“FN-PS” : l’argument de l’UMP version Sarkozy arrive-t-il trop tard ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Nicolas fustige le vote FN
Nicolas fustige le vote FN
©Reuters

Problème de timing

Pour lancer la campagne de son parti pour les départementales, Nicolas Sarkozy a accordé une interview au Figaro dans laquelle il fustige le "FN-PS". Selon lui "voter pour le FN au premier tour, c’est faire gagner la gauche au second". En revanche, "voter pour l’UMP n’a jamais fait gagner la gauche." Même si cette analyse n'est plus tout à fait d'actualité, le message envoyé à l'électorat de droite reste positif et volontariste.

Philippe Braud

Philippe Braud

Philippe Braud est un politologue français, spécialiste de sociologie politique. Il est Visiting Professor à l'Université de Princeton et professeur émérite à Sciences-Po Paris.

Il est notamment l'auteur de Petit traité des émotions, sentiments et passions politiques, (Armand Colin, 2007) et du Dictionnaire de de Gaulle (Le grand livre du mois, 2006).

 

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Xavier  Chinaud

Xavier Chinaud

Xavier Chinaud est ancien Délégué Général de démocratie Libérale et ex-conseiller pour les études politiques à Matignon de Jean-Pierre Raffarin.

Aujourd’hui, il est associé du cabinet de stratégie ESL & Network.

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Jean Petaux

Jean Petaux

Jean Petaux, docteur habilité à diriger des recherches en science politique, a enseigné et a été pendant 31 ans membre de l’équipe de direction de Sciences Po Bordeaux, jusqu’au 1er janvier 2022, établissement dont il est lui-même diplômé (1978).

Auteur d’une quinzaine d’ouvrages, son dernier livre, en librairie le 9 septembre 2022, est intitulé : « L’Appel du 18 juin 1940. Usages politiques d’un mythe ». Il est publié aux éditions Le Bord de l’Eau dans la collection « Territoires du politique » qu’il dirige.

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  • Au Figaro, l'ancien prédident de la République a déclaré : "Je dis simplement à ceux qui ont voté pour le Front national dans le Doubs: voter Front national a conduit à l'élection d'un député socialiste de plus. Voter pour le FN au premier tour, c'est faire gagner la gauche au second. C'est le FNPS ! Voter pour l'UMP n'a jamais en revanche fait gagner la gauche. Voter FN, si. La seule réalité électorale, c'est le FNPS."
  • Historiquement et mécaniquement, cette analyse se vérifie, mais la récente montée en puissance du FN lors des dernières élections ainsi que dans les sondages laisse à penser l'inverse, car celui-ci est perçu par de plus en plus d'électeurs comme une véritable alternative à l'UMP et au PS.
  • Les élections départementales ne devraient cependant voir que quelques élus FN l'emporter.
  • L'emploi de l'expression "FN-PS" par Nicolas Sarkoy est un coup de communication réussi pour lancer la campagne UMP des départementales, et vise à faire oublier la porosité des électorat UMP et FN.
  • Le FN reste encore dans l'incapacité de s'imposer au second tour des élections présidentielles.

Atlantico : Dans une interview accordée au Figaro, Nicolas Sarkozy a employé l'expression "FN-PS" pour rappeler aux électeurs que le fait de voter FN aux départementales favorise la gauche et dessert inutilement la droite (UMP-UDI). Son analyse se vérifie-t-elle aujourd'hui ?

Philippe Braud : Sur le fond, Nicolas Sarkozy a raison de dire que le vote FN défavorise la droite modérée, même si la formule "FNPS" est contestable et difficilement compréhensible par l'opinion publique.  Cette expression donne à penser que le FN et le PS représentent une même ligne, ce qui n’a pas de sens puisque le vote FN est justement un vote contestataire contre le FN. Mais sur le fond, c’est la même chose qui se produisait du temps où le PC ne s'associait pas au PS. Car si lorsque le FN monte, il prend mécaniquement des voix à l’UMP. Dans un mode de scrutin à dimension majoritaire cela augmente le risque que l’UMP arrive en troisième position, ou même se voie éliminer, car n’obtenant pas les 12,5% d’inscrits. Ce sera d’autant plus important que l’abstention s’annonce très élevée pour ces départementales. Cela suppose tout de même d’avoir 25% des voix quand il y a 50% d’abstention.  

En outre, une distinction entre les élections départementales et les élections nationales s’impose. Les départementales sont par nature un scrutin brise-lame : le FN aura des élus, mais en comptera très peu. Les sondages ont beau positionner le FN en tête, chaque département a ses propres enjeux, avec ses notables qui sont déjà bien en place. Au niveau national, les législatives sont formatées voire téléguidées par les élections présidentielles. Or à ce niveau, l’enjeu principal est la crédibilité : Marine Le Pen sera-t-elle crédible comme présidente de la République française ? Dans ce contexte de l’élection présidentielle il sera selon moi relativement facile de faire reculer le vote protestataire. Je ne nie pas la capacité de Marine Le Pen à faire 40% au second tour des présidentielles, mais elle ne dépassera pas les 50%.

Jean Petaux : Il n’est pas dans mes intentions d’accabler Nicolas Sarkozy, mais très franchement on l’a connu meilleur… D’abord ce jeu de mot sur les sigles du FN et du PS accolé… Outre que cela fait vraiment plagiat, c’est du mauvais plagiat puisque dans le faux sigle "UMPS" popularisé par le FN  il y a une logique (elle n’est pas ébouriffante d’intelligence mais elle fait sens puisqu’elle trouve dans le P de UMP et du PS matière à  trait d’union en quelque sorte, réifiant ainsi les deux partis du « système » que prétend abattre le FN). Nicolas Sarkozy a voulu jouer au fameux "cadavre exquis" cher aux surréalistes : "Course à pied – pied de cheval – cheval de Troie" et ça a donné : "course à pied – tête à claque – cheval dire à ma mère" (autrement dit : aucun rapport entre les termes…). C’est assez affligeant en fait…

Plus sérieusement : si la question de l’alliance objective avec le PS pour les électeurs votant FN a pu être posée en 1997 par exemple quand le RPR et l’UDF ont perdu plus de 70 circonscriptions du fait de "triangulaires" au second tour des législatives (consécutives à la dissolution de l’Assemblée prononcée par Jacques Chirac) et à cause du maintien d’un candidat FN profitant ainsi au PS, on n’en est plus là du tout. Aujourd’hui le FN "prend" autant du côté du PS que du côté de l’UMP. Sans compter que la notion de "vote utile" (ou plus exactement de "vote FN = vote inutile") n’a plus aucune espèce de pertinence quand le vote FN est en passe de devenir le premier vote français dans les "mini-léglisatives" que constituent ces futures "départementales". En réalité c’est la question de l’utilité du vote UMP qui est en train de se poser… Et de moins en moins celle du FN. Cela peut paraître extrêmement pessimiste pour l’UMP de poser le problème en ces termes… mais c’est, hélas pour ce parti, un des enjeux des mois à venir.

Comment interpréter cette sortie de Nicolas Sarkozy contre le FN ? Son attitude renvoie-t-elle un message positif aux sympathisants de droite ?

Xavier Chinaud : Il s’agit là à la fois d’une habileté et d’un coup de com. A en juger par les réactions multiples, le coup de com semble réussi, quant à l’habileté, au-delà du fait que le slogan n’est pas nouveau, il vise autant à détourner le slogan "UMPS" utilisé par Marine le Pen qu’à faire oublier la porosité des électorats UMP et FN, plus qu’il ne traduit une réalité électorale dans la perspective des départementales.

Philippe Braud : le message de Nicolas Sarkozy traduit son anxiété. Cela est justifié, car en 2007 il a su faire reculer le FN, mais aujourd’hui c’est l’inverse. Il a donc toutes les raisons de craindre une contre-performance électorale.

Ce raisonnement consistant à dire que le vote FN est inutile s'inscrit dans une période où les sondages tendent à prouver l'inverse, tout comme les résultats du parti aux municipales et aux européennes. L'argument arrive-t-il trop tard ?

Xavier Chinaud : Il n’est surement pas trop tard pour que l’UMP s’attaque au FN, à son programme et à ses dangers, il serait même assez juste que le Président de l’UMP s’attaque directement à la présidente du FN, ce qui dans l’interview que vous évoquez est moins le cas que vis-à-vis du président de la République. Mais voter FN aux élections départementales n’est pourtant pas voter PS si l’on en croit les études d’opinion récentes : la gauche très souvent divisée dans les cantons verra  les candidats PS éliminés dès le 1er tour dans de très nombreux cas. Dire que le FN nourrit le PS me semble le contraire de cette réalité électorale alors que le FN est crédité d’être en tête au 1er tour, grâce aussi à l’afflux d’électeurs venus de la gauche.  Mais subsiste l’idée depuis la présidence Mitterrand que le PS a parfois favorisé l’extrême droite pour gêner son opposition de droite et le centre.

Jean Petaux : Je me garderait bien de dire que Nicolas Sarkozy n’a plus la vision du jeu qui a fait, très longtemps, sa force et sa qualité première… Mais tout de même, sur cette séquence, comme on dit d’un gardien en mal de réussite, "il s’est troué". De lui qui connait bien le football et qui l’apprécie, tout comme son successeur, on peut dire qu’il nous a fait avec cette sortie au "Figaro" une jolie "arconada"… Cet argument du "vote FN inutile" arrive trop tard et il est surtout parfaitement réversible. On pourrait même préciser : dangereusement réversible au détriment de l’UMP. Quels sont les risques pour le parti de la droite républicaine ? En premier lieu c’est d’apparaître comme une vieille organisation qui n’a d’autre ressource que de crier "au loup" pour faire obéir ses ouailles... Le deuxième risque tient au "dépassement par la droite" : le FN est dans la situation de celui qui remonte, par la droite et à grande vitesse, la file des voitures bloquées dans l’embouteillage d’une crise sans fin, en utilisant sans vergogne le couloir d’autobus ou la bande d’arrêt d’urgence. Le troisième risque est le plus dangereux : pour l’électorat FN tout discours stigmatisant agit comme un violent produit dopant qui accroit l’envie de "renverser la table" et de franchir la ligne de "l’interdit fondateur". C’est une forme d’incitation à la transgression : "Ah bon… ???... C’est comme ça que vous le prenez ?... Voter FN c’est voter inutile ? Eh bien tu vas voir Sarko si ça ne va pas être utile !". CQFD.

Le discours du Front national a manifestement de l'effet sur l'opinion. Comment a-t-il contribué à redéfinir en partie le discours politique français, et que doit faire la droite pour le contrer ?

Xavier Chinaud : Distinguons le discours du programme, la petite musique "attrape-tout" jouée par le FN sur le thème "ils ont tous échoué, essayez-nous" trouve un écho dans l’électorat plus que les propositions formulées par le parti d’extrême droite. Le FN ne redéfinit pas le discours politique français, il profite de l’effondrement en termes de valeurs de la parole politique. Si le nombre d’électeurs du FN a augmenté partout c’est d’avantage une adhésion au discours "de ras-le-bol" visant à conjuguer les peurs que sur les propositions de fond.

Comment le contrer ? D’abord par la pédagogie, en expliquant et combattant le programme du FN, sur la sortie de l’euro, la gabegie financière qu’il constitue ou le mythe de l’immigration zéro comme le défendait récemment Alain Juppé. Ensuite, en sortant de cette triangulation Hollande/Sarkozy/le Pen, dont chacun d’eux semble s’accommoder, que l’on impose aujourd’hui dans la perspective présidentielle, mais qui à terme pourrait ne profiter qu’à la présidente du FN.

Philippe Braud : Le discours du FN a un impact sur l’opinion dans la mesure où l’on n’en entend qu’une partie, et où ses adversaires se focalisent sur un aspect seulement. Ce discours anti immigrés, identitaire, "la France d’abord" rencontre beaucoup d’écho. Mais cela revient à oublier que dans ce programme se trouvent bien d’autres choses, comme la sortie de l’euro et, en pointillés, la sortie de l’UE telle qu’elle fonctionne actuellement. Si les grands partis se donnaient la peine de décortiquer pour les électeurs ce que seraient les conséquences du programme FN, ils pourraient alors faire reculer le vote FN.

Jean Petaux : Je n’aurais pas la prétention de me substituer à des professionnels du combat politique dont c’est, si non le métier, du moins l’ambition. Les analyses du discours du FN sont nombreuses aujourd’hui. Elles convergent sur un point : le Front national, comme d’autres formations avant lui en France ou ailleurs, bénéficie de "lames de fond" très porteuses : le sentiment de déclassement, l’inquiétude quant aux perspectives d’avenir, la peur engendrée par les différences, une remise en cause complète de toutes les institutions sociales, politiques, partisanes, familiales, éducatives qui pouvaient, d’une manière ou d’une autre, offrir un cadre protecteur et rassurant et qui rendaient presque improbable un vote protestataire fondé sur le refus de l’autre, le repli nationalitaire ou la haine de l’étranger. 

La société post-moderne a renforcé le primat de l’individu et lui a donné en quelque sorte tous les droits. Y compris celui de faire n’importe quoi, de croire n’importe qui et surtout de désavouer toutes celles et tous ceux qui le rebutent. Comment s’étonner que le FN « n’emporte pas la mise » dans ces conditions et dans un tel contexte ? Finalement, peut-être que le seul atout du FN ne tient ni à son discours ni à son programme. Le FN est là tout simplement. Il est là comme "solution de rechange".

Après tout quand vous avez crevé vous n’êtes pas forcé de tomber amoureux de votre roue de secours. Vous n’êtes même pas forcé d’y croire… Vous changez de pneu tout simplement. Peut-être que le principal mérite du FN de Marine Le Pen aura été d’attendre que le "fruit soit mûr". Le FN avec plus de 7000 candidats est la formation politique qui en présente le plus aux élections départementales des 22 et des 29 mars prochains. Ce serait un vrai miracle si tous ces candidats connaissaient le programme national du FN… C’en serait un encore bien plus grand si toutes celles et tous ceux qui vont voter pour eux connaissaient le début du commencement de ce programme. Dans certaines campagnes, il ne serait pas impossible qu’une chèvre avec une pancarte FN autour du cou recueille des voix. Est-ce qu’il s’agirait alors d’insulter la chèvre ? Ses électeurs ? Pour le coup ce serait vraiment inutile (et injuste). Il faudrait seulement reconnaitre qu’en l’état actuel de l’opinion, tout ce qui s’apparente de près ou de loin au parti de Marine Le Pen a le vent en poupe…  

Les sympathisants FN se divisant entre des électeurs de longue date fortement ancrés à droite, et d'autres qui viennent de classes plus populaires, quelles postures différenciées l'UMP doit-elle adopter ? A-t-elle davantage de chances de récupérer les électeurs FN "de droite" que les électeurs FN des classes populaires ?

Xavier Chinaud : l’enjeu n’est pas la « récupération » d’électeurs, qui doit-on le rappeler n’appartiennent à personne, mais de convaincre de son projet et avoir la capacité de rassembler. Avoir un projet clair et assumé plutôt que la juxtaposition de propositions individuelles comme autant de candidats à la candidature, le faire partager par la pédagogie et le rassemblement, cela passe a minima, pour l’UMP, par une alliance sincère avec le Centre dans toute sa diversité, comme elle est de fait réalisée dans l’immense majorité des cantons dans l’élection départementale, UMP-UDI-Modem.

Philippe Braud : Tant qu’un parti reste groupusculaire il a beaucoup plus de chances d’êtes homogène, mais dès lors qu’il franchit des seuils en matière d’électorat, cela veut forcément dire que l’on assiste à la convergence de courants qui peuvent être assez différents. Pour le moment le flux se fait de la droite vers l’extrême-droite, précisément parce que les dirigeants de l’UMP ne savent pas trouver le point faible du programme FN, qui, je le répète, n’est pas la crispation nationaliste (cela est au contraire très payant), mais les conséquences de ses thèses sur l’Europe. Electoralement parlant, il est de bonne guerre de ne pas laisser trop de terrain à l’adversaire sur le plan thématique. Si les leaders de droite veulent contrer le FN, ils ont intérêt à durcir leur langage sur les sujets sur lesquels surfe l’extrême droite. C’est surtout une question de « style » à adopter. Par ailleurs, l’UMP pourrait avoir intérêt à procéder à une stratégie de débauchage d’éléments du FN aux élections départementales, car je pense qu’elle elle aurait tort de récuser toute alliance de désistement au second tour.

Jean Petaux : J’aurais tendance à penser que dans les deux cas elle aura beaucoup de mal. C’est bien là la quasi-aporie à laquelle l’UMP est confrontée. Les électeurs les plus ancrés à la droite de la droite, ceux qui ont par exemple voté Jean-Marie Le Pen en 2002, sont, apparemment, les plus hermétiques à l’idée d’un retour du côté de la "droite républicaine". On peut aussi considérer que les nouveaux électeurs FN que vous désignez comme "venant des classes plus populaires" ne sont pas seulement d’anciens électeurs UMP voire antérieurement RPR ou UDF. Certains ont pu être aussi des électeurs de gauche… On voit mal alors comment l’UMP pourrait les récupérer puisqu’elle ne les a peut-être jamais eus. Je pense que là où  l’UMP a des "réserves" c’est  (et ce n’est pas la seule formation dans ce cas d’ailleurs) dans la masse des abstentionnistes. Dans ce groupe qui risque d’atteindre 60% des électeurs inscrits au soir du 22 mars… Ce sont sans doute ces électeurs qui « votent avec leurs pieds » en allant partout ailleurs le jour du vote qu’au bureau de vote, qui représentent  cette "armée de réserve" (pour reprendre une expression qui a fait flores il y a bien longtemps). Mais c’est bien là aussi que se situe la vraie difficulté : comment refaire voter des citoyens qui ne votent plus… ?  Et surtout en les faisant revoter, en les incitant à le faire, ne risque-t-on pas de les faire voter… FN ? Le comble en somme… Ou l’arroseur-arrosé si l’on préfère.

Le FN est en passe de remporter quelques succès au niveau local, un peu comme à l'époque où le PC avait beau ne plus être un grand parti, il bénéficiait encore de "baronnies ". Quelle influence cela donnait-il au PC, et que peut-on en déduire pour le FN ? Ce dernier pourrait-il par ce biais peser au plan national ?

Xavier Chinaud : la comparaison avec le PC n’est d’abord pas juste historiquement : le Parti communiste notamment de par son engagement pendant la Seconde Guerre mondiale a occupé après-guerre une place importante dans la vie politique française. Celle-ci n’a fait que diminuer depuis, notamment grâce à l’habileté du même François Mitterrand qui ouvrit à Jean-Marie le Pen l’accès aux plateaux de télévision. Le FN, lui, est en phase ascendante depuis une période bien plus récente et n’a pas  encore à ce jour de "baronnies" telles que vous les évoquez.

Enfin le PS et le PC étaient lié par le "programme commun", ont gouverné ensemble et se sont présentés ensemble devant les électeurs, ce qui n’est pas et ne peut être le cas de l’UMP et du FN. Le seul point commun entre les deux reste aujourd’hui une gestion catastrophique des collectivités qu’ils ont eu à gérer.

Jean Petaux : Je fais partie de ceux qui se méfient des comparaisons faciles entre le PCF et le FN… On est encore dans l’attente de connaître et de voir quelles sont les conquêtes sociales que le FN va pouvoir afficher à son "tableau de chasse ". Le PCF est un parti presque centenaire désormais (95 ans) qui a joué, à plusieurs reprises dans l’histoire de France, un rôle essentiel voire décisif et surtout salvateur (pas tout seul mais qui a pris toute sa part). Le FN n’a à offrir qu’un pâle ersatz de fonction tribunitienne, dirigé par une petite entreprise familiale, fondé et piloté par un clown devenu vieux qui n’avait qu’une crainte : prendre le pouvoir où que ce soit. Désormais, l’héritière de l’entreprise, représentante de la seconde génération, applique à la lettre la vieille loi du capitalisme patrimonial : le père crée le produit, l’héritière le fait fructifier et en développe la production à grande échelle au point de se retrouver souvent leader sur son créneau… et la troisième génération a souvent la main moins heureuse. On verra bien. Pour l’heure comparer le PCF au FN est bien trop prématuré.

Si le FN obtient de diriger seul certains départements il en ira tout autrement. Entre la ville de Fréjus (52.500 habitants) dirigée par David Rachline depuis 2014 et un département comme le Vaucluse ou l’Aisne susceptible d’être conquis par le FN on conviendra que ce n’est pas du tout la même chose. Incontestablement le FN se retrouvera en situation de disposer de moyens bien plus importants. J’aurais tendance à considérer d’ailleurs que c’est à ce moment que les soucis commenceront vraiment pour l’organisation lepéniste. Avec les risques bien connus qui s’amplifient dans ce genre de situations : comportement des "grands élus" par rapport à la direction politique du parti ; constitution de "féodalités provinciales" avec lesquelles il faut compter ; moyens qui seront différenciés entre "départements FN" et les autres ; potentialités de canaux parallèles au financement centralisé… Le FN connaitra les problèmes d’une organisation en passe de "s’embourgeoiser" dans le système… Problèmes qu’il aurait déjà connus si un système électoral idiot, aussi inepte que l’autruche ou que celui qui casse le thermomètre pour se faire croire à lui-même qu’il n’a pas de fièvre, n’avait empêché le parti de Marine Le Pen d’avoir un groupe de 80 à 100 députés à l’Assemblée. Autrement plus compliqués à gérer qu’une nièce et un avocat.

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