électorale, certains impôts ont été supprimés sans que cela ne soit rendu public ; ou encore que deux tiers des médecins prétendent gagner moins de 12 000 euros de revenus annuels pour échapper à nombre d’impôts…  

En somme, le scandale des moines, en provoquant la chute du gouvernement, a ouvert les yeux des Grecs sur toutes sortes de fraudes imputables à leurs élus comme à leurs concitoyens. Reste que les moines du mont Athos, qui jouissaient d’une certaine empathie, voire d’une véritable admiration au sein du peuple grec, ont perdu beaucoup de crédit. Le mont Athos n'est plus le lieu de passage obligé des politiques. D’autant que le père Ephraïm a refusé de comparaître devant une commission d’enquête parlementaire, car cela laisserait entendre, selon lui, qu’il était suspect. Il aura en tout cas été l’instigateur involontaire d’une prise de conscience nationale. 

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